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Kanaval : Comment la pauvreté peut-elle créer autant de richesse ?

Publié le 23 juin 2010 par Badiejf
Pour les vacances, je fais comme les chaînes de télé, je 'repasse' les vieilles émissions. Voici donc des billets écrits dans la première année de cette aventure, avant que bagay la se fasse connaître. De retour pour vrai à la Fête du Canada, le premier juillet.
Billet publié le 28 février 2009.
Plus d’une semaine sans billet. C’est normal, c’était le Kanaval. On m’avait annoncé que tout était au ralenti durant cette période et c’est effectivement réel. En plus, trois jours sans Internet, c’est le Kanaval ! J’en ai profité pour aller voir la fête au centre-ville de PAP, le dernier soir, celui du mardi-gras. Depuis déjà dimanche soir, les haïtiens se faisaient aller le popotin dans les rues. Le mardi, la police avait annoncé qu’elle tolèrerait les fêtards jusqu’à 5h00 du matin. Le Président avait annoncé congé national pour le mercredi des cendres, question de laisser à la population le temps de se reposer des trois derniers jours. Je vous le jure que les gens en avaient besoin ! La vidéo sur ce billet a été tournée avec la fonction vidéo d’une petite caméra numérique, mais elle vous donnera une bonne idée de l’atmosphère, de la foule, de la musique et de l’état des haïtiens. Juno et Mario, deux médecins avec qui je travaille nous ont accueillis sur leur stand, un stand qui peut recevoir une centaine de personnes. En groupe, on divise le prix de la location de l’espace et la construction du stand. Sur le billet qui te donne le droit d’entrer il est écrit ‘les amis de nos amis sont nos amis’. Belle entrée en matière. Le stand s’appelle Sans-Soucis (comme le palais près de la citadelle) parce que comme dit Mario, on est sans soucis. On est arrivé sur place vers 5h30 juste avant que la foule commence à être trop compacte. Plus la soirée s’enfonçait, plus l’atmosphère s’approchait du délire. Dans la montée, Juno tout enthousiasme m’a dit en me shakant les épaules et en insistant sur chacun des mots : « C’est comme une thérapie collective !». Effectivement, du ti-moun au grand-moun (ils seraient près près de 300 000 personnes à tous les soirs), les hanches se font aller. Sur ce point, je ferai un doc Mailloux de moi-même. Les noirs ont sûrement une constitution de ligaments pas mal plus souple que les blancs. À les voir danser, on a le sentiment d’être un manche de ballet. Les bandes-à-pieds (fanfares) et les personnages costumés défilent pendant près de 5 heures. Difficile d’imaginer qu’une si grande pauvreté puisse créer autant de richesse. Après, c’est au tour des groupes de musique les plus populaires de défiler sur des chars tirés par un camion, camion qui tire également une génératrice qui crache sa fumée noire. Il doit y avoir 237 caisses de son sur chacun de ces chars. La foule devient de plus en plus folle, plus la soirée avance, plus les groupes sont hot. On est parti au moment ou Barikade Crew arrivait… le groupe hip-hop le plus populaire et autour duquel il y a une histoire dramatique au possible. Après un concert l’année dernière, une partie des musiciens dont le chanteur ont pris la route et se sont plantés dans un ravin. La blonde du chanteur s’est suicidée sur le champ en apprenant la nouvelle. Une grande messe nationale a eu lie sur Champs-de-Mars pour leurs funérailles. Le reste du groupe continue de rouler sa bosse et tous les haïtiens connaissent les paroles de leurs chansons par cœur. Quand Barikade Crew est arrivé donc, on tentait de se déplacer dans la foule pour revenir à la maison (vers 11h00). Jammé complètement dans une foule. Tes pieds ne touchent pas à terre, mais tu danses quand même. J’avais les oreilles et les yeux complètement éclatés, les oreilles par le son et les yeux par la blancheur des 200 sourires qu’il y avait dans ma bulle. Jo et moi étions accrochés à Jean-Joseph (le chauffeur) et à Elvire (sa femme). Pendant dix minutes, on a vécu un petit stress où se mélangeait le trip d’être dans une ambiance aussi intense, et la crainte d’être dans cette foule haïtienne. La violence en Haïti est toujours assise sur le bord de sa chaise, au Kanaval c’est toujours un peu risqué. À cet effet, la situation a été très positive cette année. Seulement deux personnes écrasées par les camions qui trainent les chars, et 160 blessés. Quelques arrestations à cause de batailles. Il parait que c’est une très belle année !? C’est vrai que si on compare avec le Carnaval de Rio…

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