Par Bernard Vassor
Ce frontispice représente Chenon, le commissaire de pôlice du Châtelet, qui contôle l'arrestation d'un prêtre. C'est ce même homme qui transféra sans ménagement le marquis de Sade, de la Bastille à Charenton. L'avertissement de ce livre paru anonymement (certains l'attribuent à Andréa de Nerciatt) indique :
"Comme on sait que les registres de la police de Paris étoient déposés à la Bastille, après avoir resté un certain temps à l'hôtel du lieutenant de police, on ne sera pas surpris que cette liste soit tirée de papiers trouvés dans cet antre infernal, qui ne sembloit destiné qu'à engloutir les malheureuses victimes du despotisme."* La longue liste donne les noms de ministres du culte surpris dans des situations singulières. Un petit inconvénient, ces rapports de police ne sont pas datés, et donc laissent penser que les évènement décrit précèdaient de peu la révolution, ce qui est faux. Certains de ces documents datant de la moitié du dix-huitième.
Le but de ce livre étant de faire droit des prêtres au mariage, pour qu'ils profitent :"du plaisir si doux de satisfaire un besoin naturel"
L'intérêt de cet ouvrage est de mentionner les maisons closes de Paris, les noms des mitronnes (matrones), filles d'amour, appareilleuses et autres "Ambulantes à la brune". Le vocabulaire de ce siècle était savoureux, et ne s'embarrassait pas de litotes. Nous pouvons lire sous la plume d'inspecteurs** :
"G. Pavie, prêtre habitué à S. Eustache trouvé rue Pavée S. Sauveur, chez la nommée Aubert, avecMarie-Anne Maurice, qu'il a conu charnellement deux fois jusqu'à la copulation (...) J.B. Gaillard, chanoine dominicain de la Victoire-les-Senlis, trouvé rue Thévenot chez la femme Lefèvre, avec Marguerite Hubert, qui l'a manualisé jusqu'à la pollution. (...)A. Montbrun de S. Sauveur, sous diacre du diocèse de Lissac, trouvé rue S. Honoré chez la Christine Defoy, qui l'a manualisé en présence de Marie de Varenne, sans être parvenu à la pollution (...) C. Legrand de Lescarmoutier, prêtre trouvé rue Basse-S. Denis trouvé avec la femme Rose Boursier, qu'il a vue charnellement, laquelle l' fouetté pour son plus grand plaisir (..)
J. Jolibert, prêtre desservant au château de Bicètre, trouvé déculotté dans une aallée, rue Guénégaud avec une femme sans domicile connu (..) F. M. S. de Tascher de la Pagerie***, prêtre, chanoine de Blois, trouvé rue Montorgueil chez Christine Barque en compagnie de la nommée Rosinberguerine, qu'il a vue deux fois charnellement jusqu'à la copulation parfaite".
*Ces archives de la Bastille, sont aujourd'hui conservée à la bibliothèque de L'Arsenal.
.. Dont le commissaire au Châtelet Hubert Mutel, et le célèbre second du lieutenant de police Louis Marais.
***François-Marie-Stanislas Tascher de la Pagerie né en 1729, chanoine de Blois, puis, aumônier de la dauphine, enfin vicaire général de Macon