Alors, maintenant que j’ai parlé de moi, de mon historique musical, de mes influences, et de ma passion déraisonnée pour Guns ‘n’ Roses, nous pouvons rentrer dans le vif du sujet. Le vif du sujet étant la création et comment j’en suis arrivé à créer des morceaux qui parlent de psychopathes (la grosse tendance, il faut bien l’admettre). Et au départ quel est le sujet, la motivation qui va faire qu’on pond des tubes ?
Ben je dirais en ce qui me concerne, d’avoir beaucoup rêvé d’être à la place des stars que j’adule. Pas pour l’argent, les groupies, le champagne qui coule à flot et les téloches qu’on balance du haut de l’hôtel qu’on a consciencieusement saccagé auparavant… Non non. Ca je dirais que c’est quelque chose qui me ferait peur et m’inciterait à ne surtout pas m’infiltrer dans cette vie que je trouverais malsaine et qui ne conviendrait pas à ma bonhommie habituelle. Non, je parle de cette jouissance de jouer sur scène, de se transcender et d’être en communion avec un public qui rentre en transe lui aussi (parce qu’on ne peut qu’être en transe lors d’un concert, sinon ça sert à rien. Autant aller pointer à l’usine, le repas du soir est plus garanti). Attention, je ne parle pas ici de ces bêtes de scènes qui se roulent par terre pour « le show », mais bien de ceux qui sans trop en faire ou parce qu’ils ont pas envie de jouer cette mascarade, arrivent malgré tout à faire passer leur truc, à hypnotiser un auditoire par leur seule présence et leur rapport à leur musique. Dans le genre, dEUS a été une énorme claque. Jimmy Barnes et son show dans un placard à l’Arapaho aussi. Les Black Crowes idem, qui sont limites les yeux fermés ou rivés sur leurs instrus, mais qui sont tellement dedans que forcément on l’est avec eux.
Donc au début, et bien on veut imiter nos héros. Et faire un album, parce qu’un héros sans album n’est qu’un demi-dieu. Et forcément l’album ultime, parfait, ressemble au concert ultime, parfait. Un mélange d’énergie, de transe, de moments intimistes et de ruades guitaristiques échevelées. Un savant dosage de up and down. Des montagnes russes psychédéliques qui font décoller les pieds du sol. On trouvera forcément donc dans mes albums (certains sont des « compilations » de morceaux, d’autres, des concepts indissociables) tous ces ingrédients.
Prenons exemple sur « Songs Of Love And Brotherhood ». Bon, j’avoue que pour celui là j’ai un peu triché, vu que la version que je présente aujourd’hui est un montage de plusieurs morceaux issus de mes 3 premiers albums. Mais le principe reste valable malgré tout. Donc :
On commence tel le sauvage moyen par « Nasty Habits », un morceau bien punk dans l’esprit, rapide (tempo à 200BPM, ça pulse sa mémé), hurlé plus que chanté. 2’20 au compteur. Ca pose l’ambiance, il faut saisir l’auditeur. Ca continue avec « Lunatic », du rock super basique, avec solos, refrains porteurs (enfin je trouve hein…), on continue de saisir. Une fois l’auditeur bien saisi d’un côté, on retourne, et on attaque avec « Rock’n’Roll Demon » pour faire évaporer le gras. C’est un rock’n’roll bien des familles, avec des paroles rigolotes (l’épopée d’un garçon de ferme qui veut devenir une rock star, et qui finit à la ferme entouré de vaches, cochons, poules pour sa prestation la plus faramineuse). Normalement, ça headbangue là-dessus.
Voilà, l’auditeur/spectateur est saisi. On peut le faire mitonner un poil avec « Normandy ». Un long morceau (et encore je vous ai épargné la version de 20’, celle-ci est réduite de moitié) qui plonge dans l’esprit d’un soldat ricain mourant sur Juno Beach lors du débarquement allié. Le morceau n’est pas drôle, assez introspectif, et la fin devrait inciter (enfin c’est ce que j’ai essayé de faire, encore une fois je n’ai pas la science infuse, je parle de mon expérience et de comment j’ai voulu la mener) aux images éthérées d’un au-delà très planant.
Après ce passage évocateur, convoquant les esprits, on repart sur du bon rock qui donne envie de danser et balancer la tête d’avant en arrière avec « Little Piggy ». Rock’n’roll, pas prise de tête. On s’amuse aussi hein.
« Firecracker » et « Toxic Avenue », bien dans l’esprit Tom Petty / Bruce Springsteen, doivent être le moment fort de l’album/Concert, avant de terminer sur « Cornershop ».
Cornershop, c’est mon morceau préféré. Je le joue depuis que j’ai une guitare dans les mains (en fait pour être plus exact depuis que j’ai découvert l’open tuning de Sol). On reviendra sur ce morceau plus tard pour le décortiquer comme il se doit. Les paroles sont de l’ami Séb, mais il avait du lire dans mes pensées ce jour là, j’aurais écrit exactement le même genre de trucs.
J’ai beaucoup de mal avec les albums plutôt homogènes. Enfin, pas dans le son, il faut que le son soit homogène, qu’un look audio se dégage d’un album et donc de son/ses interprètes. Mais un peu de diversité ne fait pas de mal. Par contre, il ne faut pas exagérer : un album avec un blues, un funk, un reggae, etc. ça fait vraiment trop fourre tout. C’est compliqué d’être cohérent sans être chiant…
Une fois l’idée générale de l’album en tête ou notée sur papier on va attaquer les morceaux. Les composer, les écrire, c’est passionnant, l’idée étant évidemment d’éviter le syndrome de la page blanche. Je l’ai eu au début ce syndrome. Mais j’imagine que c’est comme tout. Une fois qu’on s’y met définitivement, ça sort tout seul. Pour reprendre un célèbre penseur du 21e siècle, ça doit être un peu comme le Ketchup…
Prochaine étape donc : j’ai une page blanche. A quoi ça sert ?