Pour une fois, je ne parlerai pas de moi, ni de mon cheveu. Ni du votre, du reste ! « Moi et mon cheveu » est le nom de la nouvelle qui a remporté le prix Mark Twain, organisé par l’ambassade US à Kinshasa (RDC), écrite par Bibish Marie-Louise Mumbu. C’est l’histoire d’une femme, plaquée pour une plus jeune, parce que son homme et elle ne sont pas de la même tribu (version officielle). Donc vengeance et la vengeance passera par une nouvelle coiffure. Une bonne partie de la nouvelle nous livre l’ambiance qui règne dans un salon de coiffure pour dames, un temple des tresses, greffes et autres rajouts, où les rivalités vont bon train. A lire sans attendre sur www.africultures.com, après ce petit extrait, juste pour le plaisir :
« Bref. Je sors donc de mes rastas. J’ai été chez Bégonias pour me faire faire les soins dimanche dernier, j’ai passé 5h au salon ! Fort heureusement pour moi, c’était un dimanche. Y a moins de monde. Et aujourd’hui, je suis ici. Africa Rasta fait plus office de salon de tresses que de salon de coiffure. Ses clientes ? Elles viennent de partout et trouvent tout sur place. Alors bonjour les conversations ! Celles que je préfère, moi, en termes d’histoires, c’est les conversations visuelles. La 1,80 mètres assise là, avec ses lunettes de star et son pantalon taille basse, est la cliente qui a appelé il y a quinze minutes. Elle vient des States. Venue pour les vacances, on lui a parlé de l’endroit. Pas la boite de nuit au centre-ville qui s’appelle l’Endroit, non, je parle du salon de coiffure. Elle a trop chaud, elle veut une bouteille d’eau minérale « Canadian pure » et pas de l’eau pure en sachet surtout, elle insiste. Elle le dit au gamin qu’elle envoie dans un lingala approximatif, un peu francisé et dans un ton américanisé. « Eau minérale hein, kozua eau pure té stp ! » Elle ne voudrait sûrement pas ramener des maladies congolaises au pays de l’oncle Sam… Je souris discrètement dans mon coin, perchée sur mon tabouret et entre les mains expertes de ma coiffeuse, elle me fait un tissage. La petite mince dans son boubou, elle, habite juste à côté on dirait. C’est elle qui est passée tout à l’heure en voiture avec ce type qui l’a descendue, petite jupe et talons, de sa grosse Jeep vert olive. Un gars de l’armée, qui sait ? Là, elle vient de se changer… Elle toise la « Statoise », et siffle, elle, le petit vendeur d’eau pure. « Mibale, petit, moyi eleki ! Deux sachets, petit, le soleil tape fort ! » Et vite, sans stade ni arbitres, se profile à l’horizon deux camps et commence alors un duel sans raison dans ce salon de coiffure. Un délicieux match, dis donc. Les « Bana mboka », enfants du pays, contre les « Diaspora », ceux qui se sont exilés. Eau pure en sachet contre Eau minérale en bouteille. Saison des pluies contre Hiver. Resté contre Parti. À pied contre En voiture. Boubou contre Pantalon taille basse. Un truc sans tête ni queue quoi ! Bon, installée sur mon tabouret, laissant faire ma coiffeuse, je suis prête à suivre la partie… »
cheveux, salon de coiffure