En avant-première, en direct du bureau de Claude Guéant, les propos (à peine romancés) de Sarkozy face à Pujadas.
David Pujadas : « Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir répondu à notre invitation. Comme vous le savez, nous sommes au cœur d’une actualité brûlante et votre intervention a suscité beaucoup d’attentes ces jours derniers. »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, ce qui m’intéresse ici ce soir, c’est pas d’commenter la rumeur, d’faire le jeu d’une certaine presse, une presse qui utilise des méthodes qui auraient dû disparaître, après les heures sombres de Vichy que l’on a connues en France. Non, c’qui m’intéresse, et ce pourquoi j’ai été élu, c’est les vrais problèmes des français : les retraites, la sécurité, la crise, la santé, l’éducation. C’est c’que j’ai dit cette semaine et que j’redis solennellement ici. Moi, j’suis un président du terrain, j’écoute les français. Ils souhaitent qu’on continue les réformes. »
David Pujadas : « Pensez-vous que suite à ces affaires, le Gouvernement soit encore en mesure de mener les réformes dont vous parlez, au premier lieu desquelles la réforme des retraites ? »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, j’ai été élu pour réformer la France, après des années d’immobilisme. Rien ni personne m’empêchera d’continuer. Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste encore à faire. C’est pour ça que j’me bats et que j’continuerai à me battre. La réforme des retraites est une occasion historique. C’est une réforme juste, Eric Woerth l’a menée admirablement. Il a tout mon soutien, et j’me battrai jusqu’au bout pour ne pas laisser passer cette chance. »
David Pujadas : « On a beaucoup critiqué l’injustice de cette réforme, notamment la non prise en compte de la pénibilité, le fait que les retraités ne contribuent pas à l’effort national et le maintien du bouclier fiscal ? »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, il faut arrêter de se voiler la face et de céder aux arguments idéologiques, dénoués de fondement. Faut pas croire aux arguments du parti socialistes, c’est quand même eux qu’ont mené l’pays où il est aujourd’hui avec la retraite à 60 ans et les 35 heures. La pénibilité sera prise en compte au cours de l’examen qui sera fait de cette réforme. Je m’y engage solennellement, et j’mettrai la même énergie à tenir ma promesse qu’à Gandrange. Quant à la mise à contribution des retraités pour financer les retraites, croyez-vous vraiment que j’sois assez con pour taxer la seule partie de l’électorat qui me reste fidèle, après toutes les conneries qu’on a faites ? Même chose pour le bouclier fiscal, vous pensez que c’est qui qui financera la prochaine présidentielle ? Les ouvriers qui gagnent le SMIC ou les électeurs de Neuilly qui paient l’ISF ? »
David Pujadas : « Eric Woerth est-il encore capable de porter cette réforme des retraites, emblématique de votre quinquennat ? »
Nicolas Sarkozy : « J’connais pas d’ministre plus honnête qu’Eric Woerth. C’est l’honnêteté faite homme. J’vais quand même pas croire les premiers sites Internet qui viennent qui mettent en cause des ministres de mon gouvernement. On peut pas livrer aux chiens l’honneur d’un homme. R’gardez Bérégovoy et Salengro. Ca aurait dû servir de leçon aux socialistes. Et Woerth, moi j’en ai besoin pour 2012. Vous en connaissez beaucoup qui peuvent lever 7 millions d’euros de dons aux présidentielles ? Mois, pas. Et d’ailleurs, M’sieur Pujadas, j’vais vous faire part d’une nouvelle réforme. C’est Guéant qu’en a eu l’idée tout à l’heure, deux heures avant l’émission. C’est pas encore ficelé comme réforme, mais j’vous l’annonce quand même. On va mettre tout le web sous surveillance. On va créer une commission, dont les membres seront nommés parmi des adhérents de l’UMP. Mais a priori, c’que j’peux vous dire, c’est que siègeront à cette commission Frédéric Lefebvre, Nadine Morano, Brice Hortefeux, Isabelle et Patrick Balkany parmi d’autres. Cette commission aura pour mission de valider tout ce qui sera publié sur Internet. Si quelque chose n’est pas favorable au pouvoir en place, le contenu sera retiré. C’est aussi simple que ça. Et c’est un grand pas pour la liberté d’expression. »
David Pujadas : « La liberté d’expression ? »
Nicolas Sarkozy : « Oui, au moins, on n’aura qu’un seul message, clair et contrôlé. Ce s’ra beaucoup plus facile pour tout le monde. Et comme on contrôle déjà les radios et télés publiques et privées, c’est que la suite logique des choses. »
David Pujadas : « Ne serait-il pas mieux qu’Eric Woerth démissionne et prépare sa défense, laissant le gouvernement travailler ? »
Nicolas Sarkozy : « Ecoutez M’sieur Pujadas, j’suis déjà pas très crédible en Président d’la République, j’apprends la démission d’mes ministres en tombant sur leurs blogs. J’ai déjà deux démissions sur les bras, j’vais pas m’en coller une 3e une semaine plus tard. Nan, l’mieux, c’est d’attendre la rentrée, en espérant qu’ça s’calme. »
David Pujadas : « Ne pensez-vous pas qu’il puisse y avoir conflit d’intérêt entre les fonctions de trésorier et celle de ministre du budget ? »
Nicolas Sarkozy : « Ecoutez, on a vu pire. Les diamants de Giscard, la deuxième famille de Mitterrand, les billets de Chirac. Et on voudrait m’faire croire qu’on est aussi incorruptible qu’aux Etats-Unis ? « Sarko l’Américain », c’est un slogan de campagne, c’est pas une ligne de conduite, faut pas confondre. »
David Pujadas : « Ne voyez-vous pas un possible conflit d’intérêt entre les fonctions d’Eric Woerth, ministre du budget et celle de sa femme, qui gérait la fortune de Mme Bettencourt ? »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, faut vivre avec son temps, les femmes de ministres, elles ont droit à avoir des carrières. La parité, c’est pas un vain mot. On peut quand même pas d’mander d’un côté de favoriser le travail des femmes et d’l'autre, les interdire de travailler quand elles sont femmes de ministre. Vous m’voyez expliquer à Woody Allen qu’Carla peut pas tourner dans son film passqu’y a risque d’conflit d’intérêt. C’est pas sérieux ! Faut vivre avec son temps. Bernie et les pièces jaunes, c’est fini ! »
David Pujadas : « Avez-vous reçu de l’argent liquide des Bettencourt, comme l’affirme le site Mediapart ? »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, faut pas tomber dans l’poujadisme. C’est mauvais pour ma campagne de 2012. Ca fait gagner des voix à Marine LePen et résultat, avec tous les centristes qui veulent se présenter, on va droit vers un 21 avril à l’envers. Martine pour 5 ans, c’est pas c’que les français veulent. Regarder c’que ça a donné avec Chirac. »
David Pujadas : « Beaucoup s’insurgent contre le fait que les enquêtes soient menées par Philippe Courroye, un magistrat hiérarchiquement soumis à l’exécutif et de plus un de vos amis. Qu’en pensez-vous ? »
Nicolas Sarkozy : « M’sieur Pujadas, si on peut plus faire juger des affaires qui dérangent par des amis, ça vaut pas la peine de faire campagne pour être élu. Vous savez, une campagne, c’est dur. Non, d’ailleurs, on a eu une idée avec MAM, on va faire réviser la constitution. On va rattacher la justice au ministère de la justice, et toute décision devra être approuvée par le ministre. C’est déjà comme ça aujourd’hui. Ca fait qu’officialiser c’qui s’fait déjà. C’est ça la République Irréprochable. »
David Pujadas : « Comment jugez-vous l’attitude du Parti Socialiste dans cette affaire ? »
Nicolas Sarkozy : « Ils utilisent des ragots pour salir l’honneur d’un homme, et empêcher les réformes de s’faire. C’est pas une attitude responsable, ils servent pas la démocratie en agissant comme ça. »