"[La Suisse] est formée d'une communauté italienne qui doit retourner en Italie, d'une autre communauté allemande qui doit retourner en Allemagne et une troisième communauté française qui doit retourner en France."
Dans la foulée, en septembre 2009, il avait déposé à l'ONU une requête, non retenue, demandant le démantèlement de la Suisse qu'il considérait comme "une mafia mondiale et non un Etat".
Prenant le contre-pied complet, le 18 mars de cette année, Dominique Baettig, Conseiller national UDC du Jura [dont la photo ci-dessus provient du site du Conseil national ici], avait déposé la motion suivante ici n°10.3215 au Conseil national :
"Le Conseil fédéral est chargé de proposer un cadre constitutionnel et légal permettant d'intégrer, en tant que nouveau canton suisse, des régions limitrophes dont une majorité de la population en ferait la demande."
Quelle était son argumentation ?
"Considérant le manque d'intérêt de la classe politique nationale et européenne dont souffrent certaines régions limitrophes, leur volonté croissante d'obtenir de l'autonomie par rapport à l'Etat central (ou Bruxelles), le Conseil fédéral est chargé de proposer dans les meilleurs délais à l'Assemblée fédérale un cadre constitutionnel et légal opérationnel, qui permettrait éventuellement, si une majorité de la population en faisait la demande, aux départements, provinces et länder limitrophes suivants:
Alsace (F); Aoste (I); Bolzano (I); Jura (F); Vorarlberg (A); Ain (F); Savoie (F); Bade-Wurtemberg (RFA); Varese (I); Como (I) ou autre (liste ouverte!), qui ont déjà exprimé un tel intérêt démocratique par le passé, de rejoindre la Confédération helvétique en qualité de nouveaux cantons suisses, avec, à la clé, le droit d'Initiative et de référendum, avantages d'un système de démocratie directe. Ces régions limitrophes disposent d'une longue tradition et volonté politique de souveraineté de leurs citoyens, de démocratie de proximité, à échelle humaine et leur intégration à la Confédération serait bénéfique bilatéralement et ne causerait pas de problèmes politiques insolubles. Il s'agit d'un signe politique d'ouverture à l'extension d'un modèle de souveraineté suisse, proactif, plutôt que de laisser l'initiative du grignotage d'adhésion à l'Union européenne, dont les institutions centralisatrices sont coupées des aspirations de ses citoyens."
Le Conseil fédéral n'avait pas goûté ce qu'il avait considéré comme une plaisanterie et avait répondu notamment le 19 mai 2010 :
"Une révision de la constitution fédérale qui aurait comme objet de donner aux régions limitrophes à notre pays la possibilité de rejoindre la Confédération suisse serait un acte politique inamical, que les Etats voisins pourraient considérer, à juste titre, comme provocateur. Elle nuirait donc de manière grave aux relations avec les Etats concernés.
Cette révision serait non seulement politiquement inadéquate, mais problématique sur le plan du droit international. Elle violerait les règles fondamentales du droit international, qui ne reconnaît pas un droit général à la sécession. Un droit de sécession ne peut constituer qu'une "ultima ratio" dans des circonstances exceptionnelles, circonstances qui ne sont évidemment pas données en l'espèce."
Et fait le même jour la déclaration suivante :
"Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion."
Bref, pour le Conseil fédéral, les régions limitrophes étaient condamnées à rester attachées à leur pays d'origine et à ne même pas pouvoir envisager leur sécession. Tant pis pour elles, elles feraient automatiquement partie ad vitam aeternam de l'Union européenne, ce bateau qui coule et qui entend que toutes les régions embarquées, a fortiori limitrophes de la Suisse, coulent avec lui.
Le 22 juin dernier Le Figaro, sous la plume de Marie Maurisse ici, s'en prenait en ces termes à l'initiateur de la motion :
"Boutefeu, ce psychiatre loufoque est membre de l'Union démocratique du centre (UDC), le premier parti de Suisse. Habituée aux provocations, cette formation nationaliste est notamment à l'origine de la votation contre les minarets. À Berne, 26 députés UDC n'ont pas hésité à cosigner le texte de leur collègue."
Quand on n'a pas d'arguments...
L'hebdomaire suisse-allemand Weltwoche a eu la facétieuse idée de demander leur avis aux habitants de ces régions limitrophes ici. Les résultats du sondage réalisé par l'institut Swiss-Opinion, publiés aujourd'hui, montrent que la motion de Dominique Baettig n'était pas aussi utopique que cela :
"Dans le Vorarlberg (Autriche), 52% des personnes interrogées soutiennent l'idée de rejoindre la Suisse, 35% sont opposées et 13% ne savent pas. En Savoie-Haute-Savoie (France), l'idée séduit 48% des sondés, contre 39% hostiles et 13% sans opinion. Dans le Bade-Wurtemberg (Allemagne), c'est oui à 48% et non à 40%, alors que la proportion est de 52% en faveur et de 44% contre dans la région Côme-Varèse (Italie)." [voir Le Matin en ligne du 14 juillet 2010 ici]
Ce qui attire les candidats au rattachement ?
"L'un des arguments principaux qui parlent en faveur de la Suisse, c'est la démocratie directe. De plus, selon l'enquête, entre 70% et 80% des personnes interrogées trouveraient la Suisse intéressante également économiquement et fiscalement."
Le quotidien italien La Provincia di Como ici fait un sondage sur le Net. Question : "Volete che Como sia annessa alla Svizzera?" [Voulez-vous que Côme soit annexée à la Suisse] ? Résultat : 77% de réponses affirmatives !
Ce n'est pas pour demain que tous ces braves gens des régions limitrophes, qui veulent échapper à la servitude socialiste, nationale et eurocratique, verront leurs voeux exaucés.
Enfin, la motion n'a pas, à l'heure qu'il est, était examinée par le Conseil national...
Francis Richard