Ce matin, il s'est levé reposé, serein et joyeux. En ce 21 juin 2010, il s'est levé avec l'espoir d'une belle journée, paisible, avec des amis, autours d'un verre, sous un beau soleil d'été. La soirée devait se passer suivant le rituel annuel de la Fête de la Musique, pendant laquelle on s'amuse, danse, boit, cette fête qui ne connait pas de fin et qui dure jusqu'au petit matin, comme si la seule limite imposée eut été celle du sommeil qui viendrait tôt ou tard les emporter. Ce matin il s'est levé confiant puisqu'il ne savait encore que sa journée n'allait pas du tout se passait comme il l'avait escomptée.
Le premier signe il le reçut de plein fouet alors qu'il ouvrit les rideaux violacés de sa chambre : à la place du bel astre brillant à son firmament qu'il espérait si fermement au dessus d'un ciel où la seule couleur autorisé eut été le cyan, il découvrait des masses grisonnantes et difformes, celles où les enfant s'amusent à trouver licornes galopantes, monstres grondants, héros de dessins animés et autres fantaisies de leur imagination si fertile; il découvrait une ville sombre, balayée ça et là d'un vent d'ouest emportant feuilles mortes, prospectus et sachets plastique d'un bout à l'autre des quartiers paisibles, où les seules bruits que l'on pouvait entendre furent les miaulements d'un chat errant qui passait là, innocemment suivant ses habitudes. La ville semblait morte. Il était pourtant déjà dix heures passées et toujours personne n'osait pointer son nez dehors. Les voitures étaient rares, les piétons plus encore.
Il prit son fauteuil et s'assit devant ce spectacle désolant. Il le regardait, impassible. Il scrutait l'horizon dans le vain espoir d'apercevoir au loin une lueur de bleu au milieu de ce gris monotone, cette lueur qui annoncerait peut-être la fin de la triste passade dans laquelle la ville était tombée.. Mais il ne voyait pas plus de lueur que d'enfants sortant de leurs maisons en se dirigeant, au pas de course, balle sous le bras, vers le parc le plus proche pour entamer une partie de football avec deux ou trois camarades.
Sortant de son sommeil, il se reprit peu à peu en main. Il se dirigea alors vers le réfrigérateur pour sortir le lait acheté la veille, prit les céréales dans le placard jouxtant et se servit un généreux bol, comme il les aime. Il se dépêchait car il avait hâte de pourvoir sortir et profiter de cette journée en faisant abstraction du mauvais temps omniprésent. Alors qu'il terminait son bol, il se dirigea d'un pas hésitant vers sa commode afin d'y choisir des vêtements propres pour ce jour spécial. Il prit un pantalon et une chemise blanche.. Mais il s'arrêta une seconde et se souvint que sa couleur préférée était le bleu. « Sa couleur », il est fait référence ici à Émilie, cette fille si singulière, si belle, si intelligente, si drôle, celle dont le bleu des yeux le fait voyager un instant vers un paradis infini si tôt qu'il a le bonheur de l'apercevoir. Il échangea alors la chemise précédemment choisie contre une autre, bleue, qui attirerait peut-être son doux regard sur lui.
L'air cliquant, frais, sûr de lui, avec une face mirobolante proposant un regard satisfait et un petit sourire en coin, il était là.. Au milieu de la rue vide de monde.. Seul avec lui-même.. C'est à ce moment là qu'il commença à se sentir mal à l'aise. Tout ceci était bien trop anormal pour que ce fut réel. Et ce n'est qu'à ce moment qu'il considéra un peu mieux les habitations à l'entour, il remarqua que plusieurs portes et fenêtres n'étaient pas fermées mais que personnes ne se trouvait à l'intérieur, comme si, pris de panique les habitants s'étaient enfuis en n'emportant que le strict minimum. Pour en avoir le coeur net, il s'avança prudemment vers une entrée choisie au hasard. Il avançait à tâtons en laçant d'une voix enrouée des « Eho » et des « Il y a quelqu'un ? » comme pour se rassurer, mais il n'attendais pas de réponses, il était déjà résigné et savait pertinemment qu'il était seul.. Il entra. Comme il faisait de plus en plus sombre dehors, il essaya d'allumer une lumière, mais rien. Il en essaya une autre, toujours rien. Il passa à la maison voisine mais elle non plus ne disposait pas d'électricité.
En sortant, il se rendit compte qu'en plus du noir, le vent s'était invité à la fête, et qu'à chaque minute qui passait il trouvait le moyen de souffler plus fort, comme si le ciel préparait quelque chose.. Une tempête ou un autre cataclysme.. Du moins, il n'avait encore jamais vu de son vivant tel ciel noir et tel vent dans cette région.. Soudain, son coeur se mit à battre plus fort, son souffle s'accéléra et il commençait à transpirer malgré la fraicheur qui s'était installée.. Il savait ce qu'il se passait.