Élaborer une nouvelle cartographie artistique, être un laboratoire de réflexion afin de re-insérer les oeuvres africaines dans leur contexte, telle est l’ambition annoncée de l’expostion présentée au BOZAR dans le sillon de la célébration du cinquantenaire des indépendances africaines et plus spécialement du Congo Belge.
L’exposition fait figure d’étape du renouvellement de la présentation muséale du Musée Royal de l’Afrique Centrale de Tervuren (MRAC), créé par le Roi Léopold II afin d’accueillir une collection d’objets d’Afrique. Une présentation ancienne (je dirais depuis les années 50-60) s’était maintenue dans un état quasi-identique jusqu’en 2008, quand sous l’effet conjugué de la publication d’ouvrages critiques comme les Fantômes du Roi Léopold et d’une opinion publique plus active, les travaux de réaménagement ont été entamés.
La clé de voûte de l’expérience mise en place par David Adjaye, Anne-Marie Bouttiaux (MRAC), Koyo Kouoh et Nicola Setari est l’insertion des pièces anciennes des collections du MRAC dans la réalité africaine d’aujourd’hui.
Les photos des capitales africaines livrent des paysages urbains, un puzzle multicolore, rutilant ou poussiéreux. Les images paisibles contrastent presque avec les résumés historiques par pays, placés à leurs côtés. L’histoire récente est émaillée de coups d’états, de conflits, de guerres, de présidents à vie, de milices, de richesses et de crises économiques. Sur ce fond, 8 centres d’art contemporain africains présentent leurs activités et leurs créations. Je suis impressionnée par des photos de George Osodi qui nous projettent dans une réalité dominée par le pétrole.
Je m’étais figuré l’idée de la “contextualisation” des oeuvres à la manière ethnographique ou anthropologique en me projetant dans la recherche des significations et des valeurs originelles des pièces du MRAC -Tervuren. L’enigme du sens perdure (pour moi) mais l’exposition m’a conduite à envisager mes questionnements sous un angle différent. En effet il est question de la place et de la réception de ces mêmes artefacts dans leur région d’origine, surtout aujourd’hui quand les pratiques et les traditions qui les entouraient s’évanouissent. Et quelle filiation pour la création artistique contemporaine?
Pour échapper d’une cartographie classique David Ajdaye a choisi une approche par zones naturelles: désert, le sahel, la savane, la forêt et les montagnes, ce qui permet de regrouper les oeuvres artistiques produites par zone géographique et climatique et d’en voir les traits communs. Je repense un instant aux Lettres persanes et je reste bien volontiers un long moment dans la salle de lecture spécialement aménagée où je retrouve des ouvrages sur l’art africain de toute époque.
BOZAR Bruxelles
Jusqu’au 29 septembre 2010