Rythmes scolaires, violences scolaires, etc.
L'Ecole de la République traverse des moments difficiles, et on cherche des solutions qui permettraient à la fois d'apaiser le climat dans les établissements et d'améliorer performances et connaissances. Toutefois, une solution n'est pourtant pas évoquée, ni exploitée : celle des bons scolaires ou chèques éducation. Elle a pourtant fait la preuve de son efficacité en Suède (1992) dans plusieurs Etats américains, en Australie, en Nouvelle Zélande, en Israël, aux Pays Bas, dans le Kent en Angleterre. Une étude menée dans l'Etat de Milwaukee démontre que les enfants gagnent non seulement en connaissances mais aussi en comportements. Le seul indice mesurable, celui des résultats à l'entrée à l'Université, faisait apparaître un écart (positif) de quelque 25 % par rapport aux établissements et aux Etats qui ignorent le système. En France même, un récent sondage (« Créer son école ») fait apparaître que trois quarts des Français approuveraient le principe.
Les Vouchers de Milton Friedman
Dans « Capitalisme et Liberté », le prix Nobel d'économie Milton Friedman s'interrogeait sur les meilleures méthodes pour utiliser au mieux l'argent des contribuables, et surtout leur en demander moins. Il définissait le principe qu'au lieu d'affecter les impôts à financer les administrations qui rendent des « services publics » (ou dits tels), il valait mieux en remettre le montant aux consommateurs de ces services publics, en leur laissant le choix des administrations en mesure de fournir ces prestations. Ce principe général s'applique à beaucoup de services publics, comme les transports, les hôpitaux ou les soins médicaux, la culture, mais avec une particulière efficacité à l'enseignement scolaire. Friedman a donc popularisé le concept de « vouchers », bons remis aux usagers des services publics.
Monopole et Rigidité
Aujourd'hui, dans la pratique française, l'argent collecté pour l'enseignement par l'Etat ou les collectivités locales est directement versé aux établissements : universités, lycées, collèges et écoles. Bien que ce ne soit pas le seul critère retenu, les effectifs de chaque établissement sont le principal élément de calcul de leur dotation budgétaire. Ainsi le primaire reçoit-il (de la commune) le « forfait d'externat », tout comme le secondaire (du conseil général), voire l'université (de la région). Parallèlement les enseignants émargent au budget de l'Etat.
Dans cette situation, les familles n'ont guère le choix. Elles ont été pendant longtemps bloquées par la carte scolaire. La carte a été assouplie, mais demeure l'incapacité de créer un établissement, ou des classes, tout autant que de modifier programmes et pédagogie : tout est réglé par l'autorité publique, y compris pour l'enseignement dit « privé ». L'enseignement demeure un monopole public, défendu avec beaucoup de vigueur par la plupart des syndicats d'enseignants. Les familles sont confrontées à un système rigide, qui ne tient pas compte des contraintes de revenus, de localisation, de métier ou même de croyance. Dans ces conditions, elles finissent par considérer la vie scolaire comme une affaire d'Etat, les impôts leur ouvrent un droit « social », mais pas un droit individuel.
Concurrence et Responsabilité
Dans le système des vouchers, ce sont les familles qui font les choix éducatifs. Le principal de ces choix est l'établissement. Mais l'établissement, cela signifie aussi la qualité des maîtres, le contenu des enseignements, les rythmes scolaires, la tenue et la politesse, etc. Les familles n'ont pas toujours au départ l'information voulue pour ces différents éléments, mais peu à peu la sélection s'opère, et la réputation se fait.
Encore faut-il que les choix soient ouverts et divers. Une carte scolaire figée dessinée par une administration centrale est hors de question. Il doit y avoir liberté d'entrée (et de sortie) d'un « marché » de l'enseignement. Alors la concurrence va produire ses effets toujours positifs : les faibles devront s'aligner sur les forts, et tout le monde y trouvera son compte, y compris les enseignants eux-mêmes. Les parents, qui aujourd'hui n'ont pas leur mot à dire et se désintéressent parfois de la qualité de l'enseignement, se sentiront responsables de « leur » école.
Le bon scolaire, filet social
Il existe une version encore plus radicale du bon scolaire. On peut en effet laisser l'enseignement au seul jeu du marché, puisque rien n'interdit d'offrir et de demander ce type de service. A ce moment-là, l'inscription dans un établissement a un prix, en général en relation avec sa qualité – comme pour tout produit. Dans ce cas, il n'y a plus d'impôt prélevé pour l'enseignement, puisque c'est la famille qui en assure les coûts.
Cependant l'Etat peut garantir l'accès à l'école de tous les enfants, le droit à l'éducation pouvant en effet passer pour un droit individuel. A ce moment, le bon scolaire est remis aux familles qui n'ont pas les moyens de payer une inscription, alors même que leurs enfants ont passé avec succès la sélection d'entrée. Ici le financement est assuré par l'impôt, au titre de la solidarité : le bon scolaire est un filet social.