Le commerce mobile est présenté depuis longtemps comme le nouvel eldorado. Ces dernières années, la ruée vers l’or du commerce mobile a été régulièrement annoncée, mais pour le moment, il faut bien avouer que nous n’avons vu ni la ruée, ni l’or. Cette année pourtant, la tendance s’affirme avec davantage d’offres et des chiffres qui deviennent un peu plus significatifs.
Pour échanger sur ce sujet plein de promesses, le Café du E-Commerce réunissait en table ronde plusieurs experts le 18 mai dernier.
Visionner la vidéoCommerce Mobile : comment le Caractériser ?
Il n’est pas simple de caractériser le commerce mobile, car le concept recouvre de nombreuses réalités selon les devices et les usages. Mobile phones, smartphones, bornes, etc. ces différents terminaux et modes d’utilisation participent du commerce mobile avec, bien entendu, des implications très différentes pour les E-Marchands. Pour ne pas nous cantonner à la transaction, nous évoquerons ici le « commerce » dans son périmètre le plus large, en incluant les solutions de marketing mobile, les applications autour des services ou les dispositifs de génération de trafic vers les magasins.
GfK étudie le marché des appareils multimedia mobiles et des smartphones en rassemblant les données en provenance des fabricants et principaux distributeurs. « Ce marché est l’un des plus dynamiques, il devrait tripler dans les trois prochaines années », constate François Klipfel de GfK. Le panéliste constate une percée très importante des smartphones. En 2009, ils ont en effet représenté 15% des ventes de téléphones mobiles, avec 23,6 millions d’unités vendues, soit 35% du marché en valeur. Les prévisions 2010 sont de 26% en volumes, soit près de la moitié du marché en valeur.
Motivations d’Achat des Smartphones et Usages
L’achat d’un smartphone est un achat réfléchi : 45% des acheteurs recherchent de l’information sur le web et un sur trois prend conseil auprès de ses amis avant de choisir un smartphone. Les fonctionnalités représentent d’ailleurs le premier critère de choix, devant le prix. Et les utilisateurs de smartphones sont très consommateurs de ces nouveaux usages.
Le commerce mobile est encore faible parmi les usages mobiles. Mais la navigation Internet est en 4e position chez les possesseurs de smartphones, derrière l’utilisation de toutes les capacités multimedia (photo, vidéo et musique). N’oublions pas que les applications de M-Commerce peuvent tirer parti de toutes fonctionnalités des devices (y compris la photo et la vidéo) pour inventer un nouvel usage de commerce.
La messagerie instantanée est aussi un usage en bonne place chez les possesseurs de smartphones, et qui se révèle très addictif : un potentiel à creuser pour les annonceurs.
Quels Usages pour une Application de M-Commerce ?
Pour Julien Saumande de Phocéis, les fonctionnalités et usages des appareils mobiles permettent de reproduire tout le processus d’achat d’une boutique en ligne :
- Achat en mobilité : réponse à un besoin rapide (ex : places de cinéma) ou à un achat d’impulsion (ex : ventes privées).
- Multitouch, grand écran (iPad) : les nouveaux catalogues de VAD sont arrivés (ex : Gap sur iPad)
- Notifications push : envoi d’offres spéciales, d’alertes (expédition, …)
- Génération de codes barres : tickets ou coupons de réduction
- GPS : localisation du point de vente, push géolocalisé (ex : restaurant), localisation du consommateur
- Appareil photo : réalité augmentée, lecture de code 2D (codes promotionnels sur publicité ou lien vers un article), identification de produits
- Dématérialisation de la carte de fidélité : ouverture en magasin, suivi points, en attendant le NFC.
- Utilisation des tags (code-barres, flashcode, MS Tags…) : permet le lien entre le marketing print et le marketing digital.
Mutualiser les Efforts pour Gérer la Multiplicité des Devices
Le problème principal reste la nécessité de composer avec la mutiplicité des devices et des formats. Les plateformes sont effectivement diverses. Elles sont à distinguer, non seulement pour l’aspect technologique, mais également parce qu’elles adressent différents usages et différents segments de marché.
Mais en examinant les segments de populations utilisateurs de smartphones, il s’avère que les différences sont de moins en moins marquées. Certaines catégories sont prêtes à de véritables sacrifices financiers pour s’offrir un abonnement smartphone. « Nous assistons à un retour de l’émerveillement technologique avec le smartphone » affirme François Klipfel.
Chez les plus jeunes, les digital natives, on constate également de nouveaux usages, avec le multi-canal simultané (ex : surf sur mobile tout en regardant la télévision). Il est également intéressant d’analyser les croisements entre ventes de terminaux et téléchargements d’applications pour bien comprendre les usages par type de mobile.
Les Questions à se Poser avant de Démarrer
Lancer une application mobile nécessite de définir avant tout sa stratégie pour aborder le marché des mobinautes. Que souhaite-t-on leur proposer ? Une navigation sur mobile facilitée ou une application à télécharger ? Un reflet exact du site web ou une nouvelle expérience utilisateur ? Doit-on positionner son application avant, pendant ou après l’achat ? Souhaite-t-on proposer de l’information ou jouer sur l’émotion ?
Pour Jean-François Gomez, un projet mobile doit faire l’objet d’un véritable business plan. Les gains sont parfois complexes à évaluer car le mobile, s’il ne permet pas toujours la transaction, est souvent le lien indispensable pour conduire à l’achat sur un autre canal.
Il faut donc bien évaluer l’infrastructure nécessaire pour reconnaître et suivre le client, analyser son comportement, et surtout être capable de consolider cette information avec celle des autres canaux d’interaction.
La relation avec le client doit aussi faire partie des préoccupations majeures du fournisseur lors d’un projet mobile : « Il est nécessaire pour le fournisseur d’être présent dans la sphère digitale du client, qui est maintenant très proche de sa sphère sociale », explique Jean-François Gomez. Si une relation de confiance s’établit, le client sera prêt à délivrer de l’information et à autoriser la marque à le contacter, en utilisant notamment le canal mobile et ses nouvelles capacités (géo-localisation notamment) : une formidable opportunité pour la marque de créer une relation de proximité à travers un canal que le client a toujours avec lui.
Quelques Choix Technologiques à bien Appréhender
Une fois la stratégie définie, quelques questions techniques sont à soulever, pour choisir la meilleure solution face aux objectifs de l’application.
Tout d’abord, faut-il une application connectée ? Trois modes sont possibles pour faire fonctionner une application : déconnecté, connecté par une synchronisation régulière, connecté en temps réel. Selon les volumes de produits au catalogue et le besoin de réactivité (accès au stock, calcul de tarif…), le choix peut s’imposer.
Pour la connexion au site web, plusieurs alternatives s’offrent aussi : la création de web services, l’utilisation du mobile comme canal complémentaire du site existant, ou encore la duplication des référentiels avec réplication des données, qui peut être nécessaire pour des besoins de performance.
Les modes de synchronisation et d’accès au site web doivent s’envisager en alliant les besoins d’ergonomie et de praticité de l’application, mais sans négliger les problématiques de performance, explique Julien Saumande.
La question de la finalisation de la transaction se pose également, car il peut être judicieux (et moins coûteux en termes de développement) de s’arrêter à la constitution du panier, pour proposer de finaliser l’achat en effectuant le paiement via un autre canal.
Enfin, face à la multiplicité des applications, il est intéressant d’observer le positionnement de Microsoft avec Windows Phone 7, approche en rupture avec ce que l’on a habituellement sur les smartphones : plutôt que de passer d’une application à une autre, avec une organisation en silos, l’idée est de se recentrer sur les relations et de positionner le lien social avant l’application. Il sera donc proposé de parcourir ses contacts (amis ou marques) à travers les différentes applications. Vous pourrez par exemple voir les photos d’un contact provenant vos applications (facebook, adressbook,… ) sans avoir à rentrer et sortir de chacune d’entre elles.
« Le mobile est un point d’entrée privilégié pour accéder à son réseau social », explique Jean-François Gomez. Pour gagner la confiance du client et lui proposer une expérience unique, cette nouvelle vision de la navigation mobile est nécessaire.
Approche Analytique Associée
Pour Jean-François Gomez, l’analyse des usages est essentielle pour suivre le parcours du client et s’adapter rapidement aux évolutions de son comportement. « L’enjeu est de réconcilier tous les canaux pour engager une relation efficace avec lui, mais il faut pour cela disposer de capacité de calcul très importantes».
Les nouvelles solutions à la demande (« dans le Cloud ») offrent une alternative intéressante pour disposer pendant un temps donné des capacités de traitement nécessaires pour analyser des volumes de données importants.
GfK développe une solution innovante et unique testée actuellement par une dizaine d’opérateurs dans le monde.
Elle permet de mesurer tout ce qui transite dans les « tuyaux » des opérateurs : mots-clefs saisis, applications utilisées, sites visités, voire même taux de transformation. En traçant le parcours client de manière anonyme, cette solution analytique permet de comprendre le comportement du mobinaute et d’adapter ses applications et services. Elle donne notamment des résultats très différents sur les comportements des utilisateurs, selon qu’ils sont équipés d’un téléphone mobile, d’une carte 3G, ou d’un smartphone.
La mesure devient extrêmement précise et permet d’adapter le service en fonction de paramètres à la granularité de plus en plus fine.
Le futur en quelques chiffres
Pour terminer sur une vision d’avenir optimiste, rappelons quelques projections sur le commerce mobile dans le monde : en 2010, le M-Commerce devrait doubler aux Etats-Unis, pour atteindre 2,42 Mds de $. Il représentait en 2009 1,5% du commerce en ligne, et ce chiffre devrait passer à 8,5% en 2015 selon le cabinet Coda Research, pour représenter près de 24 Mds de $.