Par Julie Cadilhac - BSCNEWS.FR / "Une fête pour le coeur et l'esprit" ( Nicolas Briançon)
Décidément le Printemps des Comédiens 2010 nous aura donné de bien agréables moments de théâtre! La palme de l'excellence revient cette année à La Nuit des Rois de Shakespeare mis en scène par Nicolas Briançon. 2h50 qui passent à toute allure en compagnie de la délicieuse traduction de Jean- Michel Déprats, des décors so british de Pierre-Yves Leprince et des lumières ( récompensées d'un Molière) de Gaëlle de Malglaive. En effet, avant que de louer la mise en scène enlevée et la qualité du jeu des acteurs, il semble bon de féliciter le travail des travailleurs invisibles sur le plateau mais dont le talent vient ici sublimer le mot et le geste.
Dans cette comédie permissive, Sara Giraudeau, en Viola travestie en Césario, est lumineuse. Véritable électron de sensibilité et d'énergie, elle inonde le plateau de son timbre de voix singulier . Ce premier rôle contrebalance un duc Orsino mélancolique et un peu en demi-teinte. Le frère jumeau disparu (Thibaut Lacour), par contre, a tous les charmes de sa soeur de rôle et interprète un jeune premier romantique adorable. Mais surtout cette Nuit des Rois est une toccata de rebondissements tordants grâce à une distribution brillante des rôles des serviteurs et autres compères qui jouent en sous-main une deuxième partition , une comédie truculente où une bande de joyeux coquins machinent une vengeance punitive à Mavolio ( Henri Courseaux, Molière 2010 pour un second rôle) , l'intendant pédant et zélé qui est amoureux de sa maîtresse Olivia ( la piquante Chloé Lambert) . Une salve d'applaudissements donc pour Yves Pignot (Sir Toby) aussi éméché que de mèche avec la malicieuse Maria , Sir André ( Jean-Paul Bordes) gentleman efféminé et couard, Maria ( Emilie Cazenave) et le fou philosophe ( Arié Elmaleh).
Un clin d'oeil de surcroît à la mise en scène de l'Acte II scène 5 de Nicolas Briançon qui donne à l'aparté toute la mesure de sa dimension comique! Tant pis pour ceux qui auront râté ça, c'est une faute théâtrale impardonnable!
Et puis, enfin, il faut rendre à Shakespeare ce qui est à Shakespeare: La Nuit des Rois est un texte tout aussi superbement poétique que profondément contemporain,les situations sont d'une drôlerie friponne, les personnages haut en couleurs, les caractères trempés, l'écriture bouleversante et universelle... où l'amour respire depuis plus de quatre cents ans avec autant d'ardeur que de fraîcheur étourdissante.
Crédit-Photo: Marie Clauzade
...La nuit des rois sera jouée encore aux estivales de Perpignan ! N'hésitez pas!