« J’épouse un ventre », aurait confié Napoléon peu avant ses secondes noces avec l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche. Nous étions en 1810. Etrange aveu, plus terrible encore que goujat, et dont on se demande s’il n’est pas apocryphe : l’Histoire, de la « barbe fleurie » de Charlemagne aux soldats partant « la fleur au fusil » en 1914, abonde de ces clichés scolaires que les historiens, pourtant, récusent le plus souvent. Car ce mot prétendu de l’Empereur semble sérieusement remis en question par la belle exposition qui se tient au château de Compiègne jusqu’au 19 juillet prochain, intitulée 1810, la politique de l’amour, Napoléon Ier et Marie-Louise à Compiègne.
Saisir le prétexte du bicentenaire du mariage impérial et insister sur le rôle géographique central qu’y joua Compiègne pour évoquer la figure trop peu connue de Marie-Louise constituait un défi, relevé avec brio par les commissaires de l’exposition. Les manuels d’histoire, tout comme l’inconscient collectif, ont surtout retenu l’image de Joséphine ; sa beauté, sa finesse, son caractère assez fantasque, son raffinement parisien, alliés à la passion qu’elle inspira au fougueux Bonaparte, témoignaient en sa faveur devant la postérité. La seconde impératrice, bien plus sage, plus discrète, presque provinciale avec sa stricte éducation autrichienne, reste encore confinée dans une ombre que l’indigence de la recherche historique qui lui est consacrée atteste.



La section traitant des cérémonies du mariage incluent des costumes, la parure en or et pâte de verre de l’impératrice, des cadeaux de mariage, mais aussi des peintures tout à fait intéressantes. On comparera spécialement la toile de Georges Rouget, Mariage de Napoléon Ier et de l’archiduchesse Marie-Louise, à celle, gigantesque et conservée au Louvre, du Sacre par David… A voir encore, Le Banquet du mariage, par Dufay. Les amateurs de dessins, d’orfèvrerie, de porcelaines, de tapisseries, de reliques et de mobiliers trouveront de nombreux objets, dont le métier à broder, la table à dessiner, la table de toilette et deux bibliothèques de l’impératrice. On notera encore un portrait en pied de la même par Paulin-Guérin d’après Gérard, un portrait de Talleyrand par Prud’hon, un autre de Berthier, par Pajou et, surtout, Psyché et l’Amour, cet exceptionnel marbre de Canova prêté par le musée du Louvre.

Illustrations : Couverture du catalogue - Georges Rouget, Mariage de Napoléon Ier et de l’archiduchesse Marie-Louise, Huile sur toile, 1810, 1,85 x 1,82 m. Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles © Rmn / Gérard Blot – Antonio Canova, 1797, L’amour et Psyché debout, Marbre, H 1,45 m. Musée du Louvre, département des Sculptures, Paris © Rmn / Stéphane Maréchalle – Alexandre Maigret, Métier à broder de Marie-Louise pour Compiègne, Acajou, bronze ciselé et doré, velours de soie verte, 0,96 x 1,40 x 0,53 m. Musée national du palais impérial, Compiègne © Marc Poirier – Thomire et Odiot, d’après Prud’hon, 1810, Corbeille de mariage, Bois et bronze doré, 1,70 x 1,35. Musée Lombardi, Parme © museo Glauco Lombardi – Parme.