Alors que la coupe du monde de foot se termine, le tour de France cycliste prend le relais...
Comme l'a écrit le poète Benjamin Péret, "Je ne mange pas de ce pain-là" !
P
Que nos oreilles soient des lampions ou des poissons crevés nous courons
Les pédales s’usent comme des cors de chasse et nous courons
Les boyaux crèvent comme des mouches et nous courons
Les guidons se dressent comme des parapluies et nous courons
Les rayons se multiplient comme des lapins et nous courons
C’est que la France s’étale comme un étron céleste
et nous courons tout autour pour chasser les mouches
Bayonne Marseille Strasbourg ne sont que des crapauds crevés
d’où s’exhale une puanteur sacrée que dissipe notre passage
Les pieds des uns garnissent les salades
et les yeux des autres la pointe des seins de leur maîtresse
et l’on part
L’édredon de la nuit s’est assis sur la selle
et les puces voltigent tout autour comme des poissons dans l’aquarium de leur tête
Les bornes kilométriques leur lancent des flèches de curare
et les poteaux indicateurs sont des ours
qui croissent à tort et à travers comme des flics
Ah si les rayons étaient des jets d’eau
chacun figurerait le bassin des Tuileries
ou la double bosse du chameau
Mais voici que dieu a craché sur la route
et traînant sa sottise comme un parapluie
a tracé des ornières jonchées de crucifix
Malheur au coureur imprudent qui s’y engage comme un cheval sous un tunnel
Jésus sort de sa croix et plante son coeur dans les boyaux de la bécane
on entend un bénissez nous seigneur
et il tombe comme une souris dans l’huile du mat
et les mille bénédictions de la bouse de vache ne le jauniront plus.