Jusqu'aux années 60, la bande dessinée vivait bien tranquillement avec ses genres bien rangés : on avait le cow-boy, l'explorateur, l'astronaute, le reporter, le détective, la bande de gosses, l'aviateur, le pilote de course, etc. Seulement, dans ces années-là, commencent à s'animer des clubs d'amateurs et de collectionneurs à la recherche de leurs lectures d'enfance. Et cette nostalgie recoupe aussi la republication des grands feuilletons populaires du XIXe s. ou du début du XXe s. dans les tout nouveaux clubs du livre. On redécouvre Fantômas, Chéri-Bibi, Arsène Lupin, Rouletabille, Judex. Les années soixante sont rétro. C'est un premier aspect.
Un autre fait, c'est que la bande dessinée cherche à devenir adulte et qu'elle commence à pratiquer le second degré en France. Pour ce faire, elle a besoin d'un anti-modèle : Goscinny parodie l'histoire de France, les Mille et Une Nuits, le far-west, que reste-t-il ? Eh bien l'origine même de la BD de ces magazines : le roman-feuilleton !
On a cette forme de parodie dans Ténébrax dont j'ai déjà parlé. Mais l'action de Ténébrax est contemporaine. Lob fera ensuite avec Pichard une parodie située plus dans la Belle Epoque avec Blanche Epiphanie, mais je réserve cela pour un autre billet sur le rétro réaliste. En tout cas, la bande dessinée a eu besoin à partir du milieu des années soixante de se créer un nouveau genre qui ne pouvait être auparavant : il n'y avait pas assez de distance temporelle.
Ce qui est remarquable au sujet de ces bandes dessinées rétro, c'est qu'elles ont commencé toutes dans le registre comique et autour de quelques auteurs, dont un surtout : Hubuc, pseudonyme de Roger Copuse. Ce dessinateur et scénariste a publié dans , mais il est totalement oublié et il n'a eu que très peu d'albums, non réédités par ailleurs. C'est injuste, car il s'agit d'un dessinateur au style simple et efficace. Sa carrière a d'ailleurs été fort courte : il est mort prématurément. Là, il dessine sur un scénario de Fred. On a affaire à une sorte de mini-album à découper et relier comme c'était le cas dans Spirou, mais au format A5. Cela formait une brochure de 8 pages.
Les couleurs et le style des caractères sont psychédéliques (on est dans les années 60, ne l'oublions pas), mais aussi Modern Style. C'est la rencontre de deux univers. Dans la collection de l'Aéromédon populaire, on trouvait Bombax, mais aussi Mandrax le roi de la magie, Tarsinge l'homme zan. Hubuc écrira aussi Wilbur et Mimosa pour Guilmard dans une thématique un peu similaire, mais cette fois en parodiant les expéditions sportives du début du XXe s. Ce que l'on voit dans ces bandes dessinées, c'est le traditionnel couple des récits d'aventure : un savant ou un explorateur et son assistant. C'est une formule que Fred réutilisera dans Timoléon, mais aussi Hubuc dans Wilbur et Mimosa. Disons simplement que c'est le modèle de base de tous les feuilletons.
Maintenant, nous allons terminer par un jeu :
1) Que veut dire aéromédon ?
2) Yoyoteur est-il d'époque ?