Charles Avery, The Hunter's Cabin, 2004, crayon sur papier
Parlons institutions. Vous le savez, les lieux d'art se divisent en deux catégories : ceux relevant du privé et ceux dépendant du secteur public. Aujourd'hui, nous pénétrons le milieu des FRAC, l'acronyme de Fonds régionaux d'art contemporain, créés au début des années 1980 par Jacques Lang dans un but de décentralisation et donc, pensait-on, de démocratisation de la culture. Les FRAC sont à la fois chargés de diffuser et de collectionner l'art contemporain. Par définition, chaque région a son propre FRAC, vous l'aurez compris, le mien se trouve dans le XIXè arrondissement de Paris.
Exposition monographique de l'écossais Charles Avery qui, depuis 2004, se consacre à un seul projet nommé The Islanders. C'est un monde un brin mystérieux, fantasque, peuplé d'étranges personnages si proches de nous et pourtant bien différents. Des bustes en bronze hyperréalistes aux yeux clos surmontés de couvre-chefs aux couleurs chaudes et aux formes géométriques jalonnent l'exposition. Ces visages, au grain de peau si fin que l'on a envie de les caresser, s'allient en un excellent contraste à la vivacité de leurs chapeaux. Tout cela est bien séduisant.
Au mur, des dessins de scènes de rue, le plus souvent, montrant des habitants étonnement courbés s'adonnant presque aux mêmes activités que nous dans notre monde ordinaire. Le décalage, voilà sur quoi repose cette exposition car tous ces éléments sont identifiables mais à côté de notre réalité, juste à côté.
Charles Avery, 2004, crayon sur papier
Toutes ces œuvres nous racontent l'histoire de ce lieu imaginaire, une île dont la capitale est Onomatopoeia. Ses habitants sont décrits du point de vue d'un explorateur qui comprend progressivement les us et coutumes en vigueur. La posture de l'artiste est celle du dernier des explorateurs, celui qui doit inventer un monde pour ensuite le découvrir. Paradoxe, vous avez dit paradoxe. Charles Avery construit une œuvre sur le principe des poupées russes : des sculptures, des dessins présentant l'histoire d'un personnage passant sa vie à porter à notre connaissance la réalité d'un autre monde.
Charles Avery, Untitled (bejewelled Hare), installation, 2009Petite pointe de fantastique visible, entre autre, dans la dernière salle où un lapin empaillé nous toise. Bien différent de celui d'Alice aux pays des merveilles, lui ne répète pas qu'il est en retard, mais exhibe ostensiblement des bagues ornées de pierres précieuses enfilées sur ses fines pates.
L'étrange c'est aussi la souris-pierre moitié rongeur moitié minerai présente dans plusieurs dessins. Pas de mouton, hé non, ce n'est pas au petit prince que répondent ces dessins, pourtant notre désir est le même, rêver toujours.
Onomatopoeia, part I
exposition du 27 mai au 8 aout 2010
FRAC Ile de France
75019 Paris