Le ministère de l'écologie vient de rendre public l'avant-projet du Schéma national des infrastructures de transport (SNIT) (à télécharger ici, 6,8 Mo). Cela peut vois sembler anecdotique ou technocratique, je crois au contraire qu'il s'agit d'une vraie géopolitique et qu'il convient d'y porter un œil plus attentif.
Explications.
1/ Le SNIT a été décidé à l'occasion du Grenelle de l'environnement : on remarque que cette question des transport s'insère donc dans une perspective écologique, ou de développement durable, qui va dans le sens de ma conception de la "géopolitique des ressources". Si le projet a pu arriver tard, au moins est-il là. Notons d'ailleurs que les conclusions font, à première vue, l'adhésion même si l'opposition pose déjà la question des financements.
2/ Le commissariat au plan a disparu, la délégation à l'aménagement du territoire ne fait plus parler d'elle. Mais la nature ayant horreur du vide, on s'aperçoit qu'il y a besoin d'une nouvelle planification du territoire. Le SNIT correspond à ce besoin, et on ne peut que s'en féliciter : ce mélange de prévision de long terme (dix ou quinze ans), de territoire et de décision politique réunit tous les ingrédients d'un cas géopolitique. C'est d'une vraie "politique géographique" qu'il s'agit (voir mon billet).
3/ Comme tout le monde, on retiendra l'accent donné aux transports collectifs, mais aussi au ferroviaire. Au sujet des transports collectifs, je n'ai pas discerné si la carte présentée reprenait le schéma de Christian Blanc ou celui proposé par la région IDF. Quant au rail, chacun aura compris qu'il s'agit d'un mix entre d'une part le développement du réseau TGV, mais aussi du fret ferroviaire, considéré comme l'alternative d'avenir à la route. On remarque ainsi la ligne TGV Paris Rouen Le Havre, avec une bretelle qui pointe vers Caen : outre la terminaison de la transversale Est-Ouest, il s'agit de mettre en œuvre l'option du grand Paris qui se trouverait enfin un port (voir mon billet).
4/ Car la grande nouveauté me semble être l'eau. On parle bien sûr (enfin !!!) de transport fluvial, et tout d'abord de la connexion Seine - Nord; on évoque également la connexion Saône-Moselle qui permettrait enfin de terminer l'axe Nord Sud et de connecter Marseille à l'Europe du Nord. D'ailleurs, on remarquera que l'on reparle également de la liaison Saône Rhin, qui avait été évacuée jadis pour des raisons environnementales (et économiques). Peut-être qu'en réduisant le nombre d'écluse on trouvera enfin une solution à ce projet qui devrait être une priorité nationale. Mais l'eau concerne les rivages, et l'on entend parler d'une politique portuaire, ainsi que des autoroutes de la mer, notamment sur l'arc atlantique.
Comme vous le voyez, il y a comme le début d'une politique de rééquilibrage maritime qui changerait, un peu, le vieux schéma géopolitique français. Ce n'est pas rien, et cela méritait ce billet.
Je vous conseille vivement de télécharger le document, il est bourré de cartes toutes plus passionnantes les unes que les autres.
réf
- compte rendu sur l'avant projet : le monde, le figaro, les échos.
- réaction cawa d'adminet,
- rapport 1316 du sénat de 2003 sur "Planifier les infrastructures de transport".
O. Kempf