Il n'est pas possible de passer un bail commercial sur un bien dépendant du domaine public :
Vu l'article L. 145-2, I, 3° du Code de Commerce, ensemble l'article L. 145-1 du même code ;
Attendu que les dispositions du chapitre V du livre premier du code de commerce s'appliquent aux baux d'immeubles ou de locaux principaux ou accessoires, nécessaires à la poursuite de l'activité des entreprises publiques et établissements publics à caractère industriel ou commercial, dans les limites définies par les lois et règlements qui les régissent et à condition que ces baux ne comportent aucune emprise sur le domaine public ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 janvier 2009), que par acte notarié du 1er mars 1977, le maire de la commune de Palavas-les-Flots a consenti aux époux X... un contrat d'amodiation pour divers lots du centre commercial installé sur l'esplanade portuaire et que par le même acte, les époux X... ont acquis les lots en cause de la société Les Marines du Prévost, amodiataire de la commune pour la construction du centre commercial ; que par acte notarié du 17 avril 1977 puis par acte sous seing-privé du 14 mars 1983, un bail commercial a été conclu entre les époux X... et la société Le New Port ; que le bail a été renouvelé en 1992, avec fixation judiciaire du loyer, puis en 2002, le juge des loyers commerciaux étant de nouveau saisi ; que les bailleurs ont délivré à la preneuse le 27 avril 2006 un commandement d'avoir à respecter les clauses du bail et de remettre les lieux en état et que la société Le New Port les a assignés en nullité des commandements ;
Attendu que pour constater la résiliation du bail commercial en application de la clause résolutoire visée au commandement du 27 avril 2006, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la société Le New Port occupe les lieux depuis le bail initial du 12 avril 1977 qui rappelle le droit d'amodiation en vertu duquel les époux X... donnent les locaux à bail, que la société Le New Port connaissait donc l'existence de ce contrat d'amodiation, que c'est en connaissance de cause que le contrat de bail commercial a été conclu et qu'il est loisible aux parties de soumettre leurs rapports à la législation afférente aux baux commerciaux dès lors que cette législation n'est pas opposable aux autorités ayant consenti le contrat d'amodiation aux époux X... ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les parties ne peuvent choisir de soumettre leurs relations locatives au statut des baux commerciaux lorsqu'elles portent sur des biens appartenant au domaine public, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux X... à payer à la société Le New Port la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour la société Le New Port.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les dispositions relatives aux baux commerciaux sont applicables, et en ce qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire au profit du bailleur et prononcé la résiliation du bail,
AUX MOTIFS QUE le contrat de bail du 14 mars 1983 fait la loi des parties et contient l'énoncé d'une clause résolutoire en cas d'inexécution de l'une des clauses du bail, que le preneur s'est engagé à n'apporter aucun changement sans l'accord écrit du bailleur, que l'autorisation donnée en 1995 portait seulement sur une cloison ; que la SARL LE NEW PORT ne démontre pas que les travaux reprochés soient en rapport avec une injonction de l'autorité publique ; que l'étude de la nouvelle cuisine par FERRIER CONSULTANT ne démontre pas que la réglementation applicable rendait obligatoire l'ensemble des travaux entrepris reprochés par le commandement du 27 avril 2006 ; que l'avenant au bail du 14 mars 1983 permet l'ouverture entre les lieux loués et le local voisin et transfère simplement sur le locataire la charge des travaux de mise en conformité des cuisines aux normes applicables ; qu'il n'est pas démontré que les travaux réalisés étaient rendus nécessaires par la seule nécessité de la mise en conformité de la cuisine ; que le commandement du 27 avril 2006 relève que la cloison derrière laquelle se trouvait la plonge a été déplacée, que les cloisons délimitant les WC ont été supprimées, que les 2 WC existants ont été supprimés de même que le lavabo, que la douche a été supprimée, que la cloison qui existait en partie arrière, à l'emplacement de la réserve a été déplacée d'environ 1 m, qu'une ouverture a été pratiquée dans cette cloison afin de permettre le passage à un local poubelle, qu'au surplus les anciens WC et lavabos ont été aménagés en cuisine ; que le rapport Z... et le rapport Y... établissent sans contestation sérieuse la réalité des modifications opérées, à partir d'une surface initiale au sol approximative de 116 m ² ; que si la SARL LE NEW PORT a pris sur elle de procéder à une ouverture avec le local voisin et d'agrandir de façon importante la surface de la salle de restaurant, ce qui l'a conduit, pour se mettre aux normes, à créer une cuisine plus importante en surface, il n'en demeure pas moins que la genèse de ces modifications a résidé dans la volonté d'agrandir la salle de restaurant, et que les bailleurs comme la Cour n'ont pas été rendus informés des prescriptions administratives rendant obligatoires les travaux entrepris qui, en réalité, ont consisté à joindre l'exploitation de deux fonds sur le seul fondement de l'autorisation conférée par l'avenant au bail du 14 / 03 / 83 qui permet seulement l'ouverture entre les deux fonds selon des modalités dont rien n'indique qu'elles aient été suivies d'effet ; que la réimplantation de WC au sein de la cuisine remaniée à la suite du commandement antérieur ne caractérise pas la remise en état global exigée par ce commandement ; que les modifications intervenues entre le plan d'origine sur lequel les parties se sont accordées lors de la réunion d'expertise et celui établi en mars 2007 sont patentes et correspondent aux descriptions reprises au commandement du 27 avril 2006 ; que les arguments de la SARL NEW PORT ne permettent ni d'annihiler ni de reporter les effets de la constatation de la clause résolutoire ; que la SARL NEW PORT occupe les lieux depuis le bail initial du 12 / 04 / 77 qui rappelle le droit d'amodiation en vertu duquel les bailleurs ont consenti à bail ; qu'à l'évidence le droit d'amodiation est donc connu depuis 1977 par la SARL NEW PORT, entité juridique et personne morale qui bien évidemment est distincte de ses dirigeants successifs ; qu'il était parfaitement loisible aux parties de soumettre leurs rapports à la législation afférente aux baux commerciaux ainsi que cela résulte expressément tant du bail de 1977 que de celui de 1983, dès lors que cette législation n'est pas opposable aux autorités ayant consenti le contrat d'amodiation à M. X... le 1 / 03 / 77 ; que les époux X... n'ont jamais renoncé de façon expresse à l'exercice de leurs droits conférés par la clause résolutoire, et n'ont jamais manifesté la volonté non équivoque d'y renoncer ; que cela ne résulte ni de l'autorisation strictement définie d'ouvrir une communication avec le SKIPPER et de démolir une seule cloison, ni de l'accord intervenu pour le transfert sur le locataire de la charge de la mise en conformité de la cuisine louée aux normes administratives ; que jamais le locataire n'a été pour autant dispensé de solliciter l'autorisation de démolir, de construire ou de changer la distribution, comme il y a procédé unilatéralement sans pouvoir, y compris à ce jour, se prévaloir d'une quelconque injonction administrative ; qu'aucune renonciation ne s'évince par ailleurs de la façon non équivoque de l'action en déplafonnement de loyer, dans le cadre de l'instance pendante en fixation de loyer renouvelé ; que si le bail n'est pas résilié, les bailleurs entendent exercer les droits résultant selon eux dans cette hypothèse des aménagements opérés ; que l'argumentation du locataire n'aurait de portée que si le bailleur avait poursuivi et obtenu la fixation d'un loyer tenant compte, à sa demande, des aménagements opérés, dont au demeurant, il n'a jamais admis, dans le cadre de la procédure en sursis, les avoir autorisés (arrêt p 6 dernier § à p 10 § 4) ;
1°) ALORS QUE le statut des baux commerciaux ne s'applique pas aux conventions ayant pour objet des biens situés sur le domaine public maritime, que les époux X... titulaires d'un contrat d'amodiation consenti par le maire de Palavas Les Flots le 1er mars 1977, ne pouvaient pas consentir de bail commercial à la SARL NEW PORT, et ne peuvent donc se prévaloir à l'encontre de cette dernière d'aucune infraction au statut des baux commerciaux, qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaqué a violé l'article L 145-2 II du code de commerce ;
2°) ALORS QUE (subsidiairement) des travaux avaient été autorisés par le bailleur par deux fois, par échange de courriers des 20 et 24 juin 1995, puis par un avenant à effet de janvier 1998, dans lequel en contrepartie d'un loyer porté à une somme de 8 000, 00 F H. T. par mois, le bailleur avait autorisé le preneur à procéder à une ouverture entre le local objet du bail et le local voisin occupé par l'entreprise SKIPPER, l'avenant précisant en outre que la SARL LE NEW PORT s'engageait à faire procéder à ses frais à tous les travaux de mise en conformité des cuisines aux normes applicables ; que dans le commandement en date du 27 avril 2006, le bailleur demande une remise en état des lieux par référence à un constat du 12 avril 2006 auquel est annexé un plan correspondant à la situation d'origine de 1977 et 1983 avant toute réalisation de travaux autorisés, que la Cour d'appel de MONTPELLIER qui, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire, s'est bornée à relever que les modifications intervenues entre le plan d'origine reconnu par les parties devant l'expert Y... et celui établi en mars 2007 sont patentes et correspondent aux descriptions reprises au commandement en date du 27 avril 2006, en omettant de tirer les conséquences qui s'évinçaient des autorisations données par le bailleur qu'elle relevait par ailleurs, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 145-41 du code de commerce,
3°) ALORS QUE (subsidiairement) en omettant de répondre aux conclusions de la SARL LE NEW PORT qui faisaient valoir qu'outre les effets des autorisations données dont il devait nécessairement être tenu compte, il n'existait ni état des lieux, ni de plan annexé au bail ou à son avenant et sur lesquels les époux X... puissent asseoir leur demande de remise en état des lieux dans leur situation initiale, la Cour d'appel de MONTPELLIER a violé l'article 455 du code de procédure civile.