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Des valorisations très attractives en Russie

Publié le 23 juin 2010 par Sylsol
Karine Hirn, fondatrice associée d'East Capital, maison de gestion spécialisée sur les marchés de l'Est et des Balkans, fait le point sur le potentiel des marchés de cette zone.
Le Figaro.fr / jdf.com East Capital mise en Russie, en Europe de l'Est et en Turquie. Quel sont vos récents arbitrages entre ces marchés au sein de votre fonds East Capital Eastern European Fund, qui est investi sur l'ensemble des marchés que vous couvrez ?
Karine Hirn Nous nous sommes renforcés sur la Russie, au détriment de la Turquie, qui était notre précédente conviction forte, et qui a en effet enregistré une belle progression. Mais nous estimons que les opportunités sur ce marché se tarissent, à l'exception du secteur bancaire turc, sur lequel nous demeurons surpondérés. La Turquie et la Russie constituent les premières lignes de notre fonds East Capital Eastern European Fund, pesant respectivement 12% et 62% du portefeuille. En revanche, nous gardons des positions stables en Europe de l'est. Ces pays se situent en phase de reprise et devraient revenir à la normale au cours du second semestre, certains étant plus avancés que d'autres, et quelques uns demeurant fragiles, comme la Lettonie et la Hongrie. Toutefois, les investisseurs commencent à revenir dans cette zone: au premier trimestre, l'Europe de l'est a concentré 25% des investissements des fonds émergents, alors qu'elle n'en attirait que 7% l'an dernier. Seuls les Balkans restent pour le moment à l'écart du rebond global des marchés observé au cours du premier semestre, faute de liquidités suffisantes sur le marché. Dans le contexte actuel de marchés, très volatiles, nous modifions fréquemment notre stratégie d'allocations d'actifs.
Pourquoi avez-vous accru votre exposition à la Russie ?
Ce niveau d'exposition à la Russie est un record. Le pays devrait afficher une hausse des bénéfices nets par action bien plus forte cette année que les trois autres grands pays émergents que sont la Chine, l'Inde et le Brésil. La progression attendue en Russie pourrait atteindre plus de 40%, selon le consensus, voire 80% selon les estimations les plus optimistes. Le prix des actions est très bon marché, avec un price earning ratio (PER) de 6, au même niveau qu'en 1999. La croissance de l'économie russe pourrait par ailleurs atteindre 5% cette année. Ce niveau reste inférieur aux taux de croissance que devraient enregistrer les autres grands pays émergents et à sa propre tendance historique de croissance, mais cette hausse du produit intérieur russe reposera sur des bases nouvelles, plus équilibrées. La reprise actuelle, impulsée par le plan de relance et un effet de restockage, va céder la place à une croissance fondée sur une modernisation de l'économie, qui permettra notamment de réduire sa dépendance aux cours du pétrole, et de diminuer son inflation. La transformation a déjà débuté, conformément aux exigences du président Medvedev. La consommation domestique tire d'ores et déjà la croissance russe. Elle génère en effet 74% du PIB. Les banques russes ont également surpris par leur résistance dans la crise. On estimait leur exposition aux créances douteuses à 40%, alors que les dépréciations ne se sont finalement élevées qu'à 10%.
Comment la Russie, la Turquie et les pays d'Europe de l'est sont-ils impactés par les problèmes de dettes dans les pays ouest-européens ?
Les problèmes de dettes souveraines dans la zone euro ont commencé à poser des problèmes dès le mois d'avril. Le marché ukrainien a ainsi dévissé de 27%. Les inquiétudes se concentrent sur les exportateurs: ils pâtissent de l'affaiblissement de l'euro, et voient leurs débouchés en Europe de l'ouest se réduire. Les pays d'Europe centrale commercent essentiellement au sein de l'Union européenne. La République tchèque, par exemple, enregistre 70% de son produit intérieur brut grâce aux exportations, dont beaucoup sont destinées à l'Allemagne.Les investissements directs étrangers qui affluent vers les pays est-européens fléchissent : Il n'est pas question pour le moment d'y fermer des usines, mais les projets de construction de nouveaux sites sont gelés. Troisième facteur d'inquiétude, les banques roumaines, bulgares et serbes sont très exposées à la dette grecque, et elles sont donc réellement menacées par un éventuel défaut de ce pays. La méfiance des investisseurs vis-à-vis de l'Europe de l'est est enfin accrue par les déclarations alarmistes malheureuses, comme celles du vice-président du parti au pouvoir en Hongrie, qui a pêché par manque d'expérience.
Qu'en est-il de l'endettement des pays de l'est ?
Les pays de l'est n'ont pas de problème avec leurs propres dettes. Ils ont déployé des efforts colossaux pour se désendetter lors de la période de transition économique qui a suivi la chute de l'URSS, et après la crise de 1998-1999. Cette crise, qui a conduit à la dévaluation du rouble il y a dix ans, a été bien plus grave pour l'Europe de l'est que ne l'est la crise actuelle. Des efforts drastiques ont été réalisés pour assainir les finances publiques dans les pays de la région, ce qui suscite l'admiration, y compris chez les investisseurs américains. La Russie, qui affichait alors une dette publique équivalente à 75% de son PIB, l'a réduite à 8% aujourd'hui, tout en préservant des réserves de devises d'environ 400 milliards de dollars. Et cette discipline budgétaire s'observe dans toute l'Europe émergente, qui affiche un niveau d'endettement de 40% du PIB en moyenne.
(Perrine Créquy - le Figaro - 18/06/10)

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