Une partie de la collection Polaroïd (4500 photographies) avait été mise en dépôt au Musée de l’Élysée à Lausanne; son avenir est actuellement incertain, du fait des faillites de la société Polaroïd. L’autre partie de la collection était restée aux États-Unis (s’y étaient ajoutées les 1500 pièces confiées initialement à la Maison Européenne de la Photographie, mais que celle-ci avait renvoyées à Polaroïd, ne voulant plus assurer le coût de leur stockage) et elle vient d’être partiellement vendue aux enchères (des polaroïds, mais aussi beaucoup de photographies standards, en particulier par Ansel Adams). Le sort de la collection déposée au Musée de l’Élysée est entre les mains des financiers, des hommes de loi et des mécènes éventuels. Après l’exposition à Lausanne ce printemps, Arles est peut-être la dernière occasion de voir ces photographies avant qu’elles ne soient dispersées : Polaroïd en péril ! Quel dommage qu’il n’y ait pas de catalogue (ni de bons visuels disponibles, d’où mes médiocres photos pleines de reflets) !
Un des chefs d’oeuvre de ce corps-à-corps avec l’image, de cette ambition de la modifier avant qu’elle ne soit figée, de cette volonté d’intervenir avec la main sur cette reproduction mécanique, de conserver un geste de dessinateur face au tout-pouvoir de la chimie est ce petit polaroïd d’Andreas Mahl :
les voiles qui cernent cette femme enceinte, qui lui donnent un dynamisme ailé des plus étranges sont le résultat de froissements et de frottements sur le film polaroïd à sa sortie de l’appareil. Le polaroïd a permis cette photographie en dépit de l’appareil, cette liberté du photographe refusant de se soumettre aux règles.Je vous laisse enfin deviner ce que représente vraiment le polaroïd anonyme en haut de ce billet, ne vous fiez pas aux apparences.
Une autre exposition de polaroïds par de jeunes photographes du sud de la France se tient aussi à Arles pour quelques jours, sous l’égide de l’association Réponse par l’image. J’ai en particulier été surpris par ce deux polaroïd surréaliste de Celia G. : comment fait-on de la surimpression ?En conclusion, au-delà des problèmes de droit et de patrimoine, particulièrement complexes dans ce cas, cette exposition est l’occasion de voir comment l’innovation technique et la créativité artistique vont de pair.
Photos de l’auteur excepté von Rosen, Bazen et Mitchell.