Il y a quelques années, Hubert Reeves avait délivré quelques chroniques bien éclairées sur la nécessité de reconsidérer notre mode de consommation (et de production, forcément) eu égard aux défis que lancent, à l'échelle mondiale, la pression démographique et le réchauffement climatique.
Dans l'une d'elles, il concluait sur le fait que si la population humaine mangeait de la viande dans la même proportion que dans les pays riches, la production mondiale de céréales ne pourrait nourrir que le tiers de cette planète.
A tous les arguments associés au gaspillage énergétique, aux méfaits économiques et écologiques de la filière 'viande', il convient également de joindre celui lié au sort de l'animal dit de boucherie.
C'est le thème de la chronique ci-après.
"Lors d'une causerie précédente, nous avons posé la question : y a-t-il une amélioration du comportement des êtres humains au cours des millénaires ? Peut-on dire que l'hominisation de nos ancêtres simiens, nos cousins, des singes, se soit accompagné d'un phénomène d'humanisation ? J'ai donné quelques éléments qui suggèrent que oui. Qu'au travers de fluctuations terribles, il y a, à long terme, un progrès.
La vision des massacres de l'Ouganda, des animaux contraints de vivre dans des conditions effroyables, de la destruction systématique de la forêt indonésienne, ne doivent pas nous faire oublier qu'il y a aujourd'hui de nombreux pays où les droits des hommes et des femmes sont respectés et défendus. Que les abus encore trop fréquents sont blâmés à l'échelle mondiale. Qu'il y a un éveil de la sensibilité quasi-universelle, d'une compassion active face à la souffrance.
Et que ces sentiments ne sont pas confinés aux seuls êtres humains. La Déclaration Universelle des Droits de l'Animal, de mieux en mieux admise comme base de réflexion par l'opinion publique, la perte de popularité — chez les jeunes — de la chasse de loisir, en sont des exemples bien significatifs.
C'est en associant ces aspects de sensibilité morale par rapport aux traitements et aux meurtres des animaux, d'une part, et du faible rendement protéinique de la viande par rapport aux plantes, d'autre part, qu'il semble raisonnable de conclure que l'humanité deviendra de plus en plus à dominante végétarienne, ce qu'elle était probablement à son origine, comme semble le montrer le comportement de nos cousins primates.
Dans une optique optimiste sur l'avenir de l'espèce humaine, il semble vraisemblable qu'on assistera, du moins pouvons-nous l'espérer, à une diminution notable, à l'échelle mondiale, des élevages, au profit des cultures céréalières et de légumineuses.
En d'autres mots, on assignera de plus en plus de surfaces arables aux plantes, et de moins en moins aux pâturages.
Mais qui vivra verra ..."