Le mur

Publié le 06 juillet 2010 par Politicoblogue

Pauline Marois et Martine Ouellet

D’abord, félicitons la machine péquiste qui a réussi à faire voter une majorité d’électeurs en faveur de la candidate du SPQ-Libre.

Mettons aussi un gros bémol sur les propos de Pauline Marois qui parle d’une grande victoire du Pq dans Vachon. Non, madame, avec un taux de participation de moins de 26 30%, il ne saurait s’agir d’une grande victoire. La modération a bien meilleur goût. Et un autre bémol encore plus gros sur les propos de sa candidate radicale qui déclare : « Il est temps que le Québec devienne un pays. » Même le photographe du Pq en est tombé à la renverse

Je souligne la contre-performance de Simon-Pierre Diamond qui termine avec le plus bas résultat du PLQ dans cette circonscription électorale. À sa défense, disons qu’il se battait bien plus contre son nouveau chef que ses adversaires. Une leçon d’humilité pour SPD!

Le taux de participation anémique fera date et permettra à tout un chacun de se laver les mains du faible résultat qu’il a obtenu.

Je signale tout de même que dans le contexte d’une élection partielle, les qualités personnelles des candidats n’ont rien à voir avec les résultats, c’est essentiellement une histoire de machine électorale et d’image des formations politiques.

Frapper le mur de plein fouet dans Vachon

Ce soir, le candidat adéquiste a réussi de peines et de misères à devancer par quelques votes celui de Québec solidaire, obtenant, au moment d’écrire ces lignes, (6,66 6,61% marque finale) un résultat moindre qu’à l’élection générale de décembre 2008 dans cette circonscription (13,67% ,une perte de 6,67% des votes), moindre que celui qu’il avait lui-même obtenu dans la circonscription de Laporte où il était le candidat de l’ADQ en décembre 2008 (9,44%). En fait, dans l’histoire de la circonscription de Vachon et de la présence d’une candidature adéquiste, c’est le pire résultat.

Pas surprenant qu’avant même la mi-campagne, la stratégie adéquiste consistait à minimiser ce vote pour mieux en banaliser les implications pour l’avenir du parti. Il faut rappeler que l’ADQ a presque remporté le siège de Vachon en 2007, raté par seulement 227 votes.

Concrètement, ce résultat prive l’ADQ du remboursement de la moitié des dépenses électorales de cette campagne qui n’aura probablement pas coûté plus de 9 500 $, soit le même montant que lors de l’élection partielle dans la circonscription de Rousseau. Chose certaine, ils n’ont pas exagéré la facture de graphisme… De toute manière, ce remboursement dérisoire n’aurait eu aucun impact significatif sur le déficit de près de 800 000 $ que traîne encore l’ADQ selon le dernier rapport du DGEQ.

Le rapport financier de 2009, tout désastreux est-il, n’est rien en comparaison de celui de l’an prochain où l’impact du non-renouvellement des cartes de membre de la course à la chefferie se fera sentir.

Est-ce la fin de l’ADQ?

D’aucuns seraient tentés d’annoncer la mort de l’ex-parti de Mario Dumont, ils sont en retard puisque l’ADQ fondé par Jean Allaire et Mario Dumont est déjà mort. Mais dans les faits, l’ADQ demeurera dans le paysage politique au moins jusqu’au prochain scrutin.

Ce parti est devenu tout ce qu’il dénonçait :

Une formation politique qui s’est transformée en chapelle dogmatique en dehors de la quelle, point de salut. Il faut relire mon ami Éric Duhaime, concernant l’excommunication des deux députés indépendants, Éric Caire et Marc Picard, pour s’en convaincre. Son propos se résume ainsi : les carottes sont cuites si vous ne confessez pas vos péchés et ne revenez pas communier à l’autel adéquiste avant la fin de la session parlementaire!

On comprend maintenant que les fameuses carottes ont été produites par un agriculteur qui vit sous le joug du monopole syndical de l’UPA, financé à tour de bras par la Financière agricole, que défend maintenant le chef désigné de l’ADQ. Quel beau virage à 180 degrés, l’ADQ qui défend la machine à subvention! L’ADQ de Gérard Deltell n’est pas à sa première contradiction, le parti a quand même appuyé à deux reprises une motion péquiste visant à imposer le programme de CPE « un enfant, une place » et sa facture de 1 milliard 600 millions $ aux contribuables. L’ADQ de Deltell a aussi chanté les louanges de la Révolution tranquille, qui l’eut cru! Jean Charest doit rager que le mot « girouette » ne soit plus « parlementaire »…

Une formation politique qui vit aux crochets de l’État qui va continuer a vivoter grâce à la contribution de l’État à son financement (39 217,12 $/mois) ce qui permet à peine à maintenir le strict minimum d’employés au secrétariat national de Montréal. Évidemment, l’ADQ ne jouit pas ici d’un privilège, toutes formations politiques qui reçoivent des votes ont droit à une allocation correspondant au pourcentage de votes reçu lors du scrutin général. Là où le bât blesse, c’est quand cette allocation devient pratiquement le seul revenu, cela indique qu’il n’existe aucune base solide pour cette formation politique. L’ADQ compte actuellement moins de 5 000 membres en règle, en 2007 elle en avait un peu plus de 12 000.

De plus, et ce n’est pas négligeable, son statut de deuxième groupe d’opposition ne peut être remis en question pour la durée de la présente législature (cabinets de chef et de leader, service de recherche). Même avec une baisse de son budget de recherche, l’Aile parlementaire adéquiste compte une dizaine d’employés pour quatre députés. On comprend mieux pourquoi le chef désigné s’est empressé de s’engager à maintenir en vie le gouvernement de Jean Charest. Toutefois, il a beau dire qu’il est prêt pas à peu près pour un scrutin, force est de constater que c’est du vent, le but réel de cette déclaration était de rassurer les troupes.

Une option valable?

C’est du point de vue strictement politique que l’avenir adéquiste est chose du passé. Comment ce parti peut-il à justifier son existence, alors même que les électeurs ne suivent plus? Le dernier sondage Léger Marketing, pour le compte des journaux Le Devoir et The Gazette, ne le crédite plus que de 14% d’appuis chez les francophones grâce essentiellement à la grande région de Québec, quant aux intentions de vote à la grandeur du Québec, ils stagnent autour de 13%, après répartition des indécis.

À part la grande région de Québec, dans tout le Québec l’ADQ est complètement laminé. Quand on demande aux Québécois qui ferait le meilleur premier ministre, Gérard Deltell continu d’être à la traîne d’Amir Khadir, faut quand même le faire alors que plusieurs propositions adéquistes de 2007 recueillent toujours l’appui des Québécois! (Le Québec dans le rouge TVA/Journal de Montréal : ici, ici ou ici)

Certains me diront que 13%, ça ressemble à ce que le parti obtenait avant 2007. Mais voilà, nous sommes après 2007 et ça fait toute la différence au monde. Quand une formation politique à frappé à la porte du gouvernement, qu’elle a formé l’opposition officielle, retombée au fond du baril des sondages n’augure rien de bon. Le message de l’élection générale de 2008 et de tous les sondages qui ont suivi est clair : les Québécois ne considèrent plus ce parti comme une option valable.

Je ne doute pas de la bonne foi et des efforts de Gérard Deltell, mais à l’évidence cela ne suffira pas. Les adéquistes auront beau rappeler quelques faits d’armes passés, comme la clairvoyance de Dumont au sujet de la Caisse de dépôt ou le fait qu’ils ont été les premiers à réclamer une commission d’enquête sur l’industrie de la construction, cela ne fait pas l’avenir, d’autant plus que ces points positifs sont éclipsés par un nombre élevé d’incohérences.

Combler le vide

Ne pouvant plus se présenter comme le lieu de rassemblement de la droite au Québec, n’étant pas en mesure de canaliser la grogne populaire envers les politiques sociales-démocrates qui étouffent les contribuables et sclérosent l’État québécois, l’ADQ est condamné à errer dans les limbes politiques. D’autres départs sont à prévoir, certains faisant plus de bruit que d’autres.

Après le report du conseil général du printemps dernier, le prochain rendez-vous adéquiste aura lieu à la fin de l’automne, curieusement, après la reprise des travaux parlementaires. Le parti aura oublié ses déboires électoraux de Vachon et tentera de se donner un semblant d’erre d’aller. Un conseil général au cours duquel devrait être « entérinée » la nomination du chef désigné, et ce, par moins de 200 membres. Je ne sais pas pour vous, mais je trouve ça dérisoire. Gérard Deltell a beau y croire, viendra un temps où il devra sérieusement se demander s’il souhaite devenir le Fabien Roy de l’ADQ.

Les adéquistes devront aussi se rendre à l’évidence que la droite à laquelle ils croient sincèrement a besoin d’un autre véhicule politique crédible pour faire avancer ses idées, sans quoi, elle devra se fondre dans les formations politiques existantes.

Je crois toujours qu’il faut, comme les partis politiques français le font régulièrement, rénover la droite québécoise, refonder un mouvement sur des bases solides, laissant de côté la question nationale, comme l’écrivaient Éric Caire et Marc Picard dans le préambule du manifeste Le Québec noir sur blanc :

« Une nouvelle alliance politique basée sur des valeurs fondamentales et exigeant un compromis sur la question nationale nous apparaît non seulement réalisable, mais surtout porteuse d’avenir, puisqu’elle permettrait d’unir, entre autres, les gens du centre droit afin de se donner la capacité d’amener le Québec sur la voie du succès et de la prospérité. »

Les adéquistes ne peuvent qu’y trouver leur compte en acceptant de joindre leurs moyens pour donner naissance au mouvement qu’attendent les Québécois.

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Texte initialement publié sur Écran radar

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