Comment le suivre?

L’Évangile de ce treizième dimanche du temps ordinaire est l’épisode où Jésus explique comment suivre ses enseignements (Luc 9, 51-62).
Le début du texte dit "Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem".
Quand la traduction dit "il prit avec courage la route de Jérusalem", littéralement, il faudrait traduire "il durcit sa face pour prendre la route de Jérusalem".
Cette expression "il durcit sa face" est un rappel du troisième chant du Serviteur (Yéchâya (Isaïe) 50, 7).
Face à la persécution, le Serviteur dont parle Isaïe dit "Je ne me suis pas dérobé... j'ai rendu mon visage dur comme pierre, je sais que je ne serai pas confondu".
Cela veut dire la détermination parce qu'il sait que D.ieu ne l'abandonnera pas, "D.ieu… tu ne peux m'abandonner à la mort ni laisser son ami voir la corruption" (Tehilim (Psaume) 15, 10).
Jésus a eu à prendre la décision de ne pas se dérober, comme dit le prophète Isaïe.
Car il est un véritable serviteur de D.ieu.
Un village de Samarie refuse d’accueillir Jésus et les disciples pour la simple raison qu'ils ont annoncé leur intention de se rendre à Jérusalem. Il y a en effet une grande hostilité qui règne depuis des siècles entre les Samaritains et les habitants de Jérusalem.
Et les disciples, alors, ont le réflexe de vouloir infliger un châtiment sévère à ce village. Ils se souviennent du prophète Elie appelant le feu du ciel sur les prophètes de Baal.
Mais Jésus qui est l'amour de D.ieu, ne peut envisager des solutions de violence et de pouvoir. Il ne le peux parce qu’il est serviteur de D.ieu.
Suivent ensuite les trois rencontres qui nous valent trois phrases particulièrement exigeantes de Jésus. Ces trois phrases dévoilent aussi le combat qu'il mène lui-même.
Lors de la première rencontre "Un homme lui dit : je te suivrai partout où tu iras. Il lui répond : Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l'homme n'a pas d'endroit où reposer la tête" .
Là il y a contradiction entre le Fils de l'homme, qui dans le livre de Daniel est un personnage glorieux qui vient sur les nuées du ciel et à qui D.ieu donne la royauté universelle, et en même temps la vie itinérante, pauvre, rejetée comme dans ce village de Samarie, que mène Jésus.
La victoire se fera dans l’humilité et la pauvreté.
Lors de la deuxième rencontre, Jésus dit à quelqu'un "Suis-moi" et l'homme répond "Permets-moi d'abord d'aller enterrer mon père".
Et Jésus reprend "Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, va annoncer le Royaume de D.ieu".
Cette phrase est surprenante dans la bouche de Jésus, Juif très pieux et respectueux de la Loi.
Le respect des parents et en particulier l'ensevelissement est très important dans la Halakha.
Jésus ne veut pas trahir la Loi mais veut dire qu’annoncer le Royaume de D.ieu et le vivre en enseignant est plus important que les rites.
Cet homme est le seul qui ne se propose pas lui-même, c'est Jésus qui l'appelle.
S'il l'appelle, c'est par amour et il l'appelle à aimer, et tout amour exige des renoncements.
Jésus veut aussi dire que lorsque deux devoirs paraissent contradictoires, le critère de choix devra être d'abord de faire celui qui mène à l'accomplissement de la mission d’annonce du Royaume de D.ieu.
Enfin, lors de la troisième rencontre, l’homme dit à Jésus "Je te suivrai, Seigneur ; mais laisse-moi d'abord faire mes adieux aux gens de ma maison".
Cela rappelle l'histoire d'Elisée qui voulait suivre le prophète Elie, mais auparavant, il voulait faire ses adieux à sa famille. Elie l'avait laissé faire, mais il lui avait fait comprendre qu'ensuite il lui faudrait savoir rompre les amarres, s'engager sans retour.
Là aussi l’homme qui voudrait suivre Jésus, demande un délai.
Et Jésus lui dit "Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n'est pas fait pour le Royaume de D.ieu".
Là encore, en nous demandant de l’imiter, Jésus nous parle aussi de lui, de ses renoncements sans retour que sa mission a exigés, du confort de la maison familiale de Nazareth à la montée à Jérusalem.
Et cela se passe au moment où il vient de prendre résolument la route de Jérusalem, vers la mort qui l’attend.