Nintendo scella la collaboration entre la technique et l’art en élaborant les bases économiques et conceptuelles du jeu vidéo (graphisme, univers cohérent, narration…) qui connaîtra une croissance fulgurante au début des années 90. L’âge d’or des créateurs et programmeurs de génie récompensa les produits qui portaient leur marque. Peter Molyneux (Populous…), John Roméro (Quake, Doom…), Yuji Naka (Sonic…), Frederick Raynal (Alone in the Dark…), Philippe Ulrich (Dune…) transformèrent leur nom en un gage de qualité de la même façon que les réalisateurs. Tous créèrent un univers propre et posèrent au passage les catégories du genre (doom-like, god game, stratégie…). L’histoire, bien souvent, ne servit que de prétexte au jeu, à la manière d’un Hitchcock avec son MacGuffin (dans la presse spécialisée l’histoire ne comptait que peu dans la note finale). Tout comme le cinéma, le jeu vidéo chercha à immerger le spectateur dans une atmosphère toute particulière, à la différence que le joueur devint acteur de la narration.
Mais la frontière séparant les techniciens des créateurs, les joueurs des concepteurs, s’éroda progressivement avec la diffusion de l’informatique et d’internet. Naîtra de cette fusion un personnage bien connu : le geek. Féru de culture populaire, d’informatique, et de jeu vidéo, son rôle deviendra central dans le développement du secteur (et dans bien d’autres d’ailleurs).Allaité à la Game Boy, celui-ci grandit avec le virtuel dont il connaissait parfaitement les règles et les icônes. Le geek constitue le prototype de l’artiste pop ayant compris que ce langage nécessite autant de maîtrise technique que de culture et de créativité. Pas étonnant qu'ils marquent autant la mode, le cinéma, ou encore la musique.
Counter Strike, un jeu en ligne culte, naquit de cette logique. A l'origine du projet, deux adeptes des jeux vidéos qui détournèrent l’univers de Half Life, un jeu de science fiction, pour le transposer au monde de l’anti-terorisme. Leurs compétences techniques leur permirent d'élaborer le produit qu'il désirait pour s'amuser sans vouloir initialement le commercialiser. L’éditeur de Half Life, s’apercevant du succès, en racheta les droits et embauchera au passage ses deux concepteurs.Le secteur abordait là un tournant majeur.
Le jeux vidéo, avec l’avènement d’internet, devint de plus en plus participatif dans sa conception (World of Warcraft par exemple). Le joueur s’accapara ainsi une part des anciennes compétences dévouées aux concepteurs et proposa d’inventer à son tour des mondes virtuel toujours plus captivants et réalistes. N’est-ce d’ailleurs pas un but de la culture pop que de créer de nouveaux mondes ? Le jeu vidéo, une histoire pop en somme.