Par Bernard Vassor
Le but de la société était d'exploiter la vanité, la gloriole et la présomption des imbéciles afin de les faire éclater au grand jour.
Journiac de Saint-Méard* fut le premier président de l'illustre compagnie des Gobe-Mouches créée dans les premières années du règne de Louis XVI. Les réunions avaient lieu le mercredi dans un endroit qui portait le nom de ruche chez le libraire Desenne au Palais-Royal (vis à vis le café de Valois). Ils eurent (entre-autres) pour tête de turc le charlatan Mesmer, l'homme au baquet. Une correspondance facécieuse fut entamée et aussitôt publiée en brochures :
"Correspondance de .M. M... sur les nouvelles du baquet octogone, de l'homme baquet et du baquet moral, recueillie et publiée par MM. de F...( Toussaint-Joseph-André comte de Fortia de Piles) S...(Journiac de Saint-Méard) et B. (Pierre-Louis-Marie de Boisgelin de Kerdru)
Caillot-Duval
Boisgelin et Piles se servirent vers 1785, ensuite d'un personnage sorti de leur imagination, baptisé par leurs soins : Caillot-Duval. Un commissaire de police nommé Urlon, servit de première victime au projet de nos compères. Dans une missive envoyée au commissaire Caillot-Duval déplorait l'enlèvement de sa fille par un enseigne de hussard...Il lui demande d'effectuer des recherches pour la retrouver. Le commissaire ne fut pas dupe, compte tenu des détails bouffons, il répondit cependant au faux-plaignant dans une lettre humoristique. Puis, ce fut une victime facile, un procureur d'Abbeville nommé Lecat qui inondait de ses poèmes "Le Journal littéraire" de Nancy, fut encouragé par nos deux farceurs. Ils firent intervenir un prince Russe nommé Kabardinski, prince Botanipet, commandant une division composée de Pastervipèdes, Frisecarpètes, et Simocupètes !!!.
Soudié, le bottier du roi de la rue Dauphine reçut une commande de Caillot-Duval, pour la confection de bottes sans couture, "comme un maître-ouvrier de Nancy venant d'en faire une paire qui fait l'admiration de la contrée". Le vaniteux cordonnier déclara la chose possible, mais refusa la commande sous le prétexte qu'il est très occupé.
L'entremetteuse dame de Launay de la rue Croix-des-Petits-Champs, accepta l'offre de lancer parmi les entreteneurs de Paris, deux nièces de Caillot-Duval.
Ils écrivirent plusieur centaines de lettres qui furent publiées en 1795, sous le nom de Caillot-Duval. Piles fit circuler le bruit que son adversaire Grimod de la Reynière, organisateur des "Déjeuners des Mystificateurs", en était l'auteur.
Caillot-Duval était devenu l'épouvantail des sots et des niais. Tout le monde tremblait de tomber sur lui. Les victimes se gardèrent bien de se plaindre et de réclamer leurs lettres.
Les gobe-mouches et Caillot-Duval disparurent pendant la révolution. Caillot-Duval d'après la Société des auteurs lorrains, fut atteint mortellement à la cuisse par une balle, lors des émeutes de Nancy et confia à un certain Michel, ses lettres, avec pour mission de les publier...
Une autre Société des Gobe-Mouches revit le jour en 1802, mais, c'est une autre histoire.
Gobemouche Léonard, pseudonyme de Willemain d’Arancourt Barthélémy charles Graillard de Graville : journaliste né à Paris 1727, en 1764. « L’Ami des filles, 1761-1772" in-12.
"Entendons-nous, ouvrage de monsieur Gobe-mouches aux boulevard 1760". Et sous le pseudo de Thibault de Pierrefitte : "Le journal villageois".
"Les douceurs de la vie, ou les petites félicités qui s'y rencontrent à tout moment, pour servir de consolations aux misères et tribulations du docteur Béresfort, par A.D".
*Ancien capitaine au régiment de Roi-Infanterie.