Billet un peu fourre-tout sur le nucléaire.
Trouvé sur le blog Sortir du nucléaire sur la sous-traitance, cette vidéo de Philippe Billard, actuellement en procès aux Prud'hommes.
La précarité, les manquements à la sécurité : tel est le quotidien de ces personnes usées jusqu'à la moelle oseuse, liquidateurs anonymes du nucléaire civil français. Une réalité raconté dans un roman intitulé La Centrale (interview de l'auteur) :
Ce sont les ouvriers de l’invisible. Ils se glissent au cœur des centrales nucléaires, vivant au rythme des embauches saisonnières et des trois-huit quotidiens, faisant le sale boulot pour de maigres salaires, côtoyant en permanence le risque et la précarité. Ils sont plusieurs milliers à sillonner la France ou les pays limitrophes en quête d’un nouveau contrat : peuple nomade que soudent les inquiétudes, le goût de la marge et la mise en commun des repas et des frais de logement. Une seule obsession : « la gestion de la dose », comprendre « vingt millisieverts », la quantité maximale de radiations supportable par homme et par an.
Voilà pour une des réalités peu reluisantes du nucléaire français, avec des ouvriers français.
Quand on sait que le combustilble vient majoritairement du Niger, où les riverains de la mine boivent nucléaire, mangent nucléaire, respirent nucléaire, on se demande comment on peut qualifier cette énergie de "propre".
Alors, quand j'ai vu cette tribune dans Le Monde, Le nucléaire français doit faire des choix déterminants, sorte de note stratégique à destination d'Areva/GDF-Suez/EDF, j'ai toussé. Pourtant, Jean-Michel Bezat est journaliste (CFJ, promo 1981), même pas salarié d'Areva. Les conférences de rédaction avec Hervé Kempf doivent être sympas.
Jean-Michel Bezat promeut rien moins que la poursuite du nucléaire, la vente de réacteurs d'origine française (on a sa fierté industrielle chez Jean-Michel), grâce à nos champions nationaux, dont EDF fort de la gestion des 58 réacteurs !
Mais attention, fin marketer, il remarque tout comme les champions précédemment cités, qu'il ne faut plus proposer le coûteux EPR (la Finlande pourrait témoigner : 2 ans de retard, + 50 % d'augmentation) qu'aux gros pays riches et solvables. Pour les autres pays "en développement" ou "émergents", on prendra du nucléaire low-cost. Je n'invente rien :
La bataille peut aussi se jouer entre "low cost" et "high-tech".
Est-ce à dire qu'on vendra en Lybie ou au Brésil des réacteurs au rabais ? Pas grave, leurs liquidateurs du quotidien ne coûteront pas grand chose à des systèmes sociaux inexistants ! S'il y a dissémination, on niera. De toute façon, les nucléaires civils et militaires ne sont pas liés, ce qui doit expliquer que les rapports sur le nucléaire civil sont classés "secret défense".
Quelle perversité peut donc pousser un journaliste à écrire de telles âneries ? Si encore il écrivait pour la publication interne GDF-Suez... non, on est bien sur lemonde.fr.
Le nucléaire français a toujours été face à des choix déterminants. Dès le début, quand il s'est agi de monter la filière électronucléaire française, ou non. Giscard, puis Mitterrand, ont décidé que oui, il le fallait, au nom d'une indépendance énergétique qu'on sait largement usurpée. Quand on voit cet extrait du débat Giscard-Mitterrand, on mesure le temps perdu. Le futur président socialiste parle du 8e Plan qui a montré que les économies d'énergie étaient le meilleur "gisement" à exploiter pour gagner l'indépendance énergétique :
Imaginez le temps perdu ! On en pleurerait de rage. Quelle France aurions-nous aujourd'hui si de larges économies d'énergie avaient été promues à large échelle ?
Définitivement, un seul avenir pour la filière nucléaire française (et mondiale) : le démantèlement.
Les liens
- Sortir du nucléaire ; blog de la sous-traitance
- L'histoire du VIIIe plan
- La Centrale
- La liste des incidents nucléaires dans les années 2000
- Les Verts : Démanteler, seul avenir pour la filière nucléaire