Etat chronique de poésie 939

Publié le 08 juillet 2010 par Xavierlaine081

939

L’homme promène son indifférence sur des avenues qui lui tendent miroir.

Quoi, on ne se satisfait point de ce réel qui crie sa faim, il faut qu’on pérore en des mondes virtuels.

On n’a qu’état généraux à la bouche et chacun y va de son couplet en courbant l’échine.

Le tout n’est point de donner signe de viemais de livrer son fac-similé.

Pendant que Badinguet déambule, on s’assoit sur les valeurs fondatrices. On nie tout ce que, patiemment des Hommes ont pu construire, au péril de leur vie.

Et, ignorante des bases mêmes de notre vie commune, l’immense majorité vaque en vaines tâches ou se vautre en infinies compromissions.

Car on craint, bien sûr, comme on craignait hier.

Tout l’art serait de ne plus rien dire, de ne plus affirmer la moindre conviction contraire.

Tout l’art est de faire comme tout le monde, de ne pas dénoter dans un univers plat, inodore, incolore et insipide.

On se roule dans la boue pour la plus grande réjouissance des puissants, comme hier on dénonçait son voisin pour ne pas sortir du rang de la conformité.

Une poignée de résistants et de résistantes pourtant tient tête que les médias, rangés aux ordres, négligent.

Loin de se cogner contre les murs, ils creusent le sillon où la graine sera prête à germer, sous un soleil réconfortant, lorsque l’heure sera venue. Sa vigueur l’aidera à triompher de l’ivraie.

Ces semeurs d’espérance font parfois cercle de silence, ouvrent des vitrines de rencontre, se retrouvent sous les platanes pour d’autres agapes que celles, misérables où la majorité se congratule.

Une seule chose manque : la force de se reconnaître.

Face à l’aplomb méprisant des forces financières, parfois, la confiance se trouve ébranlée.

Et, comme le propre du résistant ne réside pas dans ses certitudes, mais dans sa soif de justice, la conviction parfois manque, et la fange prend le dessus.

Il en est tant qui en bouffent, de cette pourriture, ignorant, pour certains d’entre eux, qu’ils œuvrent à leur propre meurtre.

Combien sont-ils, hommes et femmes debout, à attendre que leur heure vienne ?

Combien sont-ils à pleurer dans leur sommeil devant le tableau sordide que des chaînes, qui n’ont jamais si bien porté leur nom, dressent, juste avant de plonger dans un sommeil qui n’a plus rien de réparateur ?

Alors, avec la résignation de la patience, ils attendent leur heure.

Et celle là n’aura aucun aspect de vengeance ou de rancune, non, car leur doute les pousse à comprendre, non pour excuser, mais demeurer dans cette nature humaine encore à inventer.

Lorsque l’heure sera venue de nous réveiller, ils seront là, si proches, pour inventer les mains tendues capables de sortir de l’ornière les compromis d’hier.

Il ne faudra pas s’étonner, cependant, la nature humaine étant ce qu’elle est, de quelques débordements, tant le couvercle aura pesé lourd aux épaules de faiblesse.

*

Inventer les formes de nos reconnaissances

Sans larmes ni trompettes

Sentir les mains qui se tendent

Sous nos yeux qui ne savent pas toujours voir

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Manosque, 26 mai 2010

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