Posted by Laurent Artur du Plessis under Crise économique | Mots-clés: Austérité, déficits publics, flexibilité des taux de change, relance, yuan |
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À Toronto, les Vingt se sont montrés divisés. Pour ce qui est du yuan, le projet de communiqué de samedi mentionnait son décrochage du dollar, récemment annoncé par la Chine. L'enthousiasme a été rapidement douché : les Chinois ont exigé que cela disparaisse du communiqué final. En prévision des pressions qu'exerceraient notamment les négociateurs américains, ils avaient averti dès avant le sommet que le débat sur leur monnaie n'avait pas sa place dans une réunion internationale. Il ne faut donc pas s'attendre à une réévaluation significative du yuan, tant espérée pour le rééquilibrage des échanges commerciaux. Concernant la politique des changes, le communiqué final ne mentionne pas la Chine : il s'agira " d'accroître la flexibilité du taux de change dans certains marchés émergents. "
Décidément, le torchon brûle entre Pékin et Washington. L'ambassadeur chinois à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est allé jusqu'à dire à l'agence de presse Reuters que les exigences excessives des États-Unis expliquaient pourquoi les négociations du cycle de Doha, ouvertes en 2001, ne menaient à rien.
Concernant les stratégies de sortie de crise, le désaccord est également profond. Les États-Unis ont insisté en faveur de politiques de relance de la croissance. Ils ont été appuyés par des pays émergents comme le Brésil. Et la Chine, d'accord sur ce point avec Washington : le président Hu Jintao a mis en garde les pays riches et émergents du G20 contre un arrêt trop brutal des politiques de relance. Au contraire, les Européens et le Canada donnent la priorité à la réduction des déficits publics pour éviter une crise à la grecque. Pour ne pas affoler les marchés, le communiqué final des Vingt masque leurs divergences sous une unanimité de façade : ils assurent s'accorder sur la nécessité de rétablir l'équilibre des comptes publics de 50% d'ici 2013. Mais en précisant tout de même que " la plus grande priorité du G20 est de protéger et de renforcer la reprise [...] ".
Autre point de divergence : la taxe bancaire mondiale. Plusieurs nations européennes et les États-Unis la proposaient. Mais le Canada y étant fortement opposé, elle a été écartée de l'accord final.
Sous l'aiguillon de la crise, les Vingt tirent à hue et à dia. Leurs nerfs sont à vif. Les égoïsmes nationaux ou continentaux triomphent. Ce manque d'unité de vues sur des questions aussi importantes que la politique des changes et les plans d'austérité n'est pas de nature à optimiser les réponses à la crise.
À Toronto, le président chinois a mis en garde les pays occidentaux contre la tentation de prendre des mesures protectionnistes (comme si la sous-évaluation du yuan n'était pas du protectionnisme déguisé...). Il sait qu'un lobby protectionniste s'active au Congrès des États-Unis et que le protectionnisme pourrait arriver sur le devant de la scène au cours des prochaines années, devenant une pomme de discorde entre Washington et Pékin.