Spring, restaurant gastronomique, bar à vins gastronomique
6 rue Bailleul, 75001 Paris.
Tél. : 01 45 96 05 72 (Pour l’instant, appeler la boutique : 01 58 62 44 30, mais le mieux c’est de passer et réserver en personne).
Site Web.
L’ouverture très attendue de Spring, le restaurant de Daniel Rose (et sa dream team), se précise. Pour l’instant, pas encore d’annonce officielle sur le blog du restaurant. Sans doute une façon de ne pas provoquer le mauvais sort, qui a fait trainer les travaux et retardé l’aboutissement du projet. Il y a quelques jours encore, une fuite sur une canalisation de gaz publique, dans la rue, s’est invitée sans prévenir. La persévérance et la patience du chef et de son équipe (qui pour ne pas perdre la main, et tester de nouvelles idées, ont lancé l’éphémère mais très appréciée Table 28) vont très vite être récompensés. La semaine dernière, les tests et essais en conditions réelles ont démarré. Quelques afficionados et heureux chanceux ont déjà pu jouer aux cobayes. John Talbott a testé le déjeuner et noté 8.5, Alec Lobrano semblait également de la partie (« excellent lunch« ). Quant à Alain Fusion, il y a diné et aimé « à la folie ».
L’équipe prend ses repères et passe aux choses sérieuses, puisqu’e les réservations sont ouvertes au public pour diner à partir de ce mardi 13 juillet. La fine équipe : Daniel Rose, Marie-Aude Mery, Ola Claesson, en cuisine, Fabien Mazzia en salle, Sofian Aït-Bouda aux boissons, finit de se mettre au point, pour atteindre son rythme de croisière dès la rentrée de septembre 2010. Vous pouvez déjà commencer à réserver!
Deux douzaines de couverts (un seul service) au rez-de chaussée, avec une grande cuisine ouverte sur la salle. Un bar à vins et tapas au premier sous-sol. Au second sous-sol, la cave. J’ai eu la chance de diner au restaurant gastronomique samedi 10 juillet 2010, grâce à F, qui m’a donné un bon tuyau, mais surtout grâce à Daniel, qui a été sensible à mes arguments et motivations (bientôt jeune papa, je ne sais pas quand j’aurai l’occasion d’y diner), et qui aurait été ravi de voir la naissance d’un bébé dans son tout nouveau bébé! J’avoue que moi aussi je trouverais amusant de dire : « my offspring was born at Spring« (désolé pour mon humour pourri!). Voici le récit de cette avant-première. Attention, c’est encore en rodage, donc tout n’est pas encore complètement abouti, et encore moins figé, ça continuera de progresser et de se bonifier dans les semaines qui viennent.
Passé vers 18h, j’arrive avec O quelques instants après 20h. Nous partageons la table de l’ami F déjà là et de son ami JO, pas encore arrivé. Sofian, qui m’a suggéré une belle bouteille de Blanc de Noirs d’Ulysse Collin à 18h, a prévu un apéritif sans alcool sympathique pour O : une limonade artisanale et bio, à la fleur d’oranger (Elixia). F est au blanc d’Alsace, alors que je me laisse tenter par une coupe de Prosecco (sorelle Bronca, assez doux), pour démarrer doucement. Et un peu de Bru bien fraiche. Nous passerons ensuite à la carafe. La carte des vins est assez équilibrée : pétillants, blancs de l’Est, blancs de Bourgogne et de la Loire, rouges et rosés, rouges de Bourgogne et de la Loire, rouges de Bordeaux, du Rhône et du Sud, vins du monde et vins doux.
Il y a nettement plus d’espace que rue de la Tour d’Auvergne, pourtant, la salle garde une dimension humaine et assez intime. Il n’y a pas de course à la sur-exploitation du mètre carré, la distance entre les tables est agréable. En plus des tables classiques, quelques tabourets hauts permettent de s’installer directement à hauteur de cuisine.
Des gougères tièdes et légères annoncent le début du diner.
Hop, nous finissons les verres d’apéritif et passons à un côte du Jura (Jean Macle, 45€, de 2006?), bigrement oxydatif, qui sera carafé et rafraichi. L’accord avec les deux plats suivants est très bien trouvé. Moi qui suis d’habitude réfractaire à ce genre de vin, au bout de quelque gorgées, je fus conquis.
Cela démarre très fort avec une réduction de romaine, chorizo, croutons, giroles en pickles et radis ; à côté, un bon morceau de foie gras mi cuit chacun. Une entrée fine et légère, dont la présentation visuelle claire et simple cache la complexité et la richesse des saveurs. La barre est déjà haute!
Pendant que nous dégustons, le dressage de l’étape suivante prend place à quelques mètres de nous, sur le grand plan en inox façon comptoir. Soin du détail, précision et gestes déjà surs.
Hop, on passse de la terre et du vert, à la mer et à des couleurs plus chatoyantes : tomates rouges, jaunes et vertes), filet de thon blanc (germont) de Saint de Luz, tête de gambas panée/frite de Nouvelle Calédonie, avec ce qu’il faut d’huile d’olive (Alziari?). La tête de gambas surprend et se croque comme une grosse chips en 3D, c’est amusant! et bon, pour ne rien gâcher. La texture du thon et son goût sont divins. Les tomates apportent fraicheur et un chouïa de légère acidité. Encore une préparation qui vaut le détour!
Nous partageons deux pièces de ventrêche de thon (supplément 10€/pièce) à quatre. Le morceau de choix saisi juste ce qu’il faut, fondant à souhait.
Le reste (le corps) des gambas de Nouvelle Calédonie, sauté, arrive un peu après, avec du citron et une sauce au vinaigre balsamique. Plus simple et moins surprenant, mais cela ne nous empêche pas de continuer à nous régaler. On sent l’influence d’un séjour au Japon dans ces créations. Influence qui vient renforcer le bagage culinaire des chefs. Autre point qui mérite d’être souligné : les portions servies sont généreuses et consistantes, pourtant, il n’y a aucun sentiment de lourdeur, ni de trop plein, c’est sain et sans artifice ni sauce bourratifs. On pourrait continuer indéfiniment…
Arrive ensuite le demi-pigeon saignant aux concombres cuits, foie et abats. Le concombre cuit, on n’y pense pas souvent. Pourtant, c’est un cousin de la courgette, et autres cucurbitacées que l’on cuisine plus souvent cuites que crues. Mais il fallait y penser. L’accord avec le pigeon apporte fraicheur, légèreté et aussi un peu de douceur. Le pigeon et les abats, seul ou avec un autre accompagnement, pourrait choquer un peu, étant donnés la saison et la climatisation pas encore opérationnelle. On le verrait plutôt en automne, en hiver. C’est le concombre qui légitime et valide ce choix. La bestiole est superbe. Si certaines fines gueules auraient plutôt vu un poisson, elles n’ont pas hésité une seconde quand on leur a proposé un second service! Et en sont venu à bout sans aucun problème, preuve, s’il en fallait encore, des vertus hautement digestion friendly des préparations du Spring.
Dans les verres, nous sommes passés à l’indémodable Saint Joseph de Dard et Ribo (53€). Nous étions partis sur un verre chacun, mais-surprise!- l’avons liquidée sans aucun problème. Même l’assiette de fromages est bien dosée : un Brie assez bien fait, un Saint Nectaire excellent et un Ossau Iraty goûteux. Là encore, le bon dosage pour en profiter comme il faut, sans saturer.
Place au sucré. Abricots pochés à la verveine, puis caramélisés, fleurs de coriandre. Fruité à souhait, avec le bon niveau de sucré, servi encore tiède. Du simple et efficace.
Le vin n’ayant pas fait long feu, Sofian nous fait gouter une vieille (1990) bouteille de Coteaux du Layon, domaine des Baumard, cuvée le Paon. Belle couleur, demi-moelleux, très riche et complexe, mais un peu trop sucré pour moi.
Pour finir, on retrouve un classique de Spring, la tarte citron chocolat crème. Cette fois-ci, en version sans pâte (hop, encore un coup de légèreté), puisque le chocolat se retrouve sous forme de fin crumble, surmonté de crème, de crème au citron, et d’une touche de zestes de citron vert, pour la touche finale.
Une ré-interprétation dans la lignée de l’ensemble du repas : extra! Du très grand niveau, haut perchés. On redescend doucement sur terre en débriefant entre nous, puis en échangeant plus ou moins avec quelques membres de l’équipe. Nous ravis, eux, soulagés, rassurés, mais fatigués, après cette première semaine à nouveau sur le terrain (en action).
Une centaine d’euros par personne pour ce diner de haute volée : apéritifs, menu à 64€/personne (cinq services, fromages, deux desserts), deux bonnes bouteilles et un café. Vous me direz que ce n’est pas donné, ce qui est vrai, mais cela me parait tout à fait justifié. Et pour les grincheux qui diraient que Spring, au début, c’était plus abordable, je ne leur dirais pas le contraire, mais, à part le nom et Daniel Rose, il y a eu évolution et maturation, ce qui justifie une montée en gamme et en tarifs. L’esprit chaleureux et personnel, presqu’intime de Daniel Rose est toujours présent. Le plus beau, c’est que ça ne fait que commencer, et que ça va surement aller crescendo. Même si je ne pense pas qu’ils courent après les étoiles Michelin, elles ne sont vraiment pas loin. Bravo!
À suivre, puisque j’y retourne, en principe, ce soir!
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