Lorsque l’on évoque une mesure politique partant d’une bonne intention, mais dont les effets pervers seront supérieurs aux bénéfices escomptés, on parle d’une « fausse bonne idée ».
Mais lorsqu’une mesure est viciée dans son principe dès le départ, comme c’est le cas des péages urbains, on est en droit de la qualifier de « vraie mauvaise idée ».
De quoi s’agit-il, au fait ?
Les mercredi 16 et jeudi 17 juin derniers, une commission mixte paritaire (CMP), c’est-à-dire composée à égalité de parlementaires des deux Chambres (députés et sénateurs), a donné son feu vert à l’expérimentation des péages urbains dans les agglomérations de 300 000 habitants et plus, prenant modèle sur Londres, Milan, Singapour et Stockholm.
Dans les grandes villes de France, le passage dans certaines zones pourra donc être soumis à un droit d’entrée pour l’automobiliste. Là où, auparavant, il pouvait circuler librement, il devra verser son obole pour avoir le droit de passer ! Une pratique qui n’est pas sans rappeler l’octroi auquel étaient soumises jadis les marchandises qui pénétraient dans les villes françaises.
Le point commun entre les deux dispositifs est la logique de taxation à l’œuvre, dénoncée au départ par les députés, avant qu’ils ne se ravisent du fait de l’accord du ministre des Transports, Dominique Bussereau. Logique de taxation qui, d’ailleurs, rend le cas français incomparable avec ceux des autres pays, où l’automobiliste est moins taxé. En France, il y a déjà la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), l’éco-redevance sur les poids lourds (qu’acquittent, en bout de chaîne, les consommateurs), les tarifs excessifs des péages autoroutiers, l’augmentation des amendes de stationnement de 11 euros à 20 euros… et il faudrait encore payer pour avoir le droit de circuler librement en ville, alors même que le contribuable paie déjà pour les travaux de voirie ?
Les promoteurs des péages urbains arguent que ceux-ci ne constituent pas un impôt, dans la mesure où il reste le choix pour l’automobiliste d’emprunter un réseau gratuit et lent, ou payant et rapide… ou encore les transports en commun.
Évidemment, ces considérations font peu de cas des automobilistes qui n’ont, indépendamment des deux paramètres de l’argent et du temps, pas d’autre choix que de prendre la voiture : les banlieusards, les habitants des villes petites et moyennes, les ruraux, soit la majeure partie de la population française.
Par ailleurs, cette mesure est discriminatoire pour l’automobiliste : il y aurait donc un réseau pour riches, et un autre pour pauvres ? Et la liberté de déplacement sur tout le territoire français, est-elle devenue caduque ?
L’argument des partisans des péages urbains est que, dans la mesure où la voirie de surface des villes est déjà encombrée, il faut un prix, même minime, pour le décongestionner. Comme si les automobilistes prenaient plaisir à perdre leur temps dans des embouteillages… Il existe pourtant une autre solution à l’encombrement de la voirie des villes : cesser de rendre la circulation automobile impossible avec les restrictions au stationnement, les entraves à la circulation, le rétrécissement des voies…