Ce droit, pourtant inscrit dans la loi, est aujourd’hui bien malmené si l’on en juge par le nombre toujours croissant des « sans vacances ». Au moins un tiers des citoyens français ne partent pas en vacances chaque année et l’Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes, l’OVLEJ estime à trois millions le nombre d’enfants ne partant pas en vacances.
En 1936, après les grandes grèves et les accords de Matignon, le gouvernement du Front Populaire adopte des mesures sociales allant dans le sens de l’émancipation des citoyens : semaine de 40h, congés payés. Le sous secrétaire d’état aux sports et aux loisirs, Léo Lagrange instaure une réduction de 40% sur les billets de train pour les ouvriers et leurs familles, ainsi qu’un « billet populaire de congé annuel » offert à 600000 personnes dès l’été 1936. L’objectif étant de démocratiser les loisirs, activités jugées aussi indispensables que le travail.
Les citoyens qui ne partent pas en vacances sont aujourd’hui souvent ceux des classes populaires qui ne bénéficient ni des aides associatives ou publiques, et n’ont pas de comité d’entreprise qui leur permettrait d’accéder à des offres de vacances à moindre frais.
Ainsi, en France aujourd’hui, les vacances sont trop liées au statut même de l’individu alors qu’elles devraient être un droit pour tous, sans distinction.
Il est temps de reconquérir ce droit par la mise en place de mesures concrètes afin de créer les conditions de l’émancipation de tous les citoyens. De plus, il faut permettre aux familles de pouvoir accéder à de vraies vacances. Ces moments sont des instants où tous les membres d’une même famille peuvent se retrouver ensemble et construire une cohésion sociale.
Il faut repenser le système des chèques vacances. L’extension de ce système à tous les salariés doit devenir la norme, avec la mise en place de comité d’entreprises territoriaux. Adossé à ce chèque vacances, la mise en place d’un nouveau « billet SNCF de congé annuel » permettrait à toutes les familles de bénéficier du transport ferroviaire, moins polluant que la voiture afin de partir en vacances à moindre frais.
Enfin, il s’agit aussi de repenser le temps passé sur place et pas simplement le moyen de se rendre en vacances. L’état a depuis trop longtemps déjà négligé les lieux de vacances sous son contrôle et les aides qu’il octroie aux associations d’éducation populaires qui pourtant accueillent chaque année des milliers de jeunes. Il faut que l’état apporte une aide massive et des moyens logistiques en aidant par exemple les communes à maintenir un camping municipal de qualité, ou en mettant en valeur les camps de vacances organisés notamment par des fédérations d’éducation populaire.
« Nous voulons que l’ouvrier, le paysan et le chômeur trouvent dans le loisir la joie de vivre et le sens de la dignité » écrivait Léo Lagrange en 1936. Il est de notre devoir de reprendre cette phrase pour porter ce droit aux vacances pour tous, et militer pour favoriser les dispositifs locaux de loisirs non marchands. Cela est d’autant plus important dans les secteurs ruraux. En effet, garantir un droit aux vacances, c’est également assurer la pérennité voire le développement d’un territoire rural, dès lors que le centre d’accueil ne fonctionne pas en « circuit fermé ».
MJS