La liste des avions présentés la semaine prochaine au salon de l’aéronautique de Farnborough est courte, tout au moins si l’on met ŕ part des appareils historiques bienvenus mais sans rapport avec les objectifs professionnels de la manifestation britannique. Personne ne veut l’admettre mais il y a pléthore de salons alors que, dans la plupart des cas, un colloque suffirait ŕ la tâche. Tout le monde y gagnerait.
Cela étant dit, Farnborough est assuré de la participation de deux vedettes trčs attendues, l’A400M et le 787. Tous deux appartiennent au club de moins en moins fermé des programmes qui ne respectent ni leur calendrier, sur leurs enveloppes financičres. Airbus Military et Boeing vont sans doute éviter ce sujet qui fâche, trop heureux d’enfin montrer leur dernier-né. L’un et l’autre poursuivent actuellement leurs essais en vol, leurs responsables (et leurs actionnaires) se remettent de leurs émotions et vont évidemment expliquer que, désormais, tout va pour le mieux.
En bord de piste, les visiteurs resteront sur le faim, sachant que le monde aéronautique est actuellement en phase de transition et que les grands programmes tendent ŕ se raréfier. Les regards s’attarderont notamment sur divers UAV, certains trčs impressionnants, qui joueront bientôt un rôle d’importance croissante aux dépens des avions pilotés. Par ailleurs, la longévité de quelques grands programmes sera une fois de plus illustrée par quelques valeurs sűres, par exemple les Lockheed Martin F-16 et le C-130J. Boeing, décidément trčs présent, exposera aussi un 777-300ER aux couleurs de Qatar Airways et, dans une tout autre catégorie, un C-17 Globemaster. Ce dernier, en principe en fin de carričre, intéresse tardivement un nombre croissant d’armées de l’Air et, de ce fait, n’a sans doute pas dit son dernier mot.
L’essentiel, pourtant, prendra une autre forme. Les chalets des grands exposants serviront de cadre ŕ des discussions passionnées que suivront rapidement commentaires et analyses de toutes espčces. Les grands classique, cette année : la maničre de l’Organisation mondiale du commerce de traiter les Ťsubventionsť vraies ou imaginaires, légales ou interdites, qui polluent la rivalité Airbus-Boeing. Cela pendant que Russes et Chinois engloutissent des sommes considérables, étatiques de bout en bout, dans les programmes MS21 et C919, court/moyen-courriers qui prétendent affronter bientôt les gammes A320 et 737. En marge de cette polémique, les ambitions renouvelées de Bombardier et Embraer feront l’objet de nouveaux échanges de vues sans reposer pour autant sur des éléments d’appréciation nouveaux. Reste ŕ savoir si Farnborough sera l’occasion de l’annonce de nouvelles commandes civiles, lesquelles confirmeraient ainsi que le transport aérien retrouve le sourire.
Ce sont des thčmes de réflexion plus ingrats, plus techniques, plus compliqués, qui mériteront de retenir l’attention. A commencer par le renouvellement de gamme des motoristes, General Electric, Pratt & Whitney, Rolls-Royce et, avec eux, CFM International
et International Aero Engines. Leurs efforts conditionnent largement l’apparition d’avions civils de nouvelle génération. On ne peut s’empęcher d’ajouter que les discussions en cours gagneraient en qualité en ayant pour cadre les salles climatisées d’un quelconque palais des congrčs et non pas un lointain village de toile séparé du monde civilisé par d’inextricables embouteillages.
Heureusement, la face cachée de tout salon est autrement utile. Des centaines d’exposants s’y pressent pour se faire connaître, vendre ou acheter. Il est rarement question de leurs affaires dans les médias, bien qu’ils constituent les bases indispensables du tissu industriel mondial. On allait oublier de le dire : c’est ŕ eux que s’adressent les salons, celui-ci en męme temps que les autres.
Pierre Sparaco - AeroMorning