Élire une équipe municipale n’est pas un acte politiquement neutre

Publié le 21 juin 2010 par Lecriducontribuable

Naguère, une expression avait été inventée : « le communisme municipal ». Ce dernier avait pour but d’obtenir le comportement docile des électeurs « reconnaissants ». Ainsi, tout en désapprouvant leur engagement politique, les électeurs admettaient le fait que ces équipes géraient plutôt efficacement leur commune. Pour cette raison, ils leur accordaient quasi-indéfiniment la direction de la commune, alors qu’ils les abandonnaient lors des consultations nationales.

Certes, ces dirigeants exprimaient leur foi sur les tréteaux, mais ils n’engageaient pas obligatoirement leurs communes dans des opérations strictement politiques. Quand il fallait respecter des consignes nationales ou internationales impératives telles que l’appel de Stockholm, le désarmement de l’occident, le soutien sans limite de l’URSS…, ils le faisaient, mais la plupart des administrés restait impassible, estimant que leur rhétorique inutile était le prix à payer pour disposer de « bons » gestionnaires.

Les temps ont-ils changé ? Oui, si l’on considère que le nombre des communes dans lesquelles s’exerce « un communisme municipal » a diminué. Non, lorsqu’on observe qu’elles répondent, comme autrefois, sans barguigner aux mots d’ordre tels que la critique « primaire » du système capitaliste. Non encore, car la loi de décentralisation a accru le pouvoir des maires et « qu’ils osent tout », sollicitant les textes officiels pour se prévaloir de compétences qu’ils n’ont pas.

Récemment, de nombreuses communes ont adhéré à une association (ATTAC : association pour une taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens) dont la doxa est l’anticapitalisme. Cette adhésion permettait de financer un compagnon de route, ou une succursale. Mais la route fût brève, car deux tribunaux administratifs (Marseille et Poitiers) annulèrent ces délibérations d’adhésion.

De même, lorsque les Etats-Unis décidèrent de la guerre en Irak, la justice administrative condamnât les communes qui avaient exprimé les opinions de leurs dirigeants par des insertions dans la presse, insertions faites évidemment aux frais de leurs contribuables.

En 2005, une commune espérait subventionner le voyage d’une délégation à New-York. Cet espoir fût bref car le préfet, averti par les contribuables, la pria d’abandonner le projet. Mais, comme « ils osent tout », le maire de cette commune tente, aujourd’hui, la même irrégularité : l’inscription, au budget de sa ville, des frais d’inscription, de séjour et de voyage à New-York, pour lui-même et l’un de ses collaborateurs, afin de  « participer(sic) à la 8ème conférence de révision du Traité de Non Prolifération Nucléaire, à l’ONU, au mois de mai 2010 ». Pourquoi ne pas tenter, si l’opposition reste coite devant l’évidence de l’illégalité de cette décision et si, par hasard, elle échappe à la vigilance des contribuables ?

Ces faits ne sont pas anecdotiques, lorsqu’on sait la persévérance de ces communes à subventionner, les congrès et les déplacements des associations politiques conformes à leurs convictions. Le plus souvent, le but final de ces actions est masqué, à telle enseigne que les administrés sont découragés de recourir auprès de la justice administrative, avec pour conséquence la passivité à la fois de nos concitoyens, des élus minoritaires et des services préfectoraux du contrôle de légalité.

Tenant compte de cette passivité, ces communes oublient délibérément l’exigence d’une stricte neutralité politique des collectivités territoriales. De plus, nous  ne reprochons pas à ces dirigeants leurs opinions politiques, même si les nôtres peuvent être opposées, mais, quant à nous, nous les exprimons à nos frais et pas à ceux de la collectivité.

Ainsi, l’Association des contribuables d’Aubagne, par un jugement du 27 avril 2010 du tribunal administratif de Marseille, a obtenu l’annulation d’une délibération ayant pour effet une « prise de position dans un conflit de nature politique » (conflit militaire à Gaza) en octroyant une aide humanitaire à un seul des deux belligérants. Le jugement précisait : « qu’au surplus, il résulte de l’intervention du maire de la commune de… préalable à l’adoption de la délibération litigieuse que celle-ci procède directement d’une prise de position de la majorité municipale dans un conflit de nature politique »Dit autrement : « chassez le naturel, il revient au galop ».

Nous pourrions nous croire protégés contre les incartades de ces dirigeants grâce à la loi qui prévoit le contrôle a posteriori des délibérations et des décisions des collectivités territoriales par les services préfectoraux. Mais ces derniers manquent de vigilance ou manifestent une incontestable indulgence. Ils restent inertes malgré les protestations nombreuses des associations de contribuables.

Or, tous nos recours ont abouti à l’annulation des délibérations contestées, et chaque fois nous avions sollicité au préalable le préfet aux fins de la procédure dite du « déféré sur demande » auprès du tribunal administratif et, chaque fois, cette demande a été refusée.Aurions-nous plus de compétence en droit administratif que les représentants de l’Etat ?

En définitive,  nos suffrages pour l’élection d’une majorité municipale ne doivent pas échapper à l’aune de nos convictions.


Gabriel Lévy, de l’Association des contribuables d’Aubagne