Vacances anticipées...

Le rugby se plait à rappeler qu'il est un sport de tradition. Et l'équipe de France a visiblement souhaité conforter cette image, à l'occasion du dernier match de sa saison, disputé à Buenos Aires. Conformément à la tradition, le XV tricolore a perdu largement le dernier match d'une tournée estivale galvaudée...comme d'habitude (ou presque).

De la déroute argentine à laquelle il nous a été donné d'assister samedi soir, on ne retiendra pas grand chose. Force est de constater que les enseignements à tirer d'une telle mascarade de rugby sont peu nombreux.

Quelques confirmations cependant :

Comme on pouvait le craindre, les joueurs Français étaient à la rue sur tout les plans. Que ce soit physiquement ou psychologiquement, les internationaux n'y étaient plus. La tête et les jambes visiblement ailleurs. Les soucis entrevus lors du match contre les Springboks se sont confirmés : usés par leur longue saison, les joueurs du XV de France ont expédié les affaires courantes.

Dans le rugby moderne, qu'on le veuille ou non, il ne suffit plus d'avoir du talent pour faire bonne figure. Sans intensité physique, sans engagement défensif de tous les instants, il n'est pas possible de remporter un match. On nous rétorquera que les Pumas, qui jouent presque tous en France ou en Angleterre, ont eu le même calendrier que les hommes de Marc Lièvremont.

Le ressort de la victoire argentine tient sans aucun doute dans un mot : orgueil. Et dans un adjectif : blessé. Après une double défaite contre les Ecossais, au terme d'une saison internationale pas très convaincante, les Pumas avaient à coeur de montrer à leur pays que le rugby argentin est toujours l'un des meilleurs du monde. Sans compter qu'un match contre les Français revêt toujours une saveur particulière, le terme "revanche" n'étant jamais très loin dans la liste des qualificatifs de ces rencontres entre cousins d'ovalie.

Autre ingrédient de la soupe de rugby servie hier soir, l'arbitrage de Monsieur Dickinson. Il n'est pas à l'origine de la défaite tricolore, mais aura contribué, par quelques décisions dont il a le secret, à  passablement compliquer les affaires de nos jeunes vacanciers. Ce Monsieur Dickinson est un mystère comme seul en génère le rugby : malgré la preuve régulièrement administrée de son peu de talent, il continue d'officier à un niveau qui ne rassurera pas les Français qui pourront croiser sa route à l'avenir, mais qui devrait atténuer leurs critiques contre les arbitres domestiques.

Nuançons cependant. Monsieur Dickinson, pourtant peu à l'aise dans le jugement de cet exercice, a sanctionné comme il se devait la supériorité Française en mêlée. Malheureusement, les Français semblent avoir oublié de travailler le reste lors de leur tournée. Et en particulier la défense, dont on ne dira pas tout le mal qu'on en a pensé.

Ce secteur si important du jeu, point fort traditionnel du XV de France depuis dix ans, a failli comme rarement. L'odeur des vacances a peut-être conduit les bleus à pratiquer le beach-rugby avec quelques jours d'avance...

Aucun joueur ne mérite davantage d'opprobre qu'un autre, tant la médiocrité a été la "qualité" la mieux partagée dans cette équipe. Néanmoins, on saluera les tentatives de Louis Picamoles pour tenter de remettre le camion bleu dans le sens de la marche avant. Il n'est peut-être pas un hasard de constater que ce joueur qui a disputé un nombre limité de rencontre cette année est l'un de ceux qui se sont montrés le moins à leur désavantage...

Il n'est pas certain que cette tournée ratée (comme à peu près toutes celles qui sont organisées à cette période) fasse les affaires de Jérôme Porical, Florian Fritz ou Dimitri Szarzewski. Ils ne sont évidemment pas les seuls responsables, mais ils jouaient une carte importante à un an de la Coupe du monde.

Marc Lièvremont a dit tout son désarrois devant ce dernier tango argentin qui a tourné à la valse. Même s'il faut se garder de tout jugement définitif, le sélectionneur n'a visiblement pas réussi à débrancher les bleus du courant alternatifs. Trop inconstant, pour ne pas dire inconsistant, le groupe ne semble actuellement pas en mesure d'apporter la moindre assurance dans son jeu, à part peut-être dans le secteur de la mêlée, dont on a vu qu'il ne constituait plus un atout significatif face aux nations du sud.

Cette forme de surplace inquiète, et interroge sur la capacité du rugby Français à franchir enfin le fossé qui le sépare du "Top trois" mondial. Condamné à l'exploit (car on ne changera pas tout en un an), Marc Lièvremont devra faire montre d'un bel enthousiasme pour démontrer que les vacanciers du mois de juin 2010 pourront se transformer en conquérants d'un Graal mondial qui est, aujourd'hui, du domaine de l'inaccessible.

Un dernier mot pour évoquer la retransmission du match sur la chaine Direct8, et les commentaires proprement horripilants des deux présentateurs. Approximations, enthousiasme surjoué (on se serait crû en finale de coupe du monde), jugements à l'emporte-pièce, le duo de commentateurs ne nous aura rien épargné...