Chloé Delaume met en scène Clotilde Mélisse, un personnage de fiction, un «double fantasmé». Dans deux aventures, elle la confronte à ses personnages. Parce que Clotilde écrit, est celle qui écrit, celle qui écrit qu’elle écrit. Les dialogues qu’elle mène avec ses personnages en disent long sur ce que Chloé Delaume appelle l’autofiction. «C’est une expérience littéraire. Faire de sa vie un roman, et faire un roman de sa vie. Mêler le réel et la fiction, injecter l’un dans l’autre, vice et versa, touiller, obtenir des instants et des précipités.»
Dans la première aventure, elle se laisse surprendre par la revendication d’un personnage secondaire, un homme, Charlie. Mais elle va vite se rattraper et lui infliger ce qu’il demande jusqu’à ce qu’il la supplie… J’ai lu ce texte dans un bus… C’était prémonitoire.
Dans la seconde aventure, c’est une femme, Anaïs, qui découvre son statut fictionnel. Et qui pose la question du réel et de la fiction, question qui taraude l’écrivain. Comment en finir avec un personnage ? L’avatar de Chloé Delaume est allé faire un tour chez les Sims (Corpus Simsi) et s’y est trouvé bien (comme elle l’écrit dans Certainement pas). Clotilde Mélisse est apparue alors, créant à son tour des personnages. «Pas de lignée chez moi, pas d’héritage ni d’atavisme, je suis pour que mes personnages se définissent avant tout comme des individus.» Pas de roman en séries non plus, chaque livre «reste clos sur lui-même».
Ces deux aventures se complètent, elles sont publiées dans le même volume. Elles disent clairement ce qu’est, pour Chloé Delaume - Clotilde Mélisse, l’autofiction : «C’est moi que je mets en scène. Ce que je crée de toutes pièces c’est la situation dans laquelle j’évolue.»