Cours d'éthique et de culture religieuse : pour un enseignement de la religion sans imposition de foi quelconque
Il n'est pas étonnant que le Ministère de l'éducation, du loisir et du sport (MELS) ait choisi pour sous-titre du cours d'ECR la phrase Pour vivre ensemble dans le Québec d'aujourd'hui. Notre société de plus en plus pluraliste sur le plan des croyances nous amène à repenser l'enseignement religieux. Lorsque des enfants provenant de différents milieux culturels se mettent à occuper nos bancs d'école, les écoles confessionnelles catholiques posent problème. En effet, celles-ci transmettent des croyances propres à une communauté, et non à l'ensemble de la population. C'est la raison pour laquelle les écoles publiques du Québec sont, par la laïcité, exemptées de tout enseignement de la foi catholique. Faut-il pour autant éradiquer tout enseignement religieux des programmes scolaires? Non. Car la religion, au sens large, rassemble l'étude de diverses croyances, et donc de plusieurs cultures. L'enseignement de la religion permet d'élargir nos connaissances du phénomène humain. C'est pourquoi le MELS a introduit le cours d'ECR. En accord avec les valeurs de la vie collective au sein d'une société de plus en plus pluraliste, les objectifs du volet religion de ce cours sont énoncés ainsi :
Votre enfant apprend progressivement à :
- connaître la place importante du catholicisme et du protestantisme dans l'héritage religieux du Québec;
- découvrir la contribution du judaïsme et des spiritualités des peuples autochtones à cet héritage religieux;
- connaître des éléments d'autres traditions religieuses apparues récemment dans la société québécoise.
Mais les écoles confessionnelles rejettent le relativisme culturel
C'est le cas du Collège Loyola, dont il est question ces jours-ci. École catholique, ce collège a vu le juge Dugré lui accorder le droit de donner le cours d'ECR sous une approche catholique. Cette décision du juge sème la controverse dans la province. En effet, le collège privé Loyola, catholique, devrait avoir le droit d'offrir un enseignement catholique. Cependant, bien que privé, le collège demeure financé en partie par l'État. Cette pratique fait en sorte que le collège Loyola se trouve dans la nécessité d'offrir le cours d'ECR. Pas étonnant que le collège décide d'adapter ce cours selon sa philosophie. Mais cela pose un problème d'équivalence. Les diplômés des écoles privées confessionnelles du Québec n'auront donc pas, si la cour suprême ne revient pas sur la décision du juge Dugré, suivi le même enseignement d'ECR que leurs camarades des écoles publiques. Si le gouvernement du Québec tient absolument à garder le cours d'ECR, je pense dès lors qu'il ne devrait pas en faire une condition d'obtention du diplôme des études secondaires. Dans l'éventualité où la cour suprême revenait sur la décision du juge Dugré, le Collège Loyola se retrouverait dans la nécessité de se plier au programme du MELS pour l'enseignement d'ECR. Cela ne devrait pas l'empêcher de dispenser un enseignement religieux de foi catholique, en autant qu'il se garde d'en faire une condition de réussite des études secondaires.
L'enjeu du financement des écoles confessionnelles privées
Nous avons, au début de cette discussion, posé la question à savoir si l'enseignement de la foi et des sciences sont compatibles. Au nom du respect de la liberté de religion, les institutions scolaires privées sont en droit d'enseigner la foi à leurs élèves. C'est davantage le financement de ces écoles confessionnelles par le gouvernement qui suscite la controverse. En Ontario, les écoles confessionnelles privées ne sont pas subventionnées par le gouvernement. Une telle politique ne ferait pas de mal au Québec non plus. Car l'État québécois, laïque, se doit de rester neutre sur le plan des valeurs religieuses. Tandis que le financement d'écoles confessionnelles privées sous-entend, implicitement, une prise de position face aux valeurs religieuses. Qui plus est, on est à même de se demander quelle sera la position du gouvernement du Québec quand des groupes culturels, autres que catholiques, voudront voir leurs écoles subventionnées par l'État. Le Québec aura-t-il assez de fonds pour financer l'ensemble des écoles privées de confessions distinctes, sans pour autant s'enliser dans de la discrimination budgétaire? J'en doute. Mais si une chose est certaine, c'est que l'univers du catholicisme est loin d'être entièrement disparu de la sphère politique de la province, comme en témoigne le crucifix placé au-dessus du siège du président à l'assemblée nationale du Québec.