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Rihanna, le mainstream et moi

Publié le 19 novembre 2009 par Luxyukiiste
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Mon avis sur la musique populaire a évolué depuis que je suis à peu près conscient de ce que j’écoute. Passant d’une écoute radiophonique complètement mainstream au monde plus radical du rap underground, j’ai commencé à faire dans la rebellion de comptoir entre la fin du collège et le lycée contre la prostitution musicale et les grandes maisons de disque. Et puis, petit à petit, à côté de genre de plus en plus underground comme la noise ou le dark ambient, je me disais aussi de plus en plus que je pouvais prendre mon pied sur Britney Spears et Avril Lavigne si j’en avais envie. Depuis, je suis avec attention l’actualité musicale des deux chanteuses que je viens de citer ainsi que de Miley Cyrus, Kat DeLuna, Lady GaGa, Justin Timberlake, Yelle et d’autres, comme Rihanna dont le nouvel album va bientôt sortir. Malgré les réactions parfois attendues de certaines personnes, ces goûts inhabituels dans les milieux alternos divers ont fini par être vus comme une sorte de running gag particulier que j’entretiens avec satisfaction pour embêter le monde. Parfois, on capte même d’autres gens en flagrant délit d’amour pour le dernier hit sorti. Alors, aimer la musique calibrée, un coming out ? Petite histoire autobiographique.

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A la sortie du single Umbrella, issu de l’album Good Girl Gone Bad, le clip tournait régulièrement sur les chaînes musicales et ma meilleure amie m’avait entretenu de son goût pour cette vidéo et pour la chanson. Pas tellement motivé mais quand même curieux, je suis allé me faire mon propre avis : conquis par cette vidéo très classe, j’ai écouté l’album, au moment ou Don’t stop the music commençait à se faire entendre en boucle. J’ai beaucoup apprécié : Good Girl Gone Bad n’est pas un album marketé sur deux tubes qui bourre le reste avec des titres de remplissage. C’est simple, mis à part Say it que je trouve un peu faible, il n’y a rien à jeter, même le duo avec Ne-Yo que je n’avais pas très bien accueilli au début a fini par me convaincre. De plus, il y a une vraie variété, en témoigne Shut up and drive et son sample de guitares fort agréable pour les metalleux comme moi. A la fin, j’étais stupéfait de tomber sur un morceau carrément hypnotisant, Question Existing, lancinant et envoûtant, carrément sensuel, et encore plus quand on voit comment Rihanna l’interprète dans le DVD live à Manchester. J’ai d’ailleurs été assez surpris par ses tenues live, tout en noir sexy et classe, le bon côté de la fidélité de ces artistes au monde de la mode. Bref, carton plein, et un nouveau fan parmi les millions déjà existants. La question qu’on peut se poser, c’est « qu’est-ce que Rihanna a fait sur son album, à part chanter ? ». En quelques clics, on peut vite connaître l’histoire du morceau Umbrella : prévu pour Britney Spears, puis proposé à Mary J. Blige, il échoue finalement à Rihanna (et c’est pas plus mal). L’artiste dont le nom est sur la pochette se contente de chanter et d’interpréter. Il suffit de savoir à quel produit on a affaire pour apprécier le résultat sans se poser de questions.

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Né à la fin des années 80, je découvre la musique pendant les années 90, années de l’eurodance et des boys band, une bien triste époque pour le mainstream radiophonique. Pour moi, le fait que les interprètes soient également auteurs n’avait rien d’évident. Les songwriters étaient d’obscures personnes bloquées dans des studios qui étudiaient le marché avant de pondre une rythmique. Les Worlds Apart, 2b3, Alliage & co. représentaient le pire de la chiasse commerciale jamais enfantée par l’homme. Ce n’est que plus tard que je découvrais des groupes ou artistes solo qui écrivaient leur propre musique, avec plus ou moins de promo et de logistique autour. En bouffant du M6 et du Hit Machine, pas forcément évident de savoir qu’il existe quelque chose à côté. C’est ensuite que la différence se fait : soit on reste à la surface des choses, soit on approfondit. En arrivant sur Skyrock, pourtant en pleine prostitution du rap, j’ai découvert des pionniers comme IAM, NTM, et, de fil en aiguille et à l’aide de la presse, Assassin, La Rumeur, La Caution… Des groupes pour qui l’authenticité va plus loin que les mots et impose une ligne de conduite. Quand La Rumeur disait à Skyrock d’aller niquer sa mère, je laissais tomber l’overground pour découvrir le rock, le métal et les musiques sombres. Avec certains groupes, pas facile d’avoir des infos : aidé certes par D-Side et Elegy, je traîne beaucoup sur le net pour capter des noms et les découvrir. Des poulains de Cold Meat Industry (Arcana, Raison d’Etre, Brighter Death Now), en passant par la dark folk (Death in June, Current 93, Ordo Rosarius Equilibrio) et les origines de l’indus (The Swans, Coil, SPK), mes oreilles découvrent des sons inconnus, exigeants et éprouvants. C’est là que le caractère éminemment cyclique des goûts musicaux s’est manifesté. Après nombre d’écoutes appréciables mais un peu pesantes, il me fallait retrouver la simplicité et la fraicheur de chansons légères.

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Quand Britney Spears revient avec la tornade Toxic, je décide de jeter une oreille à l’album In the zone. La teen-star du club Mickey ayant bien grandi, c’est sa voix sensuelle et ses rires séducteurs qui ont touchés mon petit coeur qu’on aurait pu croire endurci par les décharges noise ambient citées plus haut. Petit à petit, je me suis rendu compte qu’un coeur de midinette battait quelque part en moi, celui qui me fait apprécier les histoires lycéennes à la Virgin Suicides, les poèmes à deux francs tu m’aimes/il m’aime/tu me manques, tant qu’ils sont mis en musique par une jeune et jolie chanteuse sur une musique supportable. Bon, certes, avec Britney et I’m a slave 4 U, l’innocence est un peu passée, mais c’est l’idée. Albums de producteurs, voix retapées en studio ? Peut-être, tant que je sais ce que je suis venu chercher et que je suis satisfait, je ne me plains pas. A chaque monde ses exigences. Il y a une authenticité que je recherche et que je valorise dans certains milieux qui m’est égale dans d’autres. Il y a des tubes qui donnent simplement la pêche à tous moments de la journée et on ne peut pas en vouloir aux producteurs d’avoir le talent pour les réussir. Ensuite, pour celles qui doivent les porter sur leurs épaules, la vie n’est pas la même et quand on sort juste de l’adolescence, ce n’est pas évident et je n’ai pas très envie de connaître ça. On peut parler longtemps de la célébrité mais en attendant, on peut aussi ouvrir les yeux sur les jolis morceaux qui nous tendent les bras. Dernièrement, le dernier single de Britney, 3, est sorti et à l’écoute, j’ai été frappé par cette voix inhumaine et hâchée, comme j’en avais rarement entendues, dans ce genre de chansons en tous cas. Le morceau étant sympa et entraînant, ça ne m’a pas gêné, je vais voir le clip pour l’écouter et je la mets dans mon baladeur pour marcher en rythme, je ne paye pas pour un faux live et sa vie m’indiffère. Dans le cinéma comme dans la musique, je ne met pas de limite à mes goûts : seule la qualité et/ou le fun m’intéressent. Il y a toujours des limites : faut pas déconner. Ce dont je parle, ce serait plutôt de principes restrictifs, comme « je ne touche pas au mainstream, mon éthique me l’interdit », ou « les films catastrophes Hollywoodiens, c’est quand même la lie du cinéma ». Comme je le disais au début, mes 15 ans étant passés, je peux quitter cette posture rebelle et écouter mon plaisir.

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Lundi, Rihanna tenait un mini-concert à Londres en partenariat avec Nokia pour préparer la sortie de l’album Rated R. Le show était retransmis en streaming sur le net. Le protecteur Jay-Z était là pour poser ses couplets sur Umbrella et Run this town. Du côté de Rihanna, sa voix partait parfois un peu en live sur les premiers morceaux, ça allait mieux sur les plus calmes… Reste que des chansons du nouvel album jouées ce soir-là, je préfère toujours Wait your turn et Hard même si j’aime bien Russian Roulette que je trouve assez émouvante, surtout depuis la sortie de son clip bien sombre pour ce style. A l’heure qu’il est, l’album est déjà en circulation sur les autoroutes de l’information et les avis vont donc commencer à fuser. Théoriquement, l’album est censé être plus sérieux, certainement suite à la mauvaise expérience de la jeune femme avec son ex-compagnon Chris Brown qui cherchait quelqu’un sur qui passer ses nerfs. En tous cas, le style qu’elle arbore dans les clips et les visuels des disques la montre plus forte et en même temps souffrante, en tous cas, ni joueuse ni souriante. Heureusement que Hard vient mettre un peu de rythme dans tout ça, sans pour autant nous faire retrouver ce sentiment positif qui émanait d’Umbrella. On va faire comme Rihanna sur cette photo : on va prier, car la musique de masse peut faire vivre de beaux rêves mais aussi vous plonger dans l’oubli plus vite que vous n’êtes arrivé à la gloire. De mauvais choix, au mauvais moment, et c’est la chute inexorable. Et je trouverai ça dommage. J’aime les morceaux et la voix de Rihanna, ainsi que son attitude qui refuse la vulgarité sachant qu’il est facile d’y tomber quand on est belle et sexy et qu’on vient du r’n'b. Certes, si elle disparaît du devant de la scène, elle doit quand même pouvoir couleur des jours paisibles pendant quelques temps. Ce serait quand même pas juste.

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A côté de cette actualité, j’attends aussi la réédition de l’album de Lady GaGa, The Fame Monster, augmenté de huit morceaux dont le déjà excellent Bad Romance et son clip complètement fou. J’écoute aussi avec plaisir le single du dernier EP de Miley Cyrus (alias Hannah Montana), Party in the USA, entraînant, fun, qui m’a fait parier sur le temps qu’il lui reste avant de finir à moitié à poil : en effet, ses déhanchés lascifs m’ont poussé à croire qu’à l’instar de Britney, qui nous parlait d’abstinence jusqu’au mariage quand elle était encore pure, Miley a déjà balancé sa promise ring de fille modèle depuis longtemps et que ses producteurs cherchent un moyen plus efficace de palper les sous. Je ne vais pas dire que je m’en plains, mais quand même, elle a 16 ans, c’est un peu gênant. Pour rester sur les ados (19 ans cette fois), j’ai aussi bien rêvé sur la chanson You belong with me de Taylor Swift, véritable pot-pourri de tous les teen movies du monde en quatre minutes chrono, avec la fille discrète et intéressante, la cheerleader bonne mais capricieuse, l’équipe de football, le bal de l’école… Du concentré de guimauve qui touche forcément les coeurs faibles comme le mien. C’est ça aussi, le mainstream : des choses simples qui parlent à tout le monde, sans recherche particulière, au détriment de la richesse mais à l’avantage de l’universalité. Et quand on passe son temps à écouter d’autres choses que monsieur tout le monde, c’est aussi agréable de s’amuser à faire comme les autres.


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