Si le thon rouge de Méditerranée est aujourd’hui considéré comme une espèce en voie de disparition (voir la vidéo rendez-vous en novembre à l’ICCAT), d’autres espèces de thonidés sont également menacées.
L’Union européenne et la France notamment continuent à exporter et à créer de la surcapacité de pêche, dans l’Océan Indien par exemple, où l’on pêche des thons tropicaux. Or les organisations de gestion de la pêche aux thonidés se sont révélées incapables d’organiser une pêche raisonnée et durable.
Les industriels du thon se tirent une balle dans le pied en maintenant la surcapacité de pêche
Alors que la réunion sur la surcapacité de pêche réunissant les 4 principales organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) thonières qui se tenait à Brisbane (Australie) la semaine dernière, s’est achevée sur un échec, on vient d’apprendre que la France, qui a actuellement 10 thoniers senneurs pêchant dans l’Atlantique (côtes de l’Afrique de l’Ouest) et 11 dans l’Océan Indien, souhaite augmenter d’ici à 2015 de 18 792 tonne le volume total de sa flotte de l’Océan Indien, soit 4 nouveaux méga-senneurs, 15 senneurs et 8 palangriers reconvertis au thon tropical.
Or la majorité des populations de thons tropicaux de l’Océan Indien sont déjà au maximum de leur exploitation : c’est le cas du thon germon (ou thon blanc) et du thon obèse .
Le thon albacore, thon à la chair de couleur rouge fréquent sur les étals français et souvent présenté comme alternative durable au thon rouge de Méditerranée, est quant à lui déjà surexploité ! Il constitue de 25 à 50 % des captures françaises selon les années dans l’Océan Indien. 318 000 tonnes ont été pêchées en 2008 contre un maximum recommandé par les scientifiques de 300 000 tonnes et sa population se trouve à présent en dessous de la limite de durabilité !
De plus, les méthodes de pêche employées, telles que la senne coulissante associée aux dispositifs concentrateurs de poissons (DCP), sont redoutables car elles entrainent des captures importantes de juvéniles d’albacore mais aussi d’autres espèces de thons encore plus fragiles, ainsi que des captures de requins et de tortues marines.
A quoi joue la France !
Ces méga-senneurs industriels de 90 mètres construits par la Sapmer (armement basé à la réunion), ne peuvent même pas être enregistrés sous pavillon français car le registre est déjà plein pour cette catégorie de bateaux, et le sont donc sous pavillon « France Territoires », et immatriculés à Mayotte!
Avec une capacité unitaire de 7 000 tonnes de thon par an, ils vont accroitre la pression de pêche sur ces populations de poissons déjà affaiblies alors que l’organisme de gestion de la pêche, l’IOTC, n’a toujours pas fixé de quotas de pêche pour ces thons tropicaux.
On rejoue donc exactement le même scénario que pour l’ICCAT et le thon rouge : construction d’une surcapacité de pêche massive avant même la mise en place de quotas par le gestionnaire, et alors que les scientifiques tirent déjà la sonnette d’alarme depuis quelques années !
La France ne peut pourtant ignorer cet état de fait. Cette démarche est en contradiction avec les engagements du Grenelle de la Mer ainsi qu’avec les promesses d’exemplarité faits par le gouvernement en la matière ! Cela moment même ou la Commissaire européenne à la pêche, Mme Damanaki, demande aux ministres européens de s’engager pour une réforme sérieuse de la Politique Commune de la Pêche (PCP).
Elle s’alarme surtout du fait que les progrès en vue d’une réduction de la surpêche et d’une amélioration de la durabilité des stocks de poissons restent bien trop lents. Ainsi, le secteur a perdu 70% de ses emplois en 20 ans, et la quasi-totalité des stocks de poissons européens vont passer dans le rouge si rien ne change en matière de gestion.
Face à ce sombre constat, la France prône le statu quo, avec le maintien des quotas comme principal système de gestion des ressources halieutiques, et laisse la pêche industrielle s’accaparer des ressources déjà surexploitée.
Greenpeace demande donc que dans le cadre de la réforme de la PCP : les avis scientifiques aient valeur de référence légale pour la fixation des quotas de pêche, des objectifs contraignants de réduction de la surcapacité des flottes soient pris, la transparence et la traçabilité dans la gestion des pêches de l’UE soient améliorées
En toute logique, ces mesures devraient bien sûr être défendues par la France et l’Europe dans toutes les ORGP où elles sont présentes, comme dans l’Océan Indien.
La mise en place de réserves marines est urgente
Tout comme en Méditerranée, Greenpeace demande la mise en place de réserves marines en Océan Indien.
Le Gouvernement britannique a mis en place, le 1er avril dernier, la plus grande réserve marine mondiale (545 000 m²) autour de l’archipel des Chagos, considéré comme l’un des écosystèmes les plus riches du monde.
Cette dynamique doit se poursuivre, il faut à présent protéger des espaces en haute mer ainsi que les lieux remarquables où se rassemblent les thons dans l’Océan Indien, comme certains monts sous-marins.
Qu’est ce qu’une réserve marine
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