Le conflit entre les Chemises Rouges et le gouvernement a atteint depuis quelques jours un point de non-retour. La porte des négociations étant définitivement fermée par le premier ministre Abisit. Quelque soit le mode de discussion proposé par les Rouges, encadré par l'ONU ou par le Sénat, la seule réponse du pouvoir en place est un refus catégorique. Les assauts contre le camp des manifestants qui occupent le quartier des affaires et des grands centres commerciaux de Bangkok, véritable poumon économique de la ville, se sont multipliés ces derniers jours. Les télévisions du monde entier nous relayent de véritables scènes de guérillas urbaines. Les habitants du quartier occupé quittant leurs domiciles, se réfugiant jusque dans les temples pour ne pas entre pris entre deux feux. Hier, l'ultimatum fixé par l'armée pour que la zone soit abandonnée par les Chemises Rouges s'est écoulé alors que plus de 6000 d'entre eux restaient encore et toujours autour du parc Lumphini. L'armée est évidemment en train de prendre le dessus. Les forces sont inégales. Les morts s'additionnent, près de 40 dont des journalistes de la presse internationale. Et ce matin, les militaires ont porté le coup de grâce au camp retranché des opposants, balayant leurs barricades de bambous et de pneus avec leurs chars et menant la traque aux derniers Rouges restés dans ce périmètre. Le gouvernement annonce une opération réussie, les leaders des manifestants, se sont rendus. Mais le retour au calme n'est pas là. La ville est frappée de plusieurs incendies: une chaîne de télé dont le sort d'une centaine d'employés bloqués par les flammes inquiète, un centre commercial, la bourse... Les mises à feu criminelles de bâtiments se multiplient et il sera difficile de lutter contre cette menace qui peut frapper partout. Le conflit va-t-il s'étendre sous cette forme ? En regardant les épais nuages de fumée au-dessus de la capitale thaïlandaise, on peut se poser la question. De pacifique ( il y a 2 mois encore je me baladait dans une ambiance bonne enfant au milieu des manifestants ) et cantonné à un quartier de la ville, le conflit s'est radicalisé. Seuls les opposants les plus déterminés continuent la lutte. Mais les actions sont maintenant, aveugles, irréfléchies, violentes, dangereuses. Tout Bangkok est touché, meurtri ce soir et l'heure de panser ses plaies n'est pas encore arrivée. Les blessures faites à la grosse mangue se font plus nombreuses. Cette guérilla peut-elle s'étendre au reste du pays ? PEut-on basculer dans une guerre civile ? Personne aujourd'hui ne peut répondre à cette question avec certitude. Les chemises éparpillées, délogées de leur camp à Bangkok vont-elles renoncer ou se reformer, se réorganiser et reprendre le flambeau de leur bataille. Un flambeau pacifique ou radical ? Une chose est sûre les Rouges électrons libres qui incendient aujourd'hui des bâtiments de Bangkok, vont continuer à tenter de semer le chaos le plus longtemps possible. Depuis plus de trois mois que leur mobilisation a commencé, ils ne pourront se résoudre à une défaite surtout sous cette forme. Ils sont aujourd'hui la vraie menace. Pour la sécurité de la capitale et pour le gouvernement car ils seront peut-être les inspirateurs d'un nouveau mouvement plus violent qui s'il s'amplifie peut dégénérer en guerre civile. Il faudra observer l'évolution de la situation dans les prochains jours. Je le ferai depuis Paris où je suis rentré depuis plusieurs semaines. Ce qui se passera demain et les jours suivants sera crucial, même si en cas de retour au calme, la menace d'une nouvelle mobilisation des Chemises Rouges planera sur le pays en permanence. Au moins jusqu'aux élections de novembre. Enfin, si Abisit tient sa propostion de les avancer à cette date...