Milieu du XXIéme siècle : l’Humanité habite une planète Mars aménagée et terraformée grâce aux robots. Le détective Ross Sylibus y est transféré après une agression sur Terre par un robot dysfonctionnant et il garde depuis une haine viscérale pour ces machines. Ce qui cadre bien avec Mars car elles y sont très dépréciées à cause du chômage qu’elles causent. Mais un robot est impliqué dans la première affaire de Sylibus : Kelly Mac Cannon, star de la country, est assassinée – mais pas par un robot, car c’est elle le robot…
Faisant équipe avec Naomi Armitage, une jeune flic à l’attitude rebelle, Sylibus écope de l’enquête qui se complique quand d’autres femmes, elles aussi robots, sont tuées à leur tour. Hors, il se trouve que ces robots sont des Thirds, c’est-à-dire capables de ressentir des émotions comme les êtres humains. Au cours de l’enquête, les deux flics découvrent une conspiration dont ils deviennent des cibles, surtout lorsqu’il s’avère qu’Armitage elle-même est aussi une Third…
Difficile de parler de robots sans évoquer le Docteur Asimov, surtout quand l’histoire est une enquête policière et d’autant plus que la ville servant de décor semble profondément enracinée dans le sol martien – ce qui ne va pas sans évoquer les romans policiers-SF du « Bon Docteur« , et notamment Les Cavernes d’acier. Plus original : là, c’est le robot la victime au lieu d’être le « complice » du crime. Passés ces détails, il n’y a plus vraiment de comparaison possible : le récit est articulé autour du ressort narratif de la « baston du jour » (les événements convergent tous vers un ultime combat qui constitue le principal du quota d’action de l’épisode) et décrit une société martienne où les robots en général servent à tout et surtout à n’importe quoi pour le plus grand bonheur de leurs maîtres souvent dérangés.
Un peu vite catalogué au rayon cyberpunk à mon avis, l’anime propose tout de même quelques incursions dans le cyberespace – dont au moins une vue de l’intérieur – et des complots gouvernementaux à grandes échelle qui ne vont pas sans rappeler X-Files. Dépourvu de métaphysique – ou assimilé – à propos des relations de l’Homme à la machine, Armitage III est globalement plutôt orienté shônen. On y trouve néanmoins quelques interrogations, même si assez sommaires, qui illustrent bien cette schizophrénie typique d’un Japon qui s’oriente de plus en plus vers le développement robotique – notamment pour prendre en charge les personnes âgées – afin de palier au corolaire de sa décroissance démographique mais qui n’en semble pas plus heureux pour autant.
Bien que satisfaisante pour une OVA, la qualité d’animation est inégale d’une séquence à l’autre et la narration parfois rendue difficile à suivre par des blancs, voire des incohérences. Les designs sont dans l’ensemble originaux et intéressants mais manquent de l’esprit délirant d’un Bubblegum Crisis ou de la noirceur d’un AD Police Files, même s’il y a de très bons passages ici et là. La musique, un peu trop synthétique et rythmée à mon goût, cadre assez bien à l’ambiance tout en sachant rester discrète mais l’ambiance sonore reste globalement sous-exploitée et à des années-lumières de ce qu’un Blade Runner proposait déjà plus de 10 ans auparavant…
C’est donc une production sympathique et sans prétention, qui trouve son inspiration dans des œuvres classiques de la science-fiction littéraire tout en sachant s’en démarquer – au moins pour les plus anciennes d’entre elles – mais sans pour autant amener la réflexion au niveau supérieur – ce qui n’est pas un défaut pour tout le monde. L’idéal pour meubler une longue soirée d’hiver, avec ou sans poteaux.
Notes :
Cette OVA servit à créer Armitage III – Poly Matrix, film de compilation regroupant les séquences principales des quatre épisodes de cette OVA et augmenté de nouvelles scènes.
Le nom d’Armitage est tiré du roman Neuromancien de William Gibson, un des principaux ouvrages fondateurs du mouvement cyberpunk.
C’est un manga de Chiaki J. Konaka qui servit de base à la création de cette OVA.
Armitage III, Hiroyuki Ochi, Yukio Okamoto, Satoshi Saga & Takuya Sato, 1995
Kaze, 2003
4 épisodes, env. 20 € les deux coffrets (occasions seulement)