[Critique cinéma] L’illusionniste

Par Gicquel
« L’illusionniste » de Sylvain Chomet Vu au cinéma 3 out of 5 stars L’esprit Tati, au coeur de  l’univers de Sylvain Chomet , l’idée est séduisante. Lunatique et poète , Mr Hulot a bien dû un jour, vivre du côté de Belleville, là où l’auteur des Triplettes nous conte de si belles aventures. Mais cette fois, l’histoire est triste et le décor noyé dans la grisaille pluvieuse d’une Angleterre frigorifiée. Notre héros, un illusionniste déjà sans illusion a rejoint la perfide Albion devant le désintérêt croissant du public français  pour les numéros de cirque traditionnels. Nous sommes à la fin des années cinquante, la TV pointe le bout du nez, et le rock’n roll écrase tout sur son passage. On dit qu’une nouvelle guerre se prépare et le clown triste jette son dernier sourire autour d’une corde aussi maigrelette que son cou. Car de l’autre côté de la Manche la situation n’est pas plus folichonne. Et en plus, il pleut !… Sylvain Chomet a imaginé ce récit à partir d’un scénario (trop ?) inachevé de Jacques Tati qui n’a laissé aucune indication sur ses réelles intentions quant au contenu de cette histoire de fin du monde . Le lapin est sorti du chapeau , pour finir dans la casserole ? Une mélancolie certaine l’accompagne : acrobates, jongleurs, ventriloques, sont passés de mode, et les escrocs tels des vautours, leur font la cour. Seule lueur dans ce morne horizon,  une jeune fille rencontrée dans un pub Ecossais, et  pour qui l’univers est encore magique. Innocente, et naïve, elle voit dans l’illusionniste tous ses rêves se réaliser. Si pour saluer Tati, on aurait aimé plus de couleurs et de poésie, plus de consistance dans le récit, l’hommage qui lui est rendu est sans conteste le pari réussi de cette entreprise cinématographique un peu vaine. La faiblesse du scénario accentuée par des dialogues à minima (une constante chez Tati) s’efface devant la drôlerie et la nostalgie soulignées par le coup de crayon réaliste de Chomet. Le dessin est fidèle à l’image que l’on conserve de Mr Hulot, au point d’assister à la projection de «  My uncle »  dans un cinéma de la capitale britannique. La jeune fille a des rêves de princesse, magique quoi ! Le clin d’œil le plus clinquant  à Jacques Tati, car le héros de ce film d’animation, c’est bien Tati en personne, Tatischeff de son vrai nom, celui qui s’affiche sur l’affiche que l’illusionniste doit sortir à chaque nouvelle étape .Petits théâtres,  garden-parties, pubs perdus dans des villages tout aussi paumés de la côte ouest de l’Écosse, Mr Hulot a un gros cafard. C’est par où déjà Sainte-Sévère ? Le musée Jacques-Tati Il se trouve à Sainte-Sévère, là où le réalisateur a tourné «  Jour de fête ». C’est dans l’Indre et c’est à voir absolument déjà pour sa situation , sur la place même où le fameux chapiteau du cirque s’est installé pour le film. A l’intérieur un musée extrêmement vivant  se présente à travers la reconstitution du café du film avec les accessoires d’époque, et la caméra qui va avec. Une scénographie de la place  du village propose plusieurs plans animés en direct, en liaison avec les scènes de «  Jour de fête »  projetées simultanément. Dans le  bureau de poste des années 50 , chaque téléphone vous raconte quelques passages du film. Et je dois en oublier, mais j’ai découvert ce musée par hasard il y a un an (il venait d’ouvrir) et ça demeure un grand souvenir.