Si l’UMP souhaite refaire un lipdub pour cet été le refrain pourrait être le suivant :”Si je suis au plus bas, c’est la faute aux médias, si j’ai du plomb dans l’aile, c’est la faute à Plenel”.
On peut rire de tout mais pas avec tout le monde avait dit un jour Pierre Desproges en référence à Jean-Marie Le Pen. Les éléments de langage servis en boucle par les nervis de l’exécutif sont tellement excessifs qu’ils pourraient prêter à sourire mais, la violence et la bêtise avec laquelle ils sont servis contribuent surtout à finir de dégrader l’image de l’exécutif.
“Méthodes fascistes de sites internet“, “méthodes des années 30“, “collusion politico-médiatico-trotskyste” en allusion au passé politique d’Edwy Plenel …la droite gouvernementale tente de renverser la vapeur en jetant l’opprobre sur la presse internet.
Dès mardi soir, Xavier Bertrand a délibérément ciblé Mediapart dans ses attaques : “Quand certains médias, notamment un site qui utilise des méthodes fascistes à partir d’écoutes qui sont totalement illégales (…) mais dans quel monde on est, dans quel monde on est!” Morano de comptoir. Dans la course des ministres à reprendre les consignes de l’Elysée, la secrétaire d’Etat à la Famille figure une nouvelle fois parmi les meilleurs élèves. Sur le plateau du 19/20 de France 3, l’ancienne député de Meurthe et Moselle a estimé qu’on avait “dépassé les bornes” et qualifié Médiapart de “site de ragots, de déclarations anonymes“. A la sortie de Matignon où se déroulait une réunion de briefing pour une partie de son gouvernement et des parlementaires de la majorité, ele a récidivé et tenté l’amalgame avec la tragédie de Pierre Bérégovoy : “J’en appelle à votre vigilance. Un jour, cela peut vous arriver d’avoir votre honneur jeté aux chiens”.
Dieu merci le ridicule ne tue pas sinon Frédéric Lefebvre ne serait plus de ce monde. Le porte-flingue de l’UMP s’illustre par une tribune publiée dans France Soir au titre évocateur “J’accuse“. C’est oublier que n’est pas Zola qui veut.
Le Syndicat national des journalistes (SNJ)-CGT voit dans cette tentative d’établir un contre-feu, une “véritable attaque en règle contre la profession“. “La profession n’a pas besoin que la ministre d’un gouvernement et un président de la République aux abois, emmêlés dans les affaires de fric roi, viennent nous donner des leçons” estime le syndicat dans un communiqué. “Au-delà de sa haine pour les journalistes faisant leur métier d’investigation et ne se contentant pas de relayer la communication gouvernementale ou sarkoziste, comment une ministre peut-elle mentir à ce point?”. “Oui Mediapart est un site d’information ; oui ses journalistes sont titulaires de la carte d’identité des journalistes professionnels ; oui ils ont vérifié leurs sources, recoupé les propos tenus par l’ex-comptable de Lilianne Bettencourt en se basant sur les livres de compte, comme le précisait dans le reportage qui précédait l’interview le journaliste de Médiapart Fabrice Lhomme“.
La colère du SNJ est à la hauteur du soutien apporté par les rédactions à Médiapart. “On accuse le messager” estime François Malye journaliste au Point et président du Forum des SDJ (sociétés de journalistes). “Le site Mediapart fait bien son travail. Il s’agit d’un site dirigé par des journalistes chevronnés qui ont déjà fait des révélations. C’est absurde” complète Sylvain Courage, président de la Société des rédacteurs du Nouvel Observateur qui voit dans la manœuvre une volonté de l’UMP de développer un sentiment anti-internet.
Le Figaro n’est pas en reste. “Je trouve cela dangereux de manipuler des références à d’autres périodes de l’histoire autrement plus difficiles. Cela me semble extrêmement déplacé“,considère Stéphane Durand-Souffland, président de la Société des rédacteurs de ce grand quotidien classé à droite.
L’affaire a pris une tournure judiciaire. Edwy Plenel, directeur de la publication de Mediapart, a annoncé, sur France Info, qu’il allait déposer plainte pour le qualificatif “méthodes fascistes” employé par Xavier Bertrand.
Dans un communiqué, les avocats du site d’information rappellent “que par ordonnances en date du 1erjuillet 2010, le Tribunal de Grande Instance de Paris a rejeté les demandes faites par Madame Liliane Bettencourt et Monsieur Patrice de Maistre de censurer les enregistrements reproduits par Mediapart et commentés par sa rédaction aux motifs que leur sélection, qui excluait toute atteinte à l’intimité de la vie privée des personnes, ne répondait qu’au but légitime d’informer. Depuis, la révélation de certains contenus d’enregistrements au demeurant, non réalisés par Mediapart, établit définitivement le caractère public et édifiant des informations retransmises. Les éléments d’enquête postérieurs relèvent de la pure investigation journalistique sans qu’il puisse être reproché d’avoir manqué à la déontologie“.
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