Cesse-t-on d’être socialiste quand on a le pouvoir ?

Publié le 29 juin 2010 par Polluxe

Ou bien est-ce que le PS, quand il est dans l’opposition, donne dans la posture systématique, le slogan facile qui attire le chaland ?
La question peut se poser sur le sujet des retraites quand on voit comment le PS s’accroche à l’âge légal de départ à 60 ans. Pour être au diapason de qui ? Des syndicats, des manifestants, des partis plus à gauche que lui, du peuple fantasmé ?

Didier Migaud, premier président de la Cour des Comptes et ancien député socialiste, vient de dire à sa manière que le passage à 62 ans n’était pas un problème : « 62 ans en 2018 peut se comparer à 60 ans en 1983 », sous-entendu compte tenu des variations de l’espérance de vie. Il considère par ailleurs que la réforme actuelle ne va pas assez loin car elle n’aura un impact qu’à partir de 2018 et ne comble pas les déficits à court terme…

Strauss-Kahn ne dit pas autre chose et estime que si « on vit 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans ».

D’où vient cette fixette sur les 60 ans ? Rocard donne quelques éléments d’explication dans un entretien à France-Soir :

F.-S. Quand François Mitterrand a décidé d’abaisser l’âge légal de la retraite de 65 à 60 ans, en 1981, vous étiez présent lors de ce fameux Conseil des ministres…

M. R. Oui. Et, autour de la table, tous les ministres en charge de l’économie – même Fabius et surtout Delors – étaient effondrés, décomposés. Moi aussi. Mais il s’agissait de faire plaisir au Parti communiste et de magnifier le caractère social du gouvernement ! Le résultat a été la sacralisation de ce chiffre de 60 ans. Depuis, nous sommes encombrés d’un symbole alors que ce chiffre est, au fond, le moins significatif de tous les paramètres, même si c’est le plus visible.

Pour lui le PS se trompe de combat tandis que la réforme est insuffisante et que les causes profondes de la crise économique ne sont pas ciblées :

[...] En faisant de l’âge légal un symbole, le PS est encore en train de se tromper de combat. [...] Je crois que le PS se bloque sur une carte perdante. Quant à faire reposer les retraites sur la fiscalité, c’est absurde et « dangerosissime ». Je parlerai même d’imbécillité. Il faut absolument que le régime des retraites s’auto-équilibre. Il n’y a pas d’autre solution.

F.-S. Faudra-t-il une nouvelle réforme des retraites dans dix ans ?

M. R. Dans dix ans, ou peut-être avant, je ne sais pas. Une certitude : le problème des retraites reste devant nous. D’autant que nous ne sommes pas sortis de la grande crise. Nous n’en avons traité qu’une petite partie, et mal : les banques reconquièrent leur pouvoir. Rien sur les paradis fiscaux, rien sur les produits dérivés. C’est effrayant. Nous allons donc vers des coups durs économiques fréquents dans un contexte de croissance lente. Dans ces conditions, le poids des régimes de retraite va devenir assez vite intolérable, une fois absorbé l’allégement temporaire signé Woerth-Sarkozy-Fillon.

Pour Bayrou – et je suis d’accord avec lui – c’est le passage à 67 ans de l’âge plafond qui est beaucoup plus injuste. Mais comme ce n’est pas un symbole historique personne n’en parle…

En tous cas je comprends mieux pourquoi le PS est monté au créneau comme un seul homme quand Sarkozy a critiqué Mitterand et le passage à la retraite à 60 ans : c’est un dogme, d’autant plus sacré qu’il appartient à la geste mitterandienne et que Mitterand, comme De Gaulle, est passé du coté du mythe et des héros.

Alors Migaud, DSK, Rocard, socialistes ou pas ?
Au final c’est Cambadélis qui résume bien la situation : « Dominique Strauss-Kahn est dans son rôle: il est au FMI, il parle du FMI et de l’allongement de la vie et de la vieillesse. Le Parti socialiste est dans le moment présent ». Le moment présent… Qu’en termes choisis ces choses là sont dites…



Tagged: DSK, Migaud, PS, retraite, Rocard