A l’heure ou la laïcité est plus que jamais un combat, je reproduis un excellent éditorial de Caroline Fourest, que j’espère on verra bientôt dans une de nos communes
Caroline Fourest
“L’extrême droite est ravie. Cet “apéro géant saucisson et pinard” interdit, quel pain bénit ! Ce n’est plus l’happy hour, c’est buffet gratuit !
Au moins dix apéros du même tonneau se profilent. Et, contrairement à ce que clament ses gentils organisateurs, ils n’ont rien de “convivial”…. See More
Nous sommes bien dans la tradition de la soupe au cochon et autres manifestations pensées pour flatter le rejet des musulmans. L’appel a été lancé conjointement par des groupes identitaires et un petit groupe d’ultralaïques, Riposte laïque, dont la dérive n’a surpris personne.
Ces derniers militent moins contre les intégrismes, au nom de la laïcité, que contre l’ “islamisation” au nom de l’identité nationale. Une sémantique qui les a coupés des laïques antiracistes, avant de les rapprocher des ultranationalistes… Qu’ils admirent Eric Zemmour, Marine Le Pen, Philippe de Villiers, Batskin ou le Bloc identitaire. Bien que marginales, ces alliances préfigurent un populisme d’un genre nouveau, façon Geert Wilders aux Pays-Bas ou l’Union démocratique du Centre en Suisse.
Ce populisme marque des points partout où des élus cèdent au communautarisme et à l’intégrisme. C’est le cas lorsque certaines villes de France acceptent que des groupes religieux – juifs ou musulmans – puissent dresser des barrières et bloquer la circulation : pour la sortie d’une école religieuse ou pour prier en plein air. Pas toujours par manque de place. A Saint-Denis, par exemple, les militants de l’association Tawhid prient en pleine rue, alors que leur local permet d’accueillir les fidèles à l’intérieur. On imagine l’exaspération des habitants qui vivent autour. Surtout lorsqu’ils sont d’origine algérienne et repèrent ce manège prosélyte.
En Algérie aussi, les militants du Front islamique du salut (FIS) marquaient leur territoire en priant dans la rue… Ce n’est pas si loin. La mosquée qui annexe la rue Myrha, dans le 18e arrondissement de Paris, a justement été dirigée par l’un des cofondateurs du FIS. En 1995, il sera assassiné devant sa mosquée. On soupçonne le Groupe islamique armé d’avoir voulu lui faire payer sa volonté de négocier avec le pouvoir algérien.
Depuis, son successeur a trouvé un arrangement avec le commissariat de son quartier, qui tolère la prière en plein air. L’accommodement devait être provisoire. Il dure depuis dix-sept ans. Sans qu’aucun préfet s’y oppose.
Laïcité positive
Daniel Vaillant, maire du 18e arrondissement de Paris, ne voit pas le problème. Il a demandé que l’on interdise “l’apéro saucisson”, mais assume “ne pas demander au préfet de police d’interdire physiquement ces prières dans la rue”.
Le temps que la Mairie de Paris inaugure un Institut des cultures d’Islam : 4 000 mètres carrés. But non avoué ? Offrir une immense salle de prière.
Ce qui est censé tout résoudre, mais contourne la loi de 1905. Le maire du 18e y voit la preuve d’une “laïcité positive”, la même que celle souhaitée par Nicolas Sarkozy. La gauche hurle pourtant lorsque la mairie de Bordeaux installe un groupe intégriste dans une église désaffectée… Allez comprendre.
Le pire, c’est que ces arrangements avec la loi de 1905 ne vont rien résoudre. Il existe déjà 75 mosquées à Paris, dont certaines sont loin d’être bondées. La Mosquée de Paris s’est dite prête à accueillir les fidèles de la rue Myrha. Mais, allez savoir pourquoi, ses fidèles préfèrent prier en plein air à la Goutte-d’Or… bien qu’ils ne soient pas tous du quartier.
Qui pourra les obliger à prier dans la salle construite par la République ? Que fera la mairie lorsque des prêches douteux résonneront dans ces murs ?
Que dira-t-elle aux contribuables si les prières reprennent dans la rue, malgré les millions injectés dans l’Institut des cultures d’Islam ? Elle pourra toujours plaider sa bonne foi, de nombreux citoyens n’écouteront plus… que les sirènes de l’extrême droite. Et le populisme antimusulman se portera mieux que jamais.
Caroline Fourest (Sans détour)”
David Dornbusch