Éternellement les espaces
expansifs infinis vrombissent
et bossues pas bossues les baleines
ronronnent leurs musettes et mixtures
hydrauliques fondamentales
harmoniquement périment les vieilles foudres
d’autre part, s’élevant au milieu comme elle le peut, la voix de « l’humain
trognon / cabossé lacunaire en marche », double tragicomique du poète qui,
s’il n’arrive décidément pas à se taire1 n’en demeure pas moins
lucide quant aux limites de son (dé)chant : « il bave ses glorioles /
fariboles / tire sa langue » – et, à force de tirer dessus, finit par (se)
créer de brèves issues dans l’anéantissement qui reste toujours en fond d’écran2.
Pour cela, le poème tente d’être le lieu où nommer ne se fait pas sans montrer
à quel point cette nomination ne peut que rater sa cible et, du coup, il
en devient lui-même une qu’il faut essayer d’atteindre, objet sémantico-sonore
dont l’inanité ne saurait être que partielle :
bientôt les astres noirs
des nuits inépuisées
et quoi ?
quoi qui sarcle sarcle
et sarcle hoquète ? okay ?
(toutes affaires incessamment terrestres)
Autrement dit, que ce ne soit pas là beaucoup de bruit pour rien mais que ça
aide un tant soit peu à faire face à « l’effréné charroi le flot /
brouillé d’obliques courants traversiers ».
par Bruno Fern
Henri Droguet, Boucans, , éditions
Wigwam, juin 2010, 11 pages, 5 €.
Parutions Wigwam
1. Oui, dans ma vie, puisqu'il faut bien l'appeler
ainsi, il y eut trois choses : l’impossibilité de parler, l’impossibilité
de me taire, et la solitude, physique bien sûr ; avec ça je me suis
débrouillé. » (S. Beckett, L'innommable).
2. Autre nom de l’amnésie, en particulier
celle qui règne dans l’usage strictement communicationnel des mots, puisque
« la mémoire plombée / dépourrit dans les langues ».