Le «chantier interdit aux adultes». (DR) La Cité des enfants de la Villette fait peau neuve et s'agrandit. Un nouvel espace destiné aux 2-7 ans a ouvert ses portes ce mardi, en attendant la rénovation de l'espace des «grands» l'année prochaine. Cordélia Bonal
Pendant longtemps, les enfants au musée, c'était «regarde et surtout ne touche pas». Et puis en 1986, la Cité des sciences de la Villette, sorte d'exposition-atelier géante pour les 5-12 ans, où toucher et manipuler était au contraire vivement conseillé, est venu révolutionner l'accueil du jeune public. Et même du très jeune, puisque cinq ans pus tard naissait la Cité des enfants destinée aux 3-5 ans. Vingt ans et autant de générations d'enfants après, le succès de ces deux espaces ne s'est pas démenti. Au point qu'une Cité des enfants «nouvelle génération», deux fois plus grande que la précédente, a ouvert ses portes ce mardi. Une ruche de 1 800 m2 tout en volumes et en couleurs, remplie d'éléments à toucher, à sentir, à écouter, à triturer, à empiler, à verser et renverser, de boutons à pousser, de manivelles à tourner, d'engrenages à monter.
La tranche d'âge visée s'est agrandie aux 2-7 ans, avec cette idée qu'avant «l'âge de raison», qui est aussi celui de la lecture, les enfants sont encore dans une phase d'apprentissage où la motricité prime sur le pur intellect. A cet âge là «ça imprime d'abord quand il y a du mouvement», résume Sophie Bougé, commissaire adjointe de l'exposition. Scénographes, designers, pédagogues, éducateurs et psychologues ont donc planché sur des «manip» accessibles sans avoir besoin de lire une consigne, sûres sur le plan technique, ludiques, et si possible belles à regarder.
Et ça marche. Nina, cinq ans et deux couettes brunes, trouve ça «trop bien». Consciencieuse, elle a «tout bien réussi», sauf le jeu de la reconnaissance des odeurs: un sans faute pour le citron et la pomme, mais pour la banane, rien à faire, «ça sentait le caramel». Dans l'espace «émotions», Kevin, petit casse-cou de quatre ans, n'a «même pas eu peur» dans la pourtant bien nommée «cabane de la peur», et ressort tout sourire de la «cabane de la tristesse».
Plus loin, dans la pénombre, le grand tableau phosphorescent où l'on écrit avec des stylos lumineux fait un tabac. Guridjia, cinq ans, entreprend de dessiner «une fleur avec un cœur et une petite fille».
Au fil d'un parcours qui se veut libre et foisonnant, on trouve, en vrac, des carrés de matière à toucher, un grand igloo gonflable dans lequel souffle le vent, des miroirs renvoyants des images déformées, un parcours labyrinthique semé d'embûches, des lettres parlantes, un circuit d'eau avec écluses, barrages et pompes. Les incontournables de la Cité précédente, comme le «chantier interdit aux adultes» et le garage avec sa voiture à démonter, ont été conservés après avoir reçu un sérieux coup de neuf.
Au rayon nouveauté, une place plus importante a été laissée à l'imaginaire et à l'esthétique. Ainsi ce cirque empreint d'onirisme où voltigent pantins et automates, et dont les ombres dansent sur les murs.
Certaines idées probantes sur le papier se révèlent plus laborieuses à l'usage, les enfants s'ingéniant à détourner les éléments de leur fonction première. Le grands pions verts et rose dans lesquels les enfants auraient dû retrouver des objets dissimulés se sont ainsi vite transformés en colonnes à escalader. Au bout d'une heure, les pions commençant à vaciller sur leur base, le stand doit fermer.
Les concepteurs se donnent environ trois mois pour évaluer ce qui marche ou non, et modifier des éléments s'il y a lieu. Avant de s'attaquer l'année prochaine à la «Cité des grands», soit celle des 5-12 ans, qui fera à son tour peau neuve.
Par http://www.liberation.fr/