Visite à une maison vide
Je suis entré. Des songes m’attendaient,
Poussières et caramel, dans le vestibule,
Et des fantômes gris,
Et des fantômes perles.
La rampe de l’escalier me chuchotait
Milles mains.
Une portes a gémi, gémi
pour me raconter les soupirs
D’une fiancée d’autrefois,
Organdi, libellule, argent,
Bougie rose, valse défunte,
Un cheval noir devant la porte,
Une épée dans les iris noirs.
Je suis entré. Dans cette chambre
Naquirent des enfants légers,
Par des aurores de jasmin,
Par des crépuscules de menthe
Je les vois glisser sur la rampe,
Je les vois danser au matin
Et cueillir des fleurs fraternelles
Et battre des ailes, des ailes
Dans la patience de l’été.
Je suis entré. Les planchers murmuraient
Des sandales et des cothurnes
Le cuir, le cygne, le vair,
Des empreintes d’or et de feu,
Et puis, j’ai vu ces pieds nus,
Cette trace incertaine et certaine,
La poudre infime d’une peine,
Le sillage d’un désespoir,
La caresse d’une espérance
Et quelqu’un s’est mis à chanter
Du haut en bas de la maison.
(Pierre Gamarra)