La crise économique mondiale aura pris un tournant décisif quand les États auront fait faillite. La faillite d’une entreprise entraîne sa disparition. L’État en faillite ne disparaît pas. Mais les services qu’il assure se réduisent dramatiquement : justice et forces de l’ordre privées de moyens conséquents, armée aux effectifs restreints et à l’équipement en voie d’obsolescence, versement de pensions de retraites pitoyables, services sociaux qui périclitent…
Le surendettement des États occidentaux conduira la plupart d’entre eux à la faillite. Les politiques d’austérité qu’ils mettent en place ne suffiront pas : trop peu, trop tard. Les malheurs de l’État grec ont focalisé l’attention sur l’Europe du Sud – surtout le Portugal et l’Espagne – exposée à la « contamination ». Mais celle-ci atteindra aussi des pays de première importance, comme la Grande-Bretagne et les États-Unis.
Surendettée, la Grande-Bretagne cherche 200 milliards d’euros pour boucler son budget 2010. Elle est gouvernée par une coalition instable, ce qui n’est pas de nature à rassurer les marchés financiers. La Banque d’Angleterre achète en cachette des bons du Trésor (Gilts) pour en soutenir le cours. Tout cela va déboucher sur une crise de confiance. Un krach obligataire se produira et la livre sterling dégringolera.
La Grande-Bretagne entraînera dans sa chute les États-Unis, qui sont de très loin le premier émetteur de dettes souveraines. La reprise américaine est évanescente. La consommation et l’immobilier sont en plein marasme. Freddy Mac et Fanny Mae, ces quasi-monopoles fédéraux de prêts immobiliers qui avaient bénéficié d’un sauvetage de grande ampleur, perdent toujours de l’argent. Aussi le gouvernement continue-t-il à les financer. Nombreuses sont les collectivités locales (États fédérés, villes, comtés) qui licencient ou mettent leurs salariés en chômage technique partiel. Des coupes claires sont effectuées dans les programmes d’aide sociale, les services (prisons, police, pompiers…) sont réduits.
À un moment donné, la panique sur le marché des dettes souveraines se répandra comme une traînée de poudre, faisant plonger tous les États surendettés. Les masses seront alors en état de choc. Les États les avaient persuadées de leur toute-puissance en secourant les banques. Dans les États-providence, les transferts sociaux sont présentés comme des amortisseurs de la crise. Mais lorsque les États seront en banqueroute, l’angoisse s’emparera de la psyché collective : il n’y a plus de toit au-dessus de la maison… Il en résultera des chocs électoraux et des bouleversements sociopolitiques majeurs.