On ne s'imagine pas une Tour active retranchée derrière une masse compacte de Pions. Cela paraît contradictoire. Une Tour a besoin de colonnes et de rangées pour circuler sur l'échiquier et ne voit généralement sa liberté de mouvement grandir qu'après une série conséquente d'échanges. D'où sa mise en jeu tardive dans la partie et le nombre important de finales avec cette pièce. Mais de nombreux compositeurs ont voulu faire le contrepoint de cette observation pratique, et ont réussi à exprimer des idées étonnantes, en réfutant simplement le sens commun. Pour vous en convaincre, voici deux problèmes surprenants...
W. Shinkmann - Checkmate, 1903
Les Blancs jouent et font mat en 3 coups
Le grand Tartacover a affirmé que pour résoudre un problème d'échecs, il suffisait le plus souvent de penser au coup le plus "bête"...
1.Th2 !! Y avez-vous pensé ? 1. ...Rxa4 2.Fc6+ Rxa3 L'autre fuite est aussi sanctionnée par le mat... 3.Fc5 mat ! Il fallait protéger le Pion a2 ; c'était le meilleur moyen d'activer cette Tour ! Et maintenant, dans le même ordre d'idée...
W. Kennard, 1915
Les Blancs jouent et font mat en 4 coups
1.Tc1!! En guise de colonne ouverte, on trouve facilement mieux ! Mais sur l'essai 1.Tf4 ?, les Noirs répliquent 1. ...c5 ! 1. ...b5 L'autre coup de Pion 1. ...c5 amène la manoeuvre Td1-d5xc5 mat... 2.c5 b4 3.cxb4+ Rb5 4.c4 mat ! L'idée blanche apparaît maintenant ; il fallait protéger le Pion c4.
Ces deux Tours se sont planquées derrière un mur épais de pièces ou pions amis, en contradiction avec la pratique courante du jeu. Nous aurons l'occasion d'étudier d'autres positions de ce type...