« Votre achat remboursé si la France remporte la Coupe du Monde». Telle était la promesse d’enseignes et de fabricants il y a quelques mois… autant dire qu’ils ont eu du nez !
La licéité de cette offre promotionnelle semble néanmoins soulever des problématiques au regard de la législation en vigueur en matière de loteries.
Le régime juridique des loteries est organisé par un texte certes ancien, mais assez souple pour permettre à la jurisprudence de tenir compte des évolutions des techniques promotionnelles. Le principe général est ainsi posé par la loi du 21 mai 1836 qui énonce que «les loteries sont prohibées». La jurisprudence a néanmoins dégagé les critères permettant aux annonceurs de proposer des loteries commerciales pour promouvoir leurs produits ou activités dans le respect de la loi de 1836.
Ainsi, le délit de loterie prohibée est constitué si quatre conditions cumulatives sont réunies :
- L’espérance d’un gain. Dans le cas de l’offre en question, il s’agit du remboursement d’un bien ;
- - Une publicité ;
- - L’intervention du hasard. En l’occurrence, l’équipe de France doit remporter le Mondial 2010 ;
- - Une participation financière du participant. Les consommateurs doivent acheter un bien pour participer à la loterie.
Ainsi, pour que la loterie soit licite, il suffit qu’un des éléments susmentionnés fasse défaut. Celle-ci ne sera pas prohibée si, par exemple, le hasard intervient dans la détermination du résultat mais que la participation est gratuite.
En pratique, selon la DGCCRF, la majorité des loteries mises en place sont licites et les sanctions prononcées par les tribunaux se fondent, la plupart du temps, sur des textes généraux du droit de la consommation (article L. 121-1 et s du Code de la consommation) ou du droit commun de la responsabilité délictuelle lorsque la présentation crée une fausse espérance constitutive d’un préjudice (C. Cass, 1ère Civ, 9 nov. 1999 et 19 octobre 1999).
Soucieuse de trouver un juste équilibre entre protection du consommateur et exercice d’une concurrence loyale, la Cour de Justice des communautés européennes, dans un arrêt rendu en date du 14 janvier 2010, a jugé contraire à la directive européenne du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales une législation nationale (allemande en l’espèce) qui prévoit une interdiction de principe des concours ou des jeux promotionnels avec obligation d’achat.
Ce type de loterie n’étant pas visé à l’annexe I de la Directive de 2005 listant de manière exhaustive les pratiques commerciales réputées déloyales, la législation allemande n’avait pas à l’interdire.
Par conséquent, conformément à cette jurisprudence et à l’avis émis par la DGCCRF sur ce point, la licéité des loteries doit dorénavant être appréciée au regard des dispositions de l’article L. 120-1 du Code de la consommation qui énoncent que
“Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service“.
Peut-on considérer que le consommateur aurait dû être informé du fait qu’il existait de grands risques que son bien ne lui soit jamais remboursé?! La question se pose…
Références:
- Arrêt CJCE du 14/01/2010; n° C-304/08; -Voir le document