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Contentieux du DALO et astreinte de la loi “Boutin” (CE, avis, 2 juillet 2010, M. Abdelkrim A.; CE 18 juin 2010, Mme Belkadi)

Publié le 08 juillet 2010 par Combatsdh

Non contrariété aux articles 6-1 et 13 de la CEDH du versement de l’astreinte à un fond étatique et de la limitation légale de son montantet absence de renvoi d’une QPC

par Serge SLAMA

Dans une demande d’avis sur une question de droit émanant du TA de Paris, qui traite une grande partie du contentieux du droit au logement opposable (« DALO »), le Conseil d’Etat était amené à déterminer si le versement de l’astreinte, non pas aux requérants, mais à un fond étatique est compatible avec le droit à un recours effectif garanti par l’article 6-1 et 13 de la CEDH et si le juge peut faire abstraction de la limitation du montant de l’astreinte par l’article 76  de loi « MOLLE » du 25 mars 2009 au regard tant du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs que des droits des demandeurs garantis par les mêmes stipulations conventionnelles.

En l’espèce, le 26 août 2008, la commission de médiation de Paris a reconnu le caractère prioritaire et urgent de la demande de logement du requérant conformément à l’article L. 300-1 du code de la construction et de l’habitation. En l’absence de relogement dans les 6 mois, il a demandé au TA de Paris, en application de l’article L. 441-2-3-1 CCH, d’ordonner son relogement en assortissant cette injonction d’une astreinte. Sur le fondement de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, le TA a soumis au Conseil d’Etat une série de 5 questions portant sur le mode de détermination de l’astreinte.

S’agissant de la compatibilité avec le droit à un recours effectif du mécanisme contentieux du « DALO », le Conseil d’Etat reconnaît d’abord l’applicabilité de l’article 6-1 de la CEDH car les litiges relatifs au droit d’accès à un logement décent et indépendant « ressortissent à la matière civile ». Il rejette néanmoins l’atteinte à ces stipulations - et estime qu’il n’y a pas lieu de rechercher si ce contentieux est au nombre de ceux auxquels renvoie l’article 13 de la CEDH - dans la mesure où les dispositions légales « ouvrent aux justiciables qu’elles visent le droit d’accéder à un tribunal doté de pouvoirs effectifs ». On notera néanmoins qu’il relève non seulement que le mécanisme légal ouvre pour les demandeurs éligibles au DALO un recours contentieux « qui peut conduire le juge à ordonner leur logement, leur relogement ou leur hébergement, et à assortir cette injonction d’une astreinte » mais aussi que la décision de la commission de médiation « est susceptible d’un recours de droit commun devant le juge administratif » et enfin, que « l’inaction de l’Etat est susceptible d’être sanctionnée, le cas échéant, par le juge saisi d’un recours en responsabilité » (les premières demandes indemnitaires ont été récemment introduites devant le TA de Paris suite à la liquidation des 500 premières astreintes). Quant à l’astreinte, le Conseil d’Etat note aussi que, « sans préjudice de ces autres voies de recours », le recours spécifique ouvert aux demandeurs présente « un caractère effectif » devant un juge doté d’un pouvoir d’injonction et d’astreinte « de nature à surmonter les éventuels obstacles à l’exécution de ses décisions ». Peu importe que l'’astreinte qui serait prononcée soit versée non au requérant mais à un fonds d’aménagement urbain régional « dépendant de l’Etat, dont les moyens ne sont pas exclusivement employés à la construction de logements sociaux ».

Regroupant les autres questions, le Conseil d’Etat estime qu’il résulte des dispositions de l’article L. 441-2-3-1 du CCH « éclairés par les travaux préparatoires à la loi du 25 mars 2009 » que le législateur « n’a pas entendu limiter le montant de cette astreinte au montant du loyer moyen de ce logement, mais permettre qu’elle soit modulée, selon les circonstances de l’espèce, en fonction de ce montant, calculé sur la même période que l’astreinte ». Il précise que l’astreinte peut être « un multiple du montant de ce loyer moyen » dès lors que le juge ne s’écarte pas « de façon disproportionnée » de cette référence, ce qui serait le cas d’une astreinte dont le montant serait égal au coût de la construction d’un logement social (comme le faisait jusqu’ici le TA de Paris). Le Conseil d’Etat précise aussi que cette dernière référence « vaut pour la ville de Paris » alors que le législateur a entendu « définir une règle homogène applicable sur l’ensemble du territoire ».

Suivant la méthode du faisceau d’indices, le Conseil d’Etat indique les critères permettant de moduler l’astreinte. Dans une appréciation in concreto, le juge peut prendre en compte d’autres critères que le montant du loyer moyen adapté aux besoins du demandeur, comme « notamment à la taille de la famille, à la vulnérabilité particulière du demandeur, à la célérité et aux diligences de l’Etat, tant lors de la fixation de l’astreinte que lors de sa liquidation et, le cas échéant, de la fixation d’une nouvelle astreinte pour la période ultérieure ».

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Dépôt de dossiers pour le «droit opposable au logement» S. ORTOLA / 20 MINUTES

CE, avis, 2 juillet 2010, M. Abdelkrim A.,332825, au recueil Lebon

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Le Conseil a par ailleurs estimé qu’il n’y a pas lieu à renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité transmise par le même TA sur les mêmes dispositions des cinquième, sixième et septième alinéas du II de l’article L. 441-2-3-1 du CCH. Sont dépourvus de caractère sérieux, pour le Conseil d’Etat, d’une part l’atteinte au principe d’égalité en raison du mode détermination du montant de l’astreinte « identique sur tout le territoire » dès lors que les personnes engageant un contentieux « DALO » se trouvent « dans une situation différente de celle des personnes introduisant un recours de droit commun » ; d’autre part, les critères de détermination de l’astreinte ne portent atteinte ni à l’indépendance des juridictions, ni au droit à un recours effectif et à un procès équitable, ni au droit de propriété dans la mesure où l’astreinte est dépourvue de caractère indemnitaire et enfin, en tout état de cause, il n’y saurait y avoir d’atteinte au droit au logement ou au droit de résister à l’oppression

CE 18 juin 2010, Mme Belkadi, n° 339175 et Mme Cissé, n°337910

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Actualités droits-libertés du 7 juillet 2010 (2) par Serge SLAMA

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